Libre-échange 2. 0 : l’environnement est-il mieux protégé dans l’aceum?

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Dans un contexte marqué par les affrontements entre démocrates et républicains au sein du Congrès et alors que la campagne pour les élections présidentielles de novembre creuse les clivages


politiques aux États-Unis, nous pourrions penser que la question de l’environnement recule. Or avec le nouvel ALENA, les normes environnementales ont au contraire bénéficié d’une


circonstance opportune pour gagner en importance. En effet, la ratification du nouvel Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM), en pleine pandémie de Covid-19, a clôturé la fin de


négociations tumultueuses dont l’un des enjeux litigieux était la question des normes environnementales. En inscrivant l’environnement comme un axe important de son programme politique, le


gouvernement du Canada a ramené les normes environnementales à la table de discussion, même si cet enjeu ne fait pas partie de l’ordre du jour de l’administration Trump. En tant que


chercheur au Centre d’études sur l’intégration et la mondialisation de l’Université du Québec à Montréal, je m’intéresse à la manière dont les rapports de forces économiques entre les États


nord-américains façonnent les négociations entourant le libre-échange en Amérique du Nord, dans un contexte de tensions commerciales entre les États-Unis et leurs principaux partenaires


commerciaux. GRÂCE À LA MAJORITÉ DÉMOCRATE La négociation de l’ACEUM a été précédée par une dénonciation du Mexique dans le discours politique américain anti-ALENA. En effet, le Mexique


était régulièrement accusé par la gauche et les syndicats du secteur de l’automobile aux États-Unis, de dumping environnemental et social. On reprochait au Mexique d’appliquer des normes


environnementales et de travail moins strictes que ceux de ses partenaires nord-américains, afin de garder un avantage compétitif et d’attirer les investissements directs étrangers dans


l’industrie de l’automobile. Cette rhétorique a pris une ampleur particulière dans la campagne contre l’ALENA menée par Donald Trump, d’abord comme candidat à la présidentielle de 2016, puis


comme Président des États-Unis. Avec l’arrivée d’une majorité démocrate à la Chambre des représentants du Congrès américain, à l’issue des élections de mi-mandat de novembre 2018, l’intérêt


pour l’environnement dans le programme politique américain de renégociation du libre-échange a pris une plus grande importance. La ratification du nouvel accord se trouva dès lors rattachée


à l’assurance qu’il offrait en matière environnementale. L’occasion s’était ainsi offerte de renforcer la présence des normes environnementales dans les négociations et dans le processus de


ratification. MIEUX QUE L’ALENA Aussi, un chapitre complet de l’ACEUM traite spécifiquement des enjeux environnementaux en matière de coopération réglementaire. Il apporte clairement une


innovation par rapport à l’ALENA, en introduisant un article spécifique (l’article 24.8) faisant référence aux sept accords multilatéraux sur l’environnement (AME) ratifiés par les États


partis, en les obligeant explicitement à respecter leurs engagements. Les AME sont des accords parallèles signés par les États partis de l’ALENA avec d’autres pays, pour renforcer


spécifiquement les normes de protection environnementale dans le cadre de leurs relations de libre commerce. C’est la première fois en Amérique du Nord qu’un accord de libre-échange intègre


les engagements environnementaux pris par ses signataires dans des accords distincts impliquant des parties tierces. En évoquant la sensibilité des défis environnementaux, il faut souligner


que l’ACEUM a été négocié dans un contexte économique caractérisé par le développement de l’industrie du gaz de schiste aux États-Unis, l’extension des corridors pétroliers au Canada — sous


fond de contestations des populations autochtones — et l’accroissement des investissements du Mexique dans l’exploration des hydrocarbures. Cependant, l’ACEUM à la différence de l’ALENA,


prévoit des engagements nouveaux en matière environnementale visant spécifiquement l’amélioration de la qualité de l’air et la lutte contre les déchets marins. LES NORMES CANADIENNES PRIMENT


Le droit souverain de chaque partie de fixer et d’appliquer à l’échelle nationale des normes en matière de protection environnementale a été par ailleurs clairement réaffirmé dans l’ACEUM.


Cela se traduit, par exemple pour le Canada, par la primauté de l’application de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE) de 1999, sur le Règlement sur les substances


appauvrissant la couche d’ozone et les halocarbures. L’application de la LCPE étant considérée comme plus englobante. La question des normes environnementales est d’autant plus importante


pour le Canada qu’elle touche celle du règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), un élément majeur dans l’agenda de négociations des États-Unis. PLUS D’AUTORITÉ AU CANADA


Dans le cadre du mécanisme de RDIE, le Canada était régulièrement poursuivi par des investisseurs américains pour des préjudices subis en raison du renforcement régulier de ses législations


en matière d’environnement. En effet, l’application de normes environnementales plus rigoureuses, qui exigent l’adaptation technologique des chaînes de production, engendrait des coûts


additionnels pour les investisseurs étrangers au Canada. Ainsi, le pays a été condamné à plusieurs reprises et contraint de verser plus de 300 millions de dollars à titre de dommages et


intérêts aux investisseurs américains. Une situation qui était financièrement inconfortable pour Ottawa et les gouvernements provinciaux, car elle obstruait aussi l’application des avancées


réglementaires en matière écologique au Canada. La négociation de l’ACEUM a offert l’occasion au Canada de mettre fin au mécanisme arbitral de règlement des différends entre investisseurs et


États qui lui était défavorable. Désormais, il appartiendra aux tribunaux canadiens de statuer sur les différends entre les investisseurs américains et le Canada au sujet de dommages subis


en raison de modifications des lois canadiennes, et notamment des législations environnementales. Cette configuration réglementaire nouvelle permettra au Canada d’avoir plus d’autorité dans


l’application de ses engagements environnementaux. RECONNAISSANCE DU RÔLE DES AUTOCHTONES Avec l’entrée au cœur des négociations du nouvel ALENA, des exigences en matière environnementale de


la majorité démocrate à la Chambre des représentants, l’environnement a acquis une portée technique, politique et idéologique majeure dans les négociations et plus encore dans le processus


de ratification. Cela a conforté le gouvernement fédéral canadien dans certains aspects clés de sa stratégie de négociation, lui permettant d’obtenir des avancées mettant en lumière son


agenda progressiste, notamment qu’il soit mentionné dans le nouvel accord la reconnaissance du rôle des peuples autochtones dans la préservation de la biodiversité. C’est dire que face aux


défis climatiques, le libre-échange devra s’accommoder de la protection de l’environnement comme un élément impératif de la coopération réglementaire, quelles que soient ses multiples


évolutions dans la trajectoire de l’intégration nord-américaine.


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