13 novembre, naissance d’une web sphère

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Les attentats sanglants perpétrés à Paris le 13 novembre dernier ont constitué un drame qui restera dans l’histoire et dont les conséquences politiques à moyen terme sont encore incertaines.


Mais, dans le même temps, ils ont été des révélateurs de la manière dont fonctionne désormais ce système de communication global qui nous entoure. UNE FRAPPE AU CŒUR DU MONDE DE LA


COMMUNICATION ET DE LA GÉNÉRATION Y Plusieurs facteurs ont contribué à faire des attentats de Paris un événement médiatique sans commune mesure, notamment sur l’internet. D’abord, les


attentats ont eu lieu au cœur de Paris, grande capitale européenne qui occupe une place importante dans l’imaginaire collectif, siège d’une multitude d’organisations médiatiques et lieu de


travail d’un grand nombre de correspondants étrangers. Par conséquent l’attention médiatique mondiale envers les attentats a été tout de suite maximale d’autant plus que les quartiers en


questions sont fréquentés par des journalistes et des professionnels de la communication et des médias. Ensuite, le milieu frappé est constitué en grande partie par des jeunes urbains,


actifs et diplômés. Autrement dit, parmi ceux qui ont été touchés directement, beaucoup appartiennent à une catégorie sociale dont le taux de connexion et d’usage des dispositifs de


communication et de réseautage mobile est très élevé. Il en a découlé une énorme et quasi-immédiate production de contenus et d’interactions sur le sujet. Enfin, le degré d’atrocité et de


brutalité ainsi que l’échelle atteinte par ces crimes odieux est très rare en Europe, ce qui a décuplé la force du choc au sein de l’opinion. L’ÉMERGENCE D’UNE WEB SPHÈRE AUTOUR DES


ATTENTATS Ces facteurs ont contribué à faire émerger une _web sphère_ immense et très complexe. Une web sphère est définie par Steven M. Schneider et Kirsten A. Foot comme un ensemble de


ressources numériques librement accessibles, réparties sur différentes pages web ou serveurs internet reliées entre elles par des liens, qui se réfèrent à un événement ou thème spécifique1.


> Le grand public a lui-même mis en œuvre une panoplie > communicationnelle sophistiquée Il s’agit donc d’un micro-espace public, circonscrit à la fois par une orientation thématique


et des limites temporelles. La web sphère du 13 novembre a été constituée par une multitude de canaux médiatiques dont une grande partie fonctionne en temps réel (chaînes d’information en


continu, sites d’actualité, radios d’information), qui se surveillent mutuellement et qui interagissent en permanence. Chacun de ces canaux médiatiques professionnels dispose des


prolongements au sein des réseaux socionumériques comme Facebook et Twitter où quasiment tous leurs journalistes sont également présents. C’est sur ces plateformes propriétaires, régies par


des règles techniques et des logiques socioéconomiques complexes, que les acteurs médiatiques ont interagi avec le grand public qui lui-même a mis en œuvre une panoplie communicationnelle


sophistiquée pour suivre le déroulement de l’actualité. LE RÔLE CENTRAL DE TWITTER Grâce à la rapidité et la facilité de circulation des messages qui y sont publiés, Twitter a sans aucun


doute constitué le système nerveux de la web sphère qui s’est structurée autour des événements du 13 novembre. Des millions de tweets en plusieurs langues ont été produits dans les heures et


les jours suivants les attentats un peu partout dans le monde, comme on peut le voir dans les données ci-dessous produites par le laboratoire SMaPP de l’université de New York et publiées


par le Washington Post. Aucun _hashtag_ emblématique n’a émergé, à l’image du #JeSuisCharlie (ou de #CharlieHebdo) en janvier dernier, mais plutôt une multitude comme #Bataclan, #Fusillade,


#Attentats en français et bien sûr #Paris dans toutes les langues comme on peut le constater dans les données extraites de Topsy. Twitter a d’abord été utilisé pour répandre l’information


factuelle de ce qui s’est passé mais aussi pour diffuser des témoignages personnels. Par la suite d’autres _hashtags_ se sont répandus dans une visée plus pratique. Par exemple #porteouverte


a été utilisé pour proposer un refuge à des personnes en danger ou #recherche pour tenter de retrouver des proches manquant à l’appel. Les informations données par les médias, les conseils


des autorités ainsi que des appels comme celui pour le don du sang ont aussi été largement relayés. Enfin, un débat s’est engagé assez rapidement sur les causes et les responsabilités de ces


attentats, parallèlement aux hommages aux victimes. Nous retrouvons là des fonctions très proches de celles qu’assure Twitter au moment de catastrophes naturelles. L’UTILISATION DE FACEBOOK


ET D’INSTAGRAM Facebook, de son côté, a mis à disposition deux fonction dédiées, le _Safety Check_ permettant de rassurer ses proches, qui a été utilisé selon la société américaine par


quatre millions de personnes et vu par leurs 360 millions d’amis, et un module permettant d’insérer le drapeau tricolore dans son avatar. La compagnie de Mark Zuckerberg a été critiquée à ce


sujet pour ne pas avoir activé les mêmes fonctionnalités au moment de l’attentat de Beyrouth survenu quelques jours plus tôt. En dehors de la France, la polémique dénonçant les deux poids


et deux mesures dans la couverture médiatique de ces deux attaques terroristes sanglantes a pris de l’ampleur, portée par l’émergence de _hashtags_ comme #prayforbeirut, équivalent du


#prayforparis très utilisé dans le monde anglo-saxon. Instagram, quant à lui, a été mis à contribution comme source d’images pour illustrer notamment les hommages aux victimes. INFORMATION


EN TEMPS RÉEL ET DISSÉMINATION DE RUMEURS Lors d’événements de cette envergure, la présence sur les lieux de citoyens équipés des _smartphones_ et des dispositifs de communication en réseau


accélère le temps de la circulation de l’information au point où on a l’impression de vivre les événements en direct. UN CAS EMBLÉMATIQUE DE « JOURNALISME AMBIANT » Dans le même temps, les


réseaux socionumériques ont constitué des sources d’information brute non seulement pour le grand public mais pour les journalistes eux mêmes : images, vidéos, témoignages produits et


diffusés par des amateurs se sont trouvés dans les médias professionnels après vérification et recoupement. Nous remarquons là le renforcement d’une tendance déjà ancienne qui voit les


journalistes chercher à intégrer la production amateur dans leurs routines de travail, au point de constituer ce qu’Alfred Hermida appelle un « journalisme ambiant »2. Ainsi, les citoyens et


les journalistes co-produisent des fragments d’information qui, agrégés par les médias, font l’actualité. Cette mutation du travail journalistique nécessite des compétences techniques et


des savoir-faire spécifiques. Elle exige également une déontologie rigoureuse dont les limites ont parfois été franchies. Ainsi, dans la frénésie médiatique qui a suivi les attentats, des


journalistes voulant obtenir à tout prix une exclusivité ont multiplié les sollicitations, parfois la limite du harcèlement, auprès des personnes ayant publié leurs témoignages sur les


réseaux socionumériques. D’autres, n’ont pas hésité à payer pour des vidéos amateurs tournées sur les scènes des crimes ou au moment d’assauts policiers. D’une certaine manière les attentats


qui ont eu lieu à Paris en janvier et en novembre 2015 inaugurent quant à eux une nouvelle ère pour le journalisme dans laquelle les réseaux socionumériques, comme Twitter, Facebook ou


Instagram, jouent un rôle central. -- Crédits photos _Le Carillon_. Pierre LRNT. Flickr Capture d'écran de Facebook Safety check À LIRE ÉGALEMENT DANS LE DOSSIER « MÉDIAS &


TERRORISME » : Charlie et ses confrères : « -Je t’aime ! – Moi non plus », par Arnaud Mercier Du conspirationnisme comme idéologie, par Emmanuel Taïeb Information en continu : les chaînes en


font-elles trop ?, par François Jost Le 13 novembre : un tournant dans la crédibilité des médias, par François Jost Attentats : l'information en guerre contre les rumeurs, par


Guillaume Galpin #BrusselsLockDown : l'information a-t-elle une limite ?, par Guillaume Galpin * 1Schneider, S. M., Foot, K. A. (2006). « Web Sphere Analysis. An Approach to Studying


Online Action », in Hine, C. (dir.), Virtual Methods. Issues in Social Research on the Internet, Oxford and New York: Berg, p.157–170. * 2Alfred HEMIDA, « Twittering the News: The Emergence


of Ambient Journalism », Journalism Practice, Vol. 4, No. 3, 2010, p. 297-308. MÉDIAS ET TERRORISME - ÉPISODE 1/8  Depuis les attentats contre le World Trade Center, le 11 septembre 2001,


les rumeurs conspirationnistes fleurissent, relancées lors de chaque attentat en Europe. Emmanuel Taïeb, professeur de science politique, analyse dans cet article les caractéristiques


récurrentes de ces thèses complotistes.


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