L’immobilier va baisser… tant mieux ? | terra nova

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Le marché de l’habitation n’ayant « en mémoire » qu’une baisse maximum de 10 %[3], il n’est pas impossible qu’il cherche à s’équilibrer, après une première réaction classique à la baisse des


volumes, à ce niveau de correction. La soutenabilité de cet ajustement lent et partiel dépendra des mouvements de taux et d’inflation au cours des prochaines années. Car les micro-cycles du


logement des 30 dernières années ont été pilotés par la disponibilité du crédit, les crises bancaires et les effets d’« avances » spéculatives sur la tendance générale de baisse des taux.


L’histoire connaissait des variations, mais la tendance demeurait. Si on entre à présent dans un environnement de taux longs durablement installés autour de 3 % – ce qui met le crédit


hypothécaire à 4 % ou plus, et recrée des alternatives plus rentables de placement de l’épargne –, il est possible qu’on entre dans un cycle fondamentalement différent. EN TOUTE HYPOTHÈSE,


CET AJUSTEMENT SERA PROBABLEMENT LENT, ITÉRATIF, AU DÉBUT PARTIEL, AVEC DES EFFETS SIGNIFICATIFS SUR LES VOLUMES. CE QUI CRÉE UN PROBLÈME D’ACCESSIBILITÉ. 4. L’ENJEU DES POLITIQUES PUBLIQUES


L’enjeu des politiques publiques est de ne pas empêcher un mouvement socialement nécessaire, de résister à la tentation des aides aux propriétaires, mais en évitant un « krach » de la


construction neuve et en renforçant les politiques structurelles en faveur de la construction et de la transition énergétique 4.1. LAISSER LES PRIX IMMOBILIERS BAISSER EN FACE DU


RENCHÉRISSEMENT DU CRÉDIT EST MACROÉCONOMIQUEMENT SOUTENABLE ET SOCIALEMENT NÉCESSAIRE Si la plus grande part de l’accroissement du patrimoine par rapport aux revenus, au cours des 40 


dernières années, vient moins de la hausse du rendement du capital que du renchérissement de sa valeur liée à la baisse des taux, la remontée de ces derniers aura un effet plutôt positif sur


les inégalités, à condition justement d’être suffisante. Dès lors que le pouvoir d’achat immobilier est régi par les prix immobiliers et les conditions de crédit, il faut que les prix


baissent assez pour compenser le renchérissement des prêts immobiliers. Sans quoi les seuls gagnants de la baisse seront ceux qui sont assez riches pour acheter sans emprunter… Pour un


dossier typique de prêt sur 15 ans avec 20 % d’apport, la hausse de 1 point des taux d’intérêts (par exemple de 3 à 4 % hors assurance) doit être compensée par un peu plus de 5 % de baisse


des prix pour maintenir les mensualités de remboursement constantes – à moins d’allonger de deux ans la durée de prêt. Nul ne peut prédire si les taux directeurs finiront effectivement par


redescendre en 2024, comme l’anticipe le consensus financier, mais il est probable que les taux des crédits immobiliers ne reviennent pas aux niveaux pré-2022 avant très longtemps. Même


s’ils revenaient à 3 % sur 20 ans, après un pic proche des 4 % en 2023, les ménages qui s’endettent aujourd’hui pour acheter – c’est-à-dire le cas de presque tous les primo-accédants – ne


pourront pas compter sur une importante renégociation ultérieure de leur crédit pour retrouver du pouvoir d’achat. Pour que ces ménages ne soient pas (encore) appauvris par la hausse des


taux en cours, il faut donc que l’ajustement soit d’assez grande ampleur. Or, comme nous l’avons montré_ supra_, rien n’est moins sûr : depuis le début du retournement du marché, les prix


nominaux ont peu baissé à l’échelle nationale (avec des situations contrastées selon les villes) et il existe de nombreux freins psychologiques à la baisse des prix. IL FAUT DONC RÉSISTER À


LA TENTATION D’AJOUTER DES FREINS POLITIQUES ET FISCAUX (voir _infra_). Au terme d’un ajustement suffisant, ceux qui envisageront d’accéder à la propriété, ou ceux qui revendront pour


s’agrandir, bénéficieront de prix plus accessibles. Dans l’intervalle, la prolongation du dispositif du prêt à taux zéro (PTZ), qui devait s’arrêter le 31 décembre, pourra permettre aux plus


modestes de ne pas subir la hausse des taux. Ceux qui perdront seront les plus favorisés, ceux qui espéraient vendre pour louer ou acheter un bien plus petit et dépenser la différence,


ainsi que leurs héritiers. Les multipropriétaires, s’ils ne perdront rien en loyers, subiront une baisse de leur patrimoine. Perdront également en revenus les professions transactionnelles


(agences immobilières, notaires, vendeurs et gestionnaires de produits pierre papier, etc.), qui ont bénéficié de la capacité d’imposer, pour une charge de travail identique, des


rémunérations en pourcentage à une base continument revalorisée. AU TOTAL, LA REDISTRIBUTION POURRAIT FONCTIONNER, POUR UNE FOIS, AU PROFIT DE CERTAINS PARMI LES PLUS JEUNES ET LES MOINS


FAVORISÉS, au détriment des boomers et des plus riches – ou de leurs héritiers. Une partie de la tendance à l’accroissement des inégalités patrimoniales au cours de ces 40 dernières années


se renverserait. Dans l’absolu, il n’y a aucun mal à cela, bien au contraire…  4.2. RÉSISTER À LA TENTATION DES AIDES AUX PROPRIÉTAIRES, TOUT EN RESTANT VIGILANTS SUR LES RISQUES DE DÉRAPAGE


Mais évidemment, les catégories pénalisées ne l’entendront pas de cette oreille. À commencer par les propriétaires, qui vont SOLLICITER LES POUVOIRS PUBLICS POUR REMETTRE EN PLACE


DIFFÉRENTS DISPOSITIFS D’AIDES AFIN DE SOUTENIR L’INVESTISSEMENT IMMOBILIER et, _in fine_, de limiter l’ajustement. Ces demandes seront d’abord fiscales : * sur la fiscalité des revenus :


déductibilité des intérêts d’emprunt à l’impôt sur le revenu des accédants (qui existait avant les années 1990) ; extension à la location nue du régime du LMNP permettant d’amortir la valeur


des biens ; * sur la fiscalité du patrimoine : demandes de baisse des droits de mutation ou de l’IFI. Ces demandes auront globalement pour objectif de modifier au profit de la pierre


l’équilibre fiscal qui s’est institué entre placements financiers et immobiliers, afin d’accroitre la rentabilité nette d’impôts des propriétaires et de ralentir, à offre constante,


l’ajustement du prix de l’immobilier aux nouvelles conditions de marché. Elles reviennent, toutes choses égales par ailleurs, à faire financer par la collectivité un rattrapage de


rentabilité nette, et un maintien de valeur, des propriétaires immobiliers. Malgré ce que représente l’immobilier dans le patrimoine des Français, il ne semble pas socialement légitime de se


précipiter soutenir fiscalement le capital des mieux dotés, ce serait anti-redistributif. La seule justification pourrait être d’ordre macroéconomique, alors que l’immobilier représente une


grosse moitié du crédit bancaire au secteur privé, 40 % de l’investissement et 7 % de l’emploi. EN PRINCIPE, L’EFFET MACROÉCONOMIQUE D’UNE BAISSE DES PRIX DE L’IMMOBILIER EST TOUTEFOIS


RELATIVEMENT MODESTE DANS NOTRE PAYS car elle a très peu d’impact sur la consommation des ménages, dont plus de 90 % des crédits sont à taux fixe. L’effet récessif passe surtout par le canal


de l’investissement immobilier des ménages, dont le poids s’élève en France à 155 milliards d’euros (6 % du PIB). Il s’agit concrètement des dépenses au titre de la construction de


logements neufs, de l’entretien-amélioration des logements existants et des frais liés aux acquisitions dans le neuf et dans l’ancien (frais de notaire, d’architecte, etc.). Quelques études


disponibles suggèrent qu’une hausse des taux des crédits à l’habitat de 2 points (scénario central pour une hausse de 3 points des obligations d’Etat à long terme) provoquerait une baisse de


l’ordre de 15 % de l’investissement immobilier, ce qui coûterait 1 point de croissance du PIB à la France. L’essentiel des effets négatifs réside dans la construction neuve, qui doit faire


l’objet d’un traitement spécifique (cf _infra_). Si cette perte paraît abordable, surtout si elle s’accompagne d’une hausse de l’activité de rénovation énergétique, l’estimation est fragile


et IL CONVIENDRA D’EN CONTRÔLER LA TEMPÉRATURE ET LA PRESSION AFIN DE SE GARDER LA POSSIBILITÉ D’INTERVENIR EN CAS DE BESOIN. Les pouvoirs publics disposent d’ailleurs de DEUX LEVIERS NON


FISCAUX PERMETTANT D’ACCÉLÉRER OU DE RALENTIR L’AJUSTEMENT DES PRIX DE L’IMMOBILIER : * pour l’accélérer, la méthode la plus efficace est de LIMITER PROVISOIREMENT, DANS LE CADRE DE LA LUTTE


CONTRE L’INFLATION ET DE LA DÉFENSE DU POUVOIR D’ACHAT, LA HAUSSE DES LOYERS. Cet indicateur, on l’a vu, a un impact important sur la valeur intrinsèque. Il doit donc être manié avec


précaution, mais il ne serait pas déraisonnable de limiter pendant un ou deux ans à un montant raisonnable, par exemple 3 %, l’indexation des loyers d’habitation, qui sinon va s’établir pour


les années à venir au-dessus de 5 %. * pour le ralentir, un moyen reste de jouer sur les CONDITIONS D’OCTROI DU CRÉDIT BANCAIRE, à travers des durés d’amortissement plus longues ou des


conditions d’apport initial plus accommodantes. Mais la Banque de France est extrêmement réticente à des propositions et, si des ajustements mineurs peuvent s’envisager, il nous semble


qu’une remise en cause des grands ratios qui préservent la solvabilité des ménages (notamment la règle des 35 % de taux d’endettement maximum et le plafonnement de durée des crédits à 25 ans


dans l’ancien et 27 ans dans le neuf) et ont permis le faible taux de défaut que nous connaissons, serait périlleuse.  LE RISQUE DE CRÉDIT EST AU CŒUR DES ENCHAINEMENTS MACRO-FINANCIERS


QU’IL CONVIENT DE SURVEILLER. Les banques sont très exposées à l’immobilier d’habitation mais aussi commercial (les investisseurs immobiliers ont habituellement recours à des leviers


d’endettement élevés), à travers leurs portefeuilles de prêts, et on a vu que certaines crises immobilières ont pu les forcer à réduire brutalement le crédit, non seulement au secteur


immobilier, mais aussi à l’économie productive. La France n’est de ce point de vue pas la plus touchée du fait de deux caractéristiques importantes : la dominance de l’endettement à taux


fixe chez les particuliers, d’une part, et, de l’autre, la pratique des banques consistant à octroyer le crédit à raison des revenus des emprunteurs plutôt que de la valeur de marché du


bien. Mais d’autres pays, notamment les Etats-Unis du fait de la surexposition des banques moyennes à l’immobilier commercial, sont à l’orée de ces enchaînements. Il est très important


d’éviter ces effets, et de s’en prémunir par plus, et non pas moins de surveillance et de régulation des banques, dont l’interconnexion systémique pourrait nous conduire à une situation de


crise financière « importée » comme en 2008. 4.3. DES INTERVENTIONS TRANSITOIRES POUR ÉVITER UN « KRACH » DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION NEUVE LES PROMOTEURS IMMOBILIERS CONSTITUENT UN ACTEUR


IMPORTANT en ce qu’ils permettent de construire des logements nouveaux, aux normes les plus récentes, et de limiter le déficit en logements, qui est facteur d’inflation sous-jacente. Outre


qu’ils sont affaiblis par la baisse tendancielle des permis de construire, LA BAISSE DES PRIX VA LES PRENDRE EN CISEAUX entre leurs prix de revient, qui sont déterminés par le coût du


foncier et le coût des travaux, et leurs prix de vente, qui répliquent ceux des logements avec une prime qui n’est pas infiniment extensible. La marge des promoteurs étant de l’ordre de 10 


%, une baisse des prix de 20 %, même si elle ne se répercutait que partiellement sur la valeur des logements neufs (dont l’écart avec les prix de l’ancien est historiquement faible),


menacera la rentabilité de leurs opérations en cours. Dans la pratique, plusieurs effets vont se produire : * sur certaines opérations où le promoteur a acheté le terrain et engagé des


travaux sur la base d’une commercialisation seulement partielle, le solde des ventes devra se faire à un prix plus bas, de sorte que les fonds propres investis auront une rentabilité


négative ou se perdront, et, dans certains cas, que la dette ne pourra pas être remboursée. CES SITUATIONS DE RESTRUCTURATION sont normales dans les périodes de crise – et il convient


qu’elles soient traitées avec rapidité par les tribunaux de commerce pour que les investisseurs initiaux prennent leur perte et fassent rapidement place à des capitaux nouveaux permettant de


terminer les opérations. * surtout, certains PROMOTEURS ANNULERONT UNE GRANDE PARTIE DE LEURS OPÉRATIONS : les promoteurs montent et commercialisent généralement une majorité de leurs


opérations avant d’avoir acquis les terrains nécessaires et ne démarrent les travaux qu’une fois les programmes en grande partie dérisqués. S’il ne trouve plus d’équilibre économique pour


une opération au moment d’engager ses investissements, un promoteur préfèrera logiquement l’abandonner, au seul prix du temps passé et des frais d’études nécessaires au dépôt du permis de


construire. C’est la raison pour laquelle nous observons déjà le décrochage décrit précédemment entre le nombre de logements autorisés et le nombre de logements commencés depuis 2022. C’est


une variable à surveiller car cet effet de « trou d’air » est responsable de l’essentiel de l’effet négatif sur la croissance de la baisse des prix immobiliers : coup de frein sur le BTP et


l’emploi ; blocage des parcours résidentiels faute de mise sur le marché de nouveaux logements (et impossibilité d’ajustement des prix par manque d’offre) ; perte de ressources fiscales


(TVA). * POUR SORTIR DU « TROU D’AIR », IL FAUDRA QUE LES CONSTRUCTIONS REPRENNENT AVEC DES PRIX D’ACHAT DU FONCIER PLUS BAS, Y COMPRIS PAR RENÉGOCIATION DES PROMESSES DE VENTES DE TERRAINS


EN COURS. Si les appartements neufs sont vendus 10 à 20 % moins chers, le coût de construction restant identique, il faudra acheter plus bas le prix des terrains, et dans une proportion très


supérieure à la baisse des prix puisque les terrains ne représentent qu’une part minoritaire des coûts de la promotion. Mais cet ajustement, s’il est entièrement laissé aux forces du


marché, risque d’être très lent, car les détenteurs de foncier, qui avaient déjà retenu leurs biens quand les prix étaient hauts, espèreront un retournement de marché avant de se résoudre à


une perte de valeur considérable en comparaison de la situation antérieure. LES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES N’ONT PAS À EMPÊCHER LES PROMOTEURS IMMOBILIERS DE FAIRE DÉFAUT, EN TOTALITÉ OU


SEULEMENT SUR UNE PARTIE LEURS OPÉRATIONS, QUAND LA BAISSE DES PRIX LES PREND À REVERS. La réglementation prévoit d’ailleurs des mécanismes pour permettre de terminer les programmes en cours


(la garantie financière d’achèvement), même en cas de défaillance du promoteur. ELLES ONT EN REVANCHE UN RÔLE À JOUER POUR QUE LES AJUSTEMENTS FONCIERS SE FASSENT PLUS VITE ET QUE


L’ACTIVITÉ DE CONSTRUCTION PUISSE REDÉMARRER PLUS TÔT. Ce sont d’ailleurs souvent des ENTITÉS PUBLIQUES QUI DÉTIENNENT LE FONCIER CONSTRUCTIBLE (collectivités, établissements publics,


entreprises publiques). Meme si le rendement aurait été plus élevé hier, le moment est venu plus que jamais de RENDRE CES TERRAINS DISPONIBLES POUR LA CONSTRUCTION et de trouver des formes


d’association permettant d’intéresser les collectivités détentrices du foncier au résultat final des opérations de promotion sur leurs terrains, plutôt que d’encourager les enchères au


départ. D’une manière plus générale, il est dans le rôle des pouvoirs publics de faire en sorte que le retrait probable, pendant cette période, des institutionnels privés n’accroisse pas la


sous-efficience de l’immobilier locatif. Le modèle du particulier « multi-propriétaire » locatif, s’il fait vivre beaucoup d’intermédiaires divers, n’est pas le plus efficace pour « 


rationaliser » l’industrie de la gestion locative. Les propriétaires institutionnels gèrent plus efficacement les frais de transaction, de gestion et de réparation/entretien. Quitte à avoir


des dispositifs de soutien publics, il serait préférable qu’ils visent le logement intermédiaire et favorisent l’implication des investisseurs institutionnels publics. Dans la construction


neuve, les grandes foncières publiques ont donc vocation à devenir de plus en plus une contrepartie à l’achat des programmes, que ce soit pour régler le sort des programmes en cours ou pour


relancer l’activité après ajustement des prix. CDC Habitat et Action logement se préparent d’ailleurs à jouer ce rôle, et doivent y être encouragées. DANS CE CADRE, LE « LOGEMENT


INTERMÉDIAIRE » EST UN INSTRUMENT DE CHOIX : il s’agit d’un produit destiné aux classes moyennes (les plafonds de loyer et de ressources sont les mêmes que ceux du Pinel), qui génère 10 % de


TVA pour l’État (soit moins deux fois moins que le logement libre, mais deux fois plus que le logement social) et que seuls les bailleurs institutionnels ont la possibilité d’acquérir


auprès des promoteurs. Mais son usage demeure très contraint : il n’est autorisé qu’en zone tendue, dans les communes non carencées en logements sociaux, et ne couvre donc qu’une part


minoritaire de la production. Une levée de ces contraintes pour deux ans pourrait permettre d’accompagner un plan de soutien à la fois efficace et proportionné au secteur du neuf, _a


fortiori_ si le gouvernement souhaite maintenir l’extinction du Pinel fin 2023. 4.4. RENFORCER LES POLITIQUES STRUCTURELLES, EN FAVEUR DE LA PRODUCTION DE LOGEMENTS ET DE LA TRANSITION


ÉNERGÉTIQUE DANS UN CONTEXTE DE BAISSE DES PRIX IMMOBILIERS, LA PRESSION SOCIALE POURRAIT ÊTRE FORTE POUR RENONCER AUX POLITIQUES STRUCTURELLES : quand les valeurs baissent, les


propriétaires en place, qui défendent leur rente, risquent de s’opposer encore plus à la densification et à la construction de nouveaux logements à proximité de chez eux. De la même façon,


les efforts nécessaires pour financer la transition énergétique apparaitront encore plus coûteux et la tentation sera grande de demander leur suspension ou leur report. OR, QUE LES PRIX


MONTENT OU BAISSENT, NOUS AVONS BESOIN DE PLUS DE LOGEMENTS, AVEC UNE MEILLEURE EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE. C’est donc sur ces deux angles que doivent être concentrées et renforcées les


interventions publiques. LE PREMIER OBSTACLE À SURMONTER EST D’ABORD DE NATURE RÉGLEMENTAIRE ET CONCERNE LES PERMIS DE CONSTRUIRE. Si le sujet des délais de recours est désormais derrière


nous[4], des adaptations équivalentes doivent encore être prises s’agissant des délais de retrait des autorisations d’urbanisme et s’agissant des retraits et recours contre les autorisations


environnementales qui sous-tendent les permis de construire. Par ailleurs l’accélération de la délivrance des permis reste un enjeu majeur et une grande vigilance de l’État s’impose en la


matière. LE PRINCIPE DU « ZÉRO ARTIFICIALISATION NET » (ZAN) RISQUE CEPENDANT DE FREINER LE MOUVEMENT DE PRODUCTION DE NOUVEAUX LOGEMENTS. Il commande, à court terme, de diminuer de moitié


le rythme d’artificialisation des sols de façon à préserver les espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) et les fonctions vitales dont ils sont le support (production alimentaire,


séquestration du carbone, filtration de l’eau, etc.). Pour rappel, les surfaces artificialisées progressent chaque année dans notre pays de 20 000 à 60 000 ha par an (selon les mesures),


soit 2 à 3 fois plus vite que la population et le plus souvent au détriment de terres ayant une réelle valeur agronomique. Sur l’ensemble des sols artificialisés, l’habitat représente


aujourd’hui 42 % des surfaces. Il est inutile de revenir ici sur les dégâts engendrés ces dernières décennies par l’étalement urbain et tous les facteurs qui ont concouru à installer des


millions de ménages dans un mode de vie fortement émetteur de gaz à effet de serre (longs trajets domiciles-travail, moindres économies d’échelles liées à la prolifération de maisons


individuelles, distance aux zones de consommation/services…). LE ZAN VA À L’ÉVIDENCE AIGUISER LA CONCURRENCE ENTRE LES USAGES DU FONCIER : besoins pour la construction de logement bien sûr,


besoins pour la transition énergétique (la production d’une ressource que l’on allait chercher à bas coûts et en quantité abondante dans le sous-sol va désormais devoir être redéployée sur


le sol au moyen de panneaux photovoltaïques, d’éoliennes, etc.), besoins pour la réindustrialisation… Bref, le foncier qui a jusqu’ici été alloué de façon assez indiscriminée et anarchique


va devoir être géré comme une ressource plus rare et plus qualitative. LE ZAN DOIT DONC NOUS POUSSER À LIMITER LES NOUVELLES EMPRISES FONCIÈRES, À LES CONCENTRER DANS LES ENVIRONNEMENTS LES


PLUS PERTINENTS ET À MIEUX VALORISER LES EMPRISES EXISTANTES (ce qui est toujours plus cher) pour satisfaire la demande de logements. Construire « la ville sur la ville », bien sûr, mais


aussi le « périurbain sur le périurbain » ; accélérer la reconversion des friches existantes et vacances commerciales avec le soutien de l’Etat pour en amortir les coûts (cf. l’enveloppe du


plan de relance prévue à cet effet et reconduite depuis car rapidement consommée par les collectivités locales, ce qui est bon signe) ; développer les techniques et programmes de


renaturation en compensation de nouvelles artificialisations. SURTOUT, IL FAUDRA TROUVER UNE SOLUTION AU PROBLÈME DE GOUVERNANCE DES PLANS LOCAUX D’URBANISME (PLU). Beaucoup de projets à


fort impact d’artificialisation résultent d’une mauvaise gouvernance locale. La prolifération de zones artisanales ou de zones d’activités peu fréquentées au sein d’une même


intercommunalité, dans des aires ne présentant aucun dynamisme ni démographique ni économique, est un bon exemple de gaspillage foncier. Et cela résulte trop souvent d’ententes sans aucune


rationalité d’aménagement du territoire entre les différentes composantes de l’intercommunalités. EN SOMME, LA DENSIFICATION ET LA CONSTRUCTION DE LA « VILLE SUR LA VILLE » SUPPOSERA DE


RESTAURER UNE ENVIE DE CONSTRUIRE DANS ET PRÈS DES CENTRES-VILLES ET D’ADAPTER LES INSTRUMENTS DE GOUVERNANCE DE L’URBANISME. Si plus personne n’envisage sérieusement de retirer aux maires


la délivrance des permis de construire (cela équivaudrait à une déclaration de guerre de l’Etat aux collectivités), il faut que les PLU, y compris à l’échelon intercommunal, acquièrent une


réelle valeur normative « plancher » et que les demandes de permis de construire conformes ne soient pas arbitrairement retoquées, retardées ou rabotées. Une autre politique de transition


écologique risque d’être montrée du doigt comme une source de coûts pour les propriétaires et une incitation à sortir leurs biens du marché locatif : LA POLITIQUE DE RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE


DES BÂTIMENTS – et en particulier l’obligation faite aux propriétaires bailleurs de logements énergivores (DPE E, F et G) de procéder à leur rénovation sous peine de ne plus pouvoir les


louer. AU-DELÀ DE LEURS BÉNÉFICES PROPREMENT CLIMATIQUES (UNE MEILLEURE EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE, CE SONT MOINS D’ÉMISSIONS DE GES), LES TRAVAUX DE RÉNOVATION THERMIQUE PRÉSENTENT PLUSIEURS


CO-BÉNÉFICES : la baisse des dépenses d’énergie des ménages libère du pouvoir d’achat disponible pour d’autres usages et garantit de meilleures conditions de vie au plan sanitaire ; la part


des énergies fossiles dans le chauffage domestique restant significative et ces énergies étant largement importées, faire baisser leur consommation contribue à améliorer notre balance


commerciale ; les travaux de rénovation thermique sont  une source importante de créations d’emplois non délocalisables. A TOUS ÉGARDS, LA RÉNOVATION THERMIQUE DES LOGEMENTS APPARAÎT DONC


COMME UNE BONNE AFFAIRE. ELLE SE HEURTE CEPENDANT À PLUSIEURS PROBLÈMES. Outre les potentiels effets rebonds de la consommation d’énergie et le manque de main d’œuvre et d’entreprises


compétentes en nombre et qualité suffisants, elle se heurte aux horizons de temps de la transition : si le coût de l’investissement est massif et immédiat, son horizon d’amortissement


s’étale souvent sur plusieurs décennies (le temps nécessaire pour que les économies d’énergie compensent le coût de l’investissement initial). Face à un horizon aussi éloigné, la tentation


des propriétaires bailleurs peut être de vendre et de laisser au nouvel acquéreur la charge de la rénovation plutôt que d’investir eux-mêmes et de continuer à louer leur bien. Les logiques


de marché joueront assurément leur rôle : sur le marché de l’immobilier, les décotes imposées aux logements les moins performants sur le plan énergétique sont déjà sensibles et commencent à


ronger les espérances de plus-values des propriétaires de « passoires thermiques ». Les pertes envisageables au plan patrimonial peuvent même, dans les zones tendues, s’approcher des coûts


de rénovation et commencer à faire réfléchir les plus récalcitrants. Mais face à un horizon de rentabilité des investissements trop éloigné et à une difficulté de financement des opérations


de rénovation, les logiques de marché s’avèrent souvent insuffisantes. LE SOUTIEN DE LA PUISSANCE PUBLIQUE PARAÎT ALORS NÉCESSAIRE POUR RÉALISER L’INTÉRÊT COLLECTIF RECHERCHÉ. C’est déjà le


cas, notamment avec le dispositif MaPrimeRenov’. Les subventions publiques sont cependant trop indiscriminées : elles financent trop souvent des « petits gestes » à l’efficacité limitée et


aux économies d’échelle insuffisantes. Il serait utile de les concentrer davantage sur des rénovations plus profondes et sur les changements d’équipement de chauffage présentant les


co-bénéfices les plus importants et les plus rapides (remplacement des chaudières au fioul par des pompes à chaleur, éventuellement hybrides, par exemple). Par ailleurs, en zones denses, là


où domine l’habitat collectif, la décision de rénovation est souvent retardée, voire empêchée, par le volume de l’investissement à financer. Or, dans ces cas de figure, la rénovation par


l’extérieur sur décision collective de la copropriété est souvent la meilleure solution. Faute de décision rapide dans ce sens, les propriétaires bailleurs sont souvent contraints


d’envisager une rénovation par l’intérieur qui est souvent moins efficace et sous-optimale du point de vue économique global.   L’ENJEU EST DONC DE PASSER DE LA SUBVENTION DE « PETITS GESTES


 » VIA MAPRIMERÉNOV’, QUI CONCERNE ESSENTIELLEMENT LES MAISONS INDIVIDUELLES ET S’AVÈRE PEU EFFICACE D’UN POINT DE VUE ENVIRONNEMENTAL, À UNE VRAIE POLITIQUE DE TRANSITION DU PARC. En


particulier, les règles de copropriétés peuvent encore être optimisées pour faciliter le vote de travaux de rénovation (par exemple grâce à un encadrement du droit au recours, utilisé à des


fins souvent dilatoires et qui retarde énormément l’engagement des rénovations). De même, le développement des « prêts avance rénovation », qui sont des prêts bancaires remboursables à


l’occasion de la prochaine mutation du bien, pour le financement des travaux, est une piste à explorer pour diminuer les restes à charge et débloquer bon nombre de rénovations restant lettre


morte faute de financement. ANNEXES STATUT D’OCCUPATION DES RÉSIDENCES PRINCIPALES (EN %) Statut d’occupation des résidences principales (en %) AU 1ER JANVIER 2001 2004 2007 2010 2013 2016


(P) 2018 (P) PROPRIÉTAIRES 55,9 56,6 57,2 57,5 57,7 57,7 57,6 Non accédants 34,9 36,4 37,7 37,8 37,9 37,8 37,7 Accédants 21,0 20,2 19,6 19,7 19,8 19,9 19,9 LOCATAIRES 39,7 39,4 39,3 39,4


39,5 39,8 39,9 Bailleurs publics 17,9 17,7 17,5 17,3 17,2 17,1 17,1 Bailleurs privés 21,8 21,7 21,8 22,1 22,3 22,7 22,8 AUTRES STATUTS1 4,4 4,0 3,5 3,1 2,8 2,5 2,5 TOTAL DES RÉSIDENCES


PRINCIPALES (EN MILLIERS) 24 973 26 016 26 993 27 786 28 516 29 256 29 745 * p : données provisoires. * 1. Regroupent essentiellement les ménages logés gratuitement. * Champ : France hors


Mayotte. _Sources : Insee et SDES, estimation annuelle du parc de logements._ ------------------------- [1] Les méthodes divergent et les résultats également, selon la période considérée, et


notamment selon les exigences de résorption du mal-logement que l’on s’applique : la Commission Rebsamen sur Logement concluait en 2021 à un besoin « de 400 000 à 500 000 » lots par an


d’ici 2035 ; la Fédération des promoteurs annonce à présent un besoin de 450 000 lots/an ; à l’inverse, la Cour des comptes relevait dans un référé de 2022 que par application d’une méthode


plus restrictive (méthode Otelo), la DHUP et le CEREMA parvenaient à une estimation plus proche des 370.000 (soit à peu près l’équivalent de la production actuelle).


[2]https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381486#:~:text=tableau%20Taille%20des%20m%C3%A9nages%20%3A%20nombre%20moyen%20d’occupants%20par%20r%C3%A9sidence%20principale&text=Lecture%20%3A%20en%202019%2C%20la%20taille,


hors%20Mayotte%2C%20population%20des%20m%C3%A9nages [3] On notera toutefois que les prix du logement ont baissé d’un tiers en Ile-de-France au début des années 1990. [4] « Le Gouvernement


corrige l’ordonnance sur les délais d’instruction des permis », Batiactu, 15 avril 2020.


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