Habiter dans 20 ans | terra nova

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1.3. LES EFFETS INÉGALITAIRES DU CHANGEMENT La prospective sur ces grandes tendances qui vont affecter la demande de logement invite à anticiper une importante dynamique inégalitaire en


fonction des territoires. À l’échelle nationale, les tendances déjà évoquées (1.1.) vont maintenir une forte demande de logement qui tirera très probablement les prix à la hausse. On observe


déjà que les ménages doivent consentir en moyenne un effort toujours plus important pour se loger : ils consacraient en moyenne 18,3 % de leurs revenus au logement en 2013 contre 16,1 % en


2001. Mais cet accroissement est supporté plus lourdement par les ménages les plus modestes (premier quartile) : 31,3 % en 2013 (24,9 % en 2001). Et parmi ces ménages, ce sont les locataires


du secteur libre qui ont subi la plus forte progression puisqu’ils sont passés d’un taux d’effort de 32,8 % à 40,7 % [25] . Ces chiffres cachent cependant des disparités territoriales


importantes. Il faut donc anticiper, outre les inégalités liées au patrimoine et aux revenus (le premier quartile consent un effort plus important que les autres), des inégalités liées à la


localisation. Deux facteurs vont en effet accroître le poids de la localisation sur la facilité ou la difficulté d’accès au logement. D’une part, le développement métropolitain rend l’accès


au logement plus coûteux et plus sélectif. Les inégalités risquent donc de se développer à l’échelle métropolitaine, comme on le voit en partie avec le phénomène de « _ gentrification _ »


par lequel des quartiers populaires voient arriver de nouvelles populations, au revenu plus élevé, qui contribuent à l’augmentation des loyers ou du coût du logement. Si ce mouvement


transforme profondément la sociologie de certains quartiers, il n’est cependant pas homogène sur l’ensemble du territoire et correspond localement à un accroissement des inégalités visibles


localement. Ces inégalités sélectionnent la population en fonction du revenu mais creusent aussi des limites générationnelles liées au coût d’entrée sur le marché, les jeunes ménages


cherchant à se loger supportant l’augmentation des prix alors que les ménages installés ne sont pas directement exposés à leurs variations. Contrairement à une idée de plus en plus répandue,


les métropoles ne réunissent pas seulement des ménages aisés : elles abritent de fortes inégalités en leur sein. Ainsi, 77 % des ménages pauvres vivent dans les grands pôles urbains [26] .


L’Île-de-France rassemble près d’un tiers des personnes mal logées en France. D’autre part, à l’échelle nationale, une inégalité se développe entre territoires en croissance et territoires


en déclin. Le développement métropolitain est une tendance de long terme, qui s’observe à l’échelle mondiale. Les métropoles sont branchées sur le développement économique lié à la


mondialisation. La localisation de l’activité économique à l’âge industriel était tributaire de la localisation des matières premières, de l’énergie et de la main-d’œuvre, ce qui signifiait


une dispersion de l’activité économique sur le territoire en fonction d’atouts locaux. Dans une économie post-industrielle, ces atouts ont changé de nature. La division du travail se fait à


l’échelle internationale et les avantages comparatifs de l’âge industriel sont remis en cause. La connexion aux lieux de décision économique internationaux prévaut sur les ressources


locales, ce qui entraîne la concentration de l’activité dans les grandes métropoles. Cependant, les effets territoriaux de cette concentration sur l’atout métropolitain ne sont pas


homogènes. Si les métropoles concentrent l’emploi et contribuent largement à la création de richesse, des systèmes de redistribution publics et privés irriguent l’ensemble du territoire. La


région Île-de-France, par exemple, contribue pour près d’un tiers à la création de richesse nationale mais ne dispose que d’un peu plus d’un cinquième des revenus des ménages français. Et


l’écart se creuse : la contribution de l’Île de France au PIB est passée de 27 % à 31 % entre 1975 et 2010 mais les revenus des Franciliens sont passés dans le même temps de 25 % à 22,5 %


des revenus des ménages français [27] . En outre, l’activité et le dynamisme des métropoles régionales débordent sur les territoires proches. Albi ou Rodez bénéficient de la croissance de


Toulouse, comme Libourne croît grâce à Bordeaux, Angers grâce à Nantes, Vienne grâce à Lyon, etc. On peut donc décrire des espaces sociaux-productifs interdépendants qui associent les


métropoles à leurs périphéries [28] . Mais des morceaux de territoires restent à l’écart de la dynamique métropolitaine et sont confrontés à une perspective de déclin difficile à enrayer


(Troyes, Chaumont, Auxerre, Nevers, Montluçon, Aurillac, Carcassonne…). La croissance métropolitaine est donc par nature créatrice d’inégalités territoriales. Plus précisément, comment


peut-on décrire le lien entre les métropoles et leur espace avoisinant ? On a longtemps craint une forme d’ « aspiration » des richesses vers les villes, au détriment des campagnes (« Paris


et le désert français »). C’est cette vision qui a longtemps conduit à promouvoir une forme d’aménagement du territoire visant à déplacer des activités des villes prospères vers des zones


défavorisées. Une telle vision apparaît aujourd’hui dépassée puisque c’est précisément la concentration des activités qui apparaît comme un atout et un facteur d’attractivité. L’État doit-il


chercher à brider le mouvement métropolitain au nom de l’égalité des territoires ? En aurait-il d’ailleurs les moyens ? Sans doute que non. La dynamique a de fortes chances de se poursuivre


dans la mesure où elle correspond à des mouvements qui s’observent à l’échelle mondiale. Les raisons de la productivité des métropoles restent discutées par les économistes : les


entreprises y bénéficient-elles de coûts inférieurs, d’une plus grande capacité à innover, des bénéfices de l’économie de la connaissance ? Pour la nouvelle géographie économique,


l’agglomération permet une meilleure division locale du travail, un meilleur appariement sur le marché du travail et une circulation informelle des connaissances favorable à l’innovation.


L’observation est, en tout cas, partagée : les effets de proximité géographique comptent dans la nouvelle économie internationalisée. Au final, c’est dans les métropoles que la croissance de


l’emploi est la plus forte. Entre 1975 et 2011, l’emploi a plus progressé dans les métropoles (+ 30,8 %) que dans le reste du territoire (+ 18 %) [29] . Mais les métropoles se


contentent-elles de capter l’activité ou bien ont-elles un effet d’entraînement sur leur voisinage ? Toutes les métropoles n’entretiennent pas les mêmes relations à leur environnement. Dans


l’ensemble, on observe un « développement associé » ou un « effet de débordement » entre les métropoles et leur voisinage. Il ne prend cependant pas toujours la même forme. On peut


distinguer trois situations. Tout d’abord, des métropoles dont la performance reste relativement isolée au sein de leur territoire. C’est le cas de Lille dont le développement n’est plus lié


aux anciennes activités industrielles qui marquent encore le reste de la région (Roubaix) même quand elles se sont renouvelées (Douai, Valenciennes). Toulouse présente aussi, dans un


contexte différent, un développement très lié à la filière aéronautique dont l’entraînement est très localisé. Montpellier, dont l’activité relève plutôt de l’économie résidentielle,


présente aussi le cas d’une ville plus dynamique que son environnement. Deuxième cas de figure : les métropoles qui partagent leur dynamique, comme Lyon et Rennes qui s’inscrivent dans une


logique de codéveloppement avec leur région. Bordeaux, Marseille et Nantes, par exemple, ont un effet dynamisant sur les territoires contigus. Enfin, dans un dernier cas de figure, on relève


des villes moins actives que leur environnement : Strasbourg et Grenoble par exemple n’apparaissent pas comme des moteurs régionaux puisque leur activité est moins favorable que celle des


régions qui les entourent. Dans une sous-catégorie de ce profil défavorable, Nice et Rouen ont une situation doublement négative, la ville connaissant une atonie partagée par le reste du


territoire [30] . Dans la mesure où l’on observe un écart entre les zones dynamiques et les zones en recul, quelle est la réponse politique à apporter ? Faut-il soutenir les territoires en


crise ou aider les habitants à s’installer ailleurs ? Faut-il aménager ou (encourager à) déménager ? La réponse n’est pas évidente pour les pouvoirs publics, qui doivent prendre en compte


les représentations des habitants eux-mêmes. On observe sans surprise une corrélation entre l’aspiration à déménager et la perception des difficultés du territoire (ou le sentiment de déclin


du soutien public) [31] . Mais le souhait de déménager n’est pas également partagé. Les habitants les plus optimistes sur leur évolution personnelle se disent prêts à bouger. En revanche,


plus on se sent en difficulté, moins on est prêt à déménager. Cela montre que le territoire, même en difficulté, est vu comme une ressource, et une ressource d’autant plus précieuse qu’on


est plus modeste. Une ressource au sens de la solidarité familiale et de l’aide informelle qui sont liées au territoire local, ainsi que les réseaux de connaissances et d’amitiés qui s’y


développent, réseaux par lesquels on a le plus de chances de retrouver un emploi [32] . En outre, une grande partie des jeunes à la recherche d’un premier emploi, des chômeurs ou des


personnes en situation de précarité anticipent leur difficulté à déménager, ce qui a toujours un coût (le déménagement lui-même, la caution, le rééquipement…). Ils anticipent également la


difficulté à trouver ou retrouver un logement dans le parc social, et déclarent plutôt attendre une aide de l’État pour pouvoir réaliser leur projet dans le territoire où ils vivent. Au


final, les gens qui ont le plus besoin de bouger ont le moins la capacité de le faire. Un facteur de plus d’aggravation des inégalités entre les territoires en développement et ceux qui


offrent moins d’opportunités. Finalement, la localisation géographique des logements va compter plus que jamais dans les vingt ans qui viennent. La dynamique en cours conduit à une


concentration de l’habitat dans l’espace métropolitain ou à sa proximité, sur les littoraux et dans le Sud. Cette géographie de l’habitat signifie des inégalités territoriales mais elle


entraîne également des difficultés dans les modes de vie, pour la santé, l’équilibre de la vie familiale et l’impact environnemental. C’est pourquoi les pouvoirs publics doivent continuer à


se préoccuper des effets du développement métropolitain et en particulier garder une vision de l’aménagement du territoire adapté aux nouveaux défis. La politique du logement est, de ce


point de vue, un facteur structurel de l’attractivité des territoires et des équilibres territoriaux. Mais jusqu’à quel point la concentration spatiale des activités et des logements


est-elle souhaitable ? 2. AVEC QUI (CO)HABITER ? Si l’on se fie à des projections prudentes concernant les deux décennies à venir, il apparaît que le nombre d’habitants à loger est une


question moins déterminante que la localisation du besoin de logement. Or, l’observation des dynamiques territoriales en cours nous conduit à un dilemme : les tendances longues du


développement économique conduisent à une concentration de l’activité dans le cœur des aires urbaines. Si elle s’accompagnait d’une concentration équivalente de l’habitat dans le cœur des


grandes aires urbaines, elle serait difficilement soutenable en raison des inconvénients de la trop forte concentration spatiale. Mais la réponse actuelle à cette tendance excessive à la


densité urbaine consiste dans la diffusion spatiale de l’habitat qui présente aussi des inconvénients majeurs. En d’autres termes, il n’existe sans doute pas de réponse uniquement


territoriale à la dynamique en cours. La concentration de l’habitat atteint ses limites, parce qu’elle entraîne trop de nuisances. Mais l’étalement urbain pose de redoutables problèmes


d’aménagement dans une perspective de développement durable. Une réponse à ce dilemme peut venir d’une meilleur utilisation des espaces en multipliant les usages des espaces ou du territoire


en fonction de temporalités variées et compatibles entre elles. La concentration urbaine peut atteindre un seuil qui risque de multiplier les coûts. Pour construire en ville, il faut tout


d’abord accéder au foncier qui sera toujours plus rare et plus coûteux. Les quelques terrains disponibles sont en outre difficiles d’accès (dents creuses) et imposent des contraintes à la


construction (accessibilité, emprise des immeubles mitoyens…). L’alternative réside dans la réhabilitation de logements dégradés ou anciens qui est parfois plus coûteuse que la construction


neuve, surtout en tenant compte de normes environnementales élevées. La rénovation urbaine se heurte en outre à des problèmes d’échelle : il vaut mieux rénover tout un quartier qu’un


bâtiment seul mais cela suppose une bonne anticipation urbaine, c’est-à-dire une continuité de la volonté politique d’aménagement local. Dans certaines métropoles (surtout à Paris), la


densité a déjà probablement atteint un plafond. Les perspectives offertes par la reconstruction des immeubles, la conversion de bureaux en logements, la surélévation de quelques étages ou


l’occupation plus systématique des sous-sols n’offrent pas une perspective adaptée : soit le nombre de logements ainsi créés reste trop faible, soit le coût de ces logements (surtout dans le


cas de la surélévation) est dissuasif [33] . Pour la plupart des ménages, cette inflation des coûts réduit l’attractivité de la ville. D’autant plus que leurs aspirations ne correspondent


pas toujours aux formes architecturales anciennes. Ainsi, à superficie égale, la luminosité des appartements arrive en tête des critères de choix immobiliers, ainsi que le désir de jouir


d’un balcon, d’une terrasse ou d’une loggia [34] . En outre, les évolutions de la vie de famille (divorce, famille recomposée, vieillissement et allongement de la durée de vie…) suscitent


une demande de logements évolutifs et modulables souvent peu compatibles avec les contraintes de la vie en immeuble. Cependant, l’alternative à la ville dense présente également de nombreux


inconvénients liés à l’étalement urbain. L’extension de la ville, surtout telle qu’elle se fait en France, avec des programmes pavillonnaires, prend beaucoup d’espace, qui est en rivalité


avec les autres usages : production agricole ou espaces paysagés artificiels ou naturels qui sont aussi des lieux de loisirs, de promenades, etc. Elle entraîne l’artificialisation des sols,


le développement onéreux des infrastructures de réseaux, de moindres économies d’échelle sur les équipements, des contraintes de mobilité (éloignement du lieu de travail et des aménités


urbaines), un risque d’isolement pour les personnes âgées qui ne peuvent plus utiliser leur voiture… Pour des raisons sociales autant qu’environnementales, l’urbanisation de nouveaux espaces


sur les rythmes actuels n’est donc pas une option appréciable. Pour surmonter cette contradiction et développer la qualité de vie à un coût abordable dans la ville dense, on peut imaginer


une réponse par un changement des usages, qui commence d’ailleurs à se développer. La perspective est ici celle de l’optimisation des surfaces habitables en ville par un partage des espaces.


La destination collective de certains espaces des immeubles a été recherchée par de nombreux projets architecturaux et parfois de petites utopies urbaines dans le passé (familistère de


Guise). Plus modestement, des programmes en cours répondent à cette attente sous la forme d’une conciergerie (ou, sous forme numérique, à travers une e-conciergerie) très développée, qui


permet de gérer des espaces partagés comme le parking, une buanderie, etc. C’est déjà le cas par exemple de projets en cours comme Smartseille d’Eiffage à Marseille ou Lil’Seine. Les


habitants des logements sociaux demandent fréquemment de disposer de salles libres, au-delà de l’association des locataires, pour d’autres usages (garde partagée des enfants, aide aux


devoirs…). Dans des projets participatifs conçus par des habitants eux-mêmes, on voit cette même logique développée de manière plus ambitieuse avec des pièces communes/partagées beaucoup


plus nombreuses : pas seulement une buanderie, mais une terrasse (avec potager collectif), une salle à manger, une salle de jeux pour les enfants, une salle de réunion (à louer pour des


usagers venant de l’extérieur) [35] . Une transformation des usages qui pourrait nous permettre de vivre mieux avec autant d’espace disponible, ou même moins d’espace. Ce type de projet


a-t-il une chance de se développer ? Il se heurte évidemment à la stabilité des manières d’habiter, qui évoluent lentement et qui dépendent de choix de vie beaucoup plus profonds que le seul


aménagement de l’espace, comme le rapport à la vie de famille, à l’intimité, à l’hygiène, etc. Sur la longue durée, la stabilité des usages est remarquable. L’invention de la chambre à


coucher, du couloir ou de la salle de bains correspondent à des évolutions lentes des mœurs, à des courants silencieux de l’histoire culturelle, touchant à des phénomènes de longue durée


comme le changement du rapport à soi, à travers l’affirmation de l’intimité ou l’adoption de nouvelles normes d’hygiène [36] . Le logement exprime le besoin anthropologique d’un espace


protecteur, familier, rassurant [37] , on ne peut pas être indéfiniment mobile ou sans « chez soi ». 2.1. L’HABITANT MULTI-SITUÉ ET POLY-ACTIF Comme nous l’avons vu, la géographie des


emplois et la géographie de l’habitat suivent des tendances inverses, qui conduisent en grande partie à _ concentrer _ les emplois dans certaines parties des aires urbaines et à _ diffuser _


l’habitat dans d’autres, souvent en direction des périphéries. Il en résulte des contraintes de transport pour les urbains, dont les mouvements pendulaires sont en progression. En 2018, les


actifs occupés passent en moyenne une heure dans les transports en allant à leur travail [38] . Les ménages doivent arbitrer entre le coût du logement et le coût du transport, qui grèvent


leur revenu disponible. Ce modèle « métro-boulot-dodo », dénoncé depuis longtemps, a probablement atteint ses limites. On peut ainsi voir émerger de nouveaux rapports entre habitat et


travail, qui cherchent à répondre aux coûts et à la dégradation de la qualité de vie (stress, fatigue…) liée à la concentration urbaine, au temps de transport et à l’inconfort des transports


aux heures de pointe. Si 11 % seulement des actifs vont à leur travail en transports en commun, ce chiffre est en forte augmentation, en particulier en Île-de-France [39] . Les projections


avancées par le ministère de la Transition écologique et solidaire aux horizons 2030 et 2050 tablent sur une progression de 29 % de la demande de déplacements à courte distance, une moindre


motorisation des ménages, une densification des agglomérations et une offre fortement accrue de transports en commun (+ 58 % entre 2012 et 2030) [40] . Pour limiter les inconvénients des


migrations pendulaires, les entreprises développent le télétravail, encouragées par les évolutions législatives récentes [41] . Des accords d’entreprise toujours plus nombreux sont signés


pour favoriser et encadrer le travail à domicile et le travail à distance. Des grands groupes signent par exemple ce type d’accord quand un déménagement de siège défait les routines et les


arrangements des salariés (Orange, SFR, Aéroports de Paris, Société Générale …). En 2013, 17 % des Français travaillent au moins une fois par semaine en dehors du bureau, le plus souvent


chez eux (dans 79 % des cas, le télétravail se fait à domicile). C’est dans la fonction publique que ce type de pratique est le moins développé, souvent en raison des contraintes liées au


service des usagers [42] . Un télétravailleur gagne 80 minutes par jour télétravaillé en Île-de-France [43] . Mais les gains collectifs sont encore plus importants : les réseaux de


transports sont moins saturés, la pollution de l’air est moindre, les entreprises peuvent économiser des surfaces de bureau et les ménages gagnent du temps personnel ou familial. La


personnalisation des agendas quotidiens se développe, comme le montre l’augmentation de la part des actifs qui fixent eux-mêmes leurs horaires (indépendants et cadres). Celle-ci est


supérieure en Île-de-France à celle des autres régions et elle augmente, passant de 13 % à 23 % entre 1994 et 2008. Ce chiffre culmine même à 31% à Paris [44] . De ce fait, comme l’observe


la sociologue Monique Eleb, le travail prend toujours plus de place dans l’occupation des logements [45] . Les salons deviennent souvent des lieux consacrés au travail ou envahis par le


travail (écrans et ordinateurs, dossiers, etc.). Les salariés consultent leurs mails à la maison, poursuivent leur travail à domicile, après leurs heures de bureau. En outre, les loisirs se


font aussi plus souvent à domicile avec l’équipement des ménages en matériels hi-fi (musique, télévision, Internet…). Dans l’ensemble, on passe ainsi toujours plus de temps chez soi et on


aménage son domicile en fonction de cette occupation beaucoup plus intense et multi-usage, qui n’a souvent pas été anticipée dans les projets architecturaux. En parallèle, dans les


entreprises, une réorganisation des espaces de travail favorise une nouvelle architecture intérieure avec des bureaux très flexibles. Dans beaucoup de nouveaux bureaux, un salarié n’a plus


d’espace attribué, il doit partager ou changer de lieu en cours de journée ( _ flex office _ ). L’objectif des entreprises est d’optimiser les surfaces pour réaliser des économies sur


l’immobilier, surtout en centre-ville. En contrepartie, des espaces de travail beaucoup plus modulables sont proposés (voir les projets architecturaux par exemple de Philippe Chiambaretta).


L’organisation du travail se traduit aussi par des horaires plus fréquemment atypiques, c’est-à-dire en dehors des horaires standard du lundi au vendredi. Ainsi, 44 % des salariés sont


soumis à des horaires atypiques le soir (entre 20 h et minuit), la nuit, le samedi ou le dimanche [46] . La désynchronisation des temps sociaux qui en résulte organise autrement l’occupation


des lieux. Les grandes séquences collectives rythmées par des déplacements entre les logements et le travail sont moins homogènes que par le passé. On voit dans ces décalages des


opportunités pour faciliter une occupation plus continue des espaces, en limitant les moments de pointe dans les transports et les lieux publics de « _ commuting _ ». En outre, on remarque


un développement du travail indépendant, ou du style de travail indépendant, qui concerne aussi désormais des salariés poussés par leur management à se multi-localiser. Des actifs nomades et


des « _ slashers _ » (actifs menant plusieurs activités) travaillent donc dans différents espaces, dans une entreprise quand ils doivent mener une mission, chez eux, ou dans des tiers-lieux


qui leur procurent la connexion et l’espace de travail minimal dont ils ont besoin. Le développement de ces tiers-lieux, dans les gares parisiennes par exemple, montre bien le nouveau


rapport qui s’installe entre mobilités, lieux de connexion et nouvelle organisation du travail. On observe ainsi le développement rapide de projets de lieux de _ coworking _ . L’idée est


d’accompagner ce nouveau mode de travail dans le développement d’un style de vie plus nomade, qui pourrait aussi trouver une extension dans le logement, sous la forme du _ coliving _ . De


manière informelle et peu organisée, la colocation rendue plus facile par les technologies numériques (de nombreux sites sont dédiés aux appariements de colocataires), s’est développée


depuis plus d’une décennie pour les étudiants (c’est le cliché « _ Auberge espagnole _ ») et touche désormais les jeunes actifs. _Coworking _ et _ coliving _ sont parfois développés par les


mêmes opérateurs, ce qui s’explique par le fait que les projets de _ coliving _ recouvrent souvent à la fois un projet personnel et professionnel. Par exemple à Paris, la station F développe


une résidence pour jeunes professionnels (Flatmates) afin d’attirer des entrepreneurs dans son incubateur, en levant l’obstacle de l’accès au logement [47] . Le _ coliving _ peut intéresser


tout type de population, même si la majorité des expériences vise de jeunes professionnels urbains qui ont un bon niveau de revenu et ne sont pas encore installés en famille (25–33 ans). Le


trait commun de ces lieux de cohabitation est qu’ils proposent des espaces de vie associant espaces privés et espaces communs, des services ajoutés plus ou moins développés et qu’ils


promettent une expérience de vie en « communauté », au moins dans un réseau interpersonnel assez dense [48] . « Si l’engouement est réel, c’est que le concept répond à des besoins évidents :


le manque d’appartements disponibles pour des colocations, la solitude dans les grandes villes, la montée du célibat, le besoin de flexibilité et, surtout, l’explosion des loyers dans les


grandes métropoles [49] . » On recense déjà environ 700 acteurs dans le monde, dont la plus grande partie se trouve encore proche du lieu de naissance de l’idée, à San Francisco (194 


projets). Le groupe le plus important, « The Collective », vient de Londres et a levé beaucoup d’argent récemment pour se développer. C’est un des rares acteurs qui atteint une taille


suffisante pour développer des projets de grande ampleur. Avec une trentaine de projets, la France n’est pas à la pointe du mouvement mais elle est tout de même dans le jeu. Voir par exemple


« The Babel Community » qui développe un projet à Marseille, rue de la République [50]  ; « Colonies » qui gère déjà trois sites (Arsenal, La Défense, Fontainebleau [51] ) ; « WeLive [52]  


» qui est une filiale de « WeWork »; « Lime » au Pays Basque [53] … Les acteurs qui viennent du _ coworking _ sont bien placés sur le nouveau marché du _ coliving _ . Par exemple, WeWork, né


en 2012 à New York, compte maintenant 400 implantations dans le monde, avec 200 000 clients (on les appelle _ coworkers _ ), et un fichier client prometteur pour une offre de _ coliving _ .


C’est aujourd’hui l’acteur le mieux valorisé de l’immobilier tertiaire. Bien que cette entreprise ait perdu 1 milliard USD en 2017, sa valorisation boursière est deux fois supérieure à


celle d’Accor (35 milliards USD). Toutes ces offres proposent des lieux bien situés, « suréquipés », avec des offres « tout compris », sans engagement, et un préavis limité au maximum. Les


tarifs sont bien sûr élevés : à Marseille, à partir de 520 euros par mois pour une chambre dans un appartement partagé. À Paris, Flatmates veut casser les prix en annonçant 400 euros par


mois. Ces projets ne se préoccupent pas de mixité sociale ou intergénérationelle, ils s’adressent à un profil très limité de jeunes professionnels urbains aisés, des « _ millenials _ » qui


risquent de vivre dans une bulle, avec tous les inconvénients de l’entre-soi (voir aussi The Collective Old Oak _ _ par exemple à Londres). Les grands groupes comme Bouygues Immobilier


commencent à s’intéresser au marché, avec le lancement de « Koumkwat ». On peut distinguer différents profils de projets cherchant à réduire les coûts du logement, répondre aux attentes des


professionnels en mobilité seul ou en groupe projet, proposer un modèle de vie en communauté, apporter une réponse rapide et flexible aux travailleurs nomades internationaux, offrir des


services. Du point de vue des lieux, on a toujours la combinaison d’un espace privatif (chambre à coucher) avec des espaces semi-privatifs (salon, cuisine, salle de bains) et des espaces


communs (salle de sport, grande cuisine…). Pas de grande originalité architecturale (mais un grand soin apporté à la décoration…). Ce sont surtout les services (avec des _ community managers


_ , entre conciergerie et animateurs) et la localisation qui sont remarquables. Dans quel cadre juridique ces projets peuvent-ils se développer ? Rien ne semble vraiment adapté dans le


droit français pour le moment. Or, tant que le risque juridique apparaît important, le marché sera limité. Comment, par exemple, gérer un locataire qui ne paie pas, ou ne respecte pas les


codes de conduite de la « communauté » ? Du point de vue juridique, ces projets ressemblent aux résidences services pour seniors, qui ont des contrats _ ad hoc _ . C’est la solution adoptée


par les acteurs pour le moment. Station F (Flatmates) a choisi un statut inspiré de celui des foyers de jeunes travailleurs. Récemment, un amendement dans la loi Elan a promu l’adaptation du


bail mobilité pour des résidences juniors (étudiants et jeunes actifs). Pour les investisseurs, le risque juridique et réputationnel paraît important tant qu’on ne sait pas comment sortir


d’un éventuel contentieux. C’est aussi un problème de liquidité : comment fait un investisseur pour se retirer d’un tel projet ? Pourra-t-il revendre ? Il y a peu d’investisseurs qui peuvent


immobiliser leur capital plus de sept ou huit ans… Ce marché se développe actuellement auprès d’un public très limité : jeunes professionnels bien rémunérés (ou envoyés en mission par leur


entreprise) ou indépendants avec de bons revenus. Cependant, il est possible que le marché soit beaucoup plus large. En effet, les modes de vie et le marché de l’emploi font que la période


de mobilité des jeunes actifs est plus longue qu’auparavant. Les jeunes ménages sont plus mobiles et peuvent être intéressés par une offre en phase avec leur besoin de mobilité. En outre,


les séparations nombreuses créent des situations intermédiaires de mobilité, avec des besoins temporaires ou pérennes de logement doublés (demandes des deux anciens partenaires). D’autres


situations de périodes transitoires (fin d’études, début d’activité, changement d’activité, reconversion professionnelle…) justifient un intérêt pour des offres de service adaptées. On peut


aussi mentionner le cas du salarié qui fait des allers-retours entre différentes villes, qui ne trouve pas de produit adapté à sa situation, à moins de payer cher pour un logement qu’il


occupe peu. Faut-il considérer ce type de projet sous l’angle du logement ou sous celui du travail ? N’est-on pas devant une offre de logement de fonction, relevant du contrat de travail ?


Au centre de l’offre se trouve le travail, et un ensemble de services associés favorisant l’implication du salarié dans ses tâches, le logement étant une offre rattachée à l’espace de


travail et non un lieu séparé, indépendant de l’employeur. On est donc dans un scénario où le travail apparaît central dans les choix de vie, notamment de localisation, et le logement,


secondaire. Dans ce cas, le point de stabilité de l’individu apparaît lié à son activité plus qu’à sa localisation. Il peut être mobile et multi-situé avec une stabilité donnée par son


travail dont l’ancrage territorial n’est pas essentiel. Le travail à distance peut, en effet, se développer avec les nouvelles technologies, et de nombreuses tâches peuvent s’effectuer


pourvu qu’on ait accès à une bonne connexion. Le logement offre avant tout une gamme de services mais n’engage pas nécessairement un choix de vie sur le long terme. Une telle offre de


logement correspond à un profil professionnel très spécifique, lié souvent aux nouvelles technologies, à une organisation du travail « par projet », à une mobilité caractéristique d’un début


de carrière. Ces emplois technologiques qui se développent ne résument cependant pas l’avenir du travail. Au contraire, les travaux sur l’ « économie résidentielle » montrent qu’une partie


de l’activité est entraînée localement par les services à la personne ou, plus généralement, les tâches présentielles (dans les métropoles, les créations d’emploi sont à plus de 90 %


assurées par les activités présentielles [54] ). En 1975, les emplois se répartissaient à égalité entre les activités productives et les activités présentielles (10 millions d’emplois pour


chacune). En 2013, l’économie présentielle s’est développée et représente 66 % de l’emploi total, tandis que les emplois productifs reculaient à 8,8 millions d’emplois. Pour ces emplois


présentiels, la localisation est bien sûr essentielle. On se trouve même dans une situation inverse à celle du _ coworker _ , dans laquelle la localisation prime et l’activité peut être


changeante et temporaire. Le point de stabilité est, dans ce cas, donné par le territoire et les opportunités qu’il procure. Le rapport au logement est donc beaucoup plus stable, au risque


même de bloquer les opportunités professionnelles quand le territoire offre peu d’activité. Le type d’emploi occupé dépend donc beaucoup de la localisation géographique. L’évolution du


travail ouvre donc des perspectives contradictoires pour le rapport à l’espace. D’un côté, un allègement de la contrainte spatiale de l’emploi : plus de mobilité, un habitat recherché pour


les services et des modes de sociabilité variés. De l’autre, le développement d’emplois, notamment de services à la personne, de soins, d’accompagnement qui sont directement liés aux besoins


locaux et par conséquent très dépendants du territoire. Quelles sont les autres évolutions complémentaires qui vont changer notre rapport à l’habitat ? 2.2. FAMILLES, VIEILLISSEMENT ET


HABITAT INTERGÉNÉRATIONNEL L’habitat évolue aussi en fonction des formes de vie familiale. La famille nucléaire qui était dominante il y a encore trente ans n’apparaît plus comme un modèle


majoritaire. Aujourd’hui, seulement 43 % des ménages sont constitués par une famille correspondant au modèle d’un couple avec enfants. Les célibataires représentent 36 % des ménages en


France et même 53 % à Paris. Les familles monoparentales (essentiellement des femmes élevant seules leurs enfants) regroupent 22 % des ménages. Mais surtout, la vie familiale évolue dans le


temps, la taille de la famille change, on vit des moments de séparation, de rupture, de solitude puis de recomposition… Les temps de la vie ont aussi évolué, la jeunesse est plus longue, le


quatrième âge s’installe. Or, les logements répondent mal à cette évolution de la vie familiale. Ils ne sont guère adaptables, et déménager est souvent compliqué et coûte cher. Les habitants


préfèrent pouvoir rester dans le même lieu, dans un habitat qui devrait idéalement s’adapter aux transformations de leur vie personnelle. Or, on conçoit toujours les logements selon un


modèle ancien, trop rigide pour les multiples transformations de la vie individuelle et familiale. L’espace est stéréotypé et ne prend pas en compte l’ensemble des transformations en cours,


dont la désynchronisation des activités au sein du groupe domestique : repas décalés, emprise du travail sur le temps privé, besoin de s’isoler mais désir de partager des moments ensemble…


Les habitants aspirent à un mode de vie qui permettrait d’être « ensemble, mais séparément [55]  ». En outre, les logements sont petits, ce qui rend plus difficile le réaménagement intérieur


 : la taille moyenne des logements en France est de 65 m 2 (7 m 2 de moins à Paris), un chiffre stable depuis vingt-cinq ans. Pourtant, il existe une longue tradition architecturale qui a


essayé de répondre au changement des modes de vie. Le familistère de Guise, par exemple, proposait déjà des logements modulables, avec des pièces qui s’ajoutaient quand la famille


s’agrandissait à la naissance des enfants ou diminuaient quand les enfants quittaient le foyer parental. L’architecture haussmanienne permettait une certaine adaptation à la vie familiale,


parce qu’elle présentait beaucoup de portes et de circulations intérieures (escaliers de service). Des immeubles associaient un bureau à un appartement familial, avec une entrée indépendante


mais une communication par l’intérieur. L’architecture haussmannienne reste prisée pour ses capacités d’adaptation, même minimale ; elle accueillait aussi, en même temps, une certaine


diversité sociale. Plusieurs expériences ont cherché à favoriser cette modularité : des cloisons déplaçables (maison Schröder de Rietveld), un système de portes adapté, des pièces aux


tailles équivalentes et dont la fonction n’est pas trop prédéterminée (projet de l’agence Boskop à Nantes [56] ). Des projets architecturaux variés proposent de donner plus d’adaptabilité


aux logements, avec différentes stratégies : le plan libéré, le plan adaptable, les murs équipés, le plan neutre, une pièce en plus, la mutualisation, la cohabitation, l’habitat participatif


[57] . Mais la rigidité continue à marquer particulièrement les logements en France, en raison notamment de la réglementation, qui complique par exemple l’usage mixte habitation/activité


professionnelle. La conception dominante du logement opposant pièces de jour/pièces de nuit a une incidence sur la construction (place des pièces humides, c’est-à-dire des gaines techniques,


etc.) et rend plus difficile l’adaptation des logements. L’adaptation au vieillissement représente un autre défi. Aujourd’hui, le parc de logements n’est pas adapté au grand âge. Or, une


part croissante de la population devra vivre chez elle avec des besoins spécifiques. En 2014, 27 % des 60 ans et plus (4,1 millions de personnes si l’on extrapole à l’ensemble de la


population de cet âge) déclarent avoir au moins une limitation fonctionnelle ; 52 %, une maladie chronique (8 millions de personnes) ; 17 %, au moins, une restriction d’activité comme des


difficultés à faire sa toilette (2,6 millions de personnes). Le désir de rester chez soi est le souhait largement dominant des personnes âgées. Pour des raisons de confort personnel autant


que de coût. C’est aussi le mouvement favorisé par les pouvoirs publics pour contenir les dépenses liées au vieillissement. Parmi les raisons qui soutiennent cette préférence, 82 % d’entre


elles considèrent qu’entrer dans une structure d’accueil signifie « perdre son autonomie de choix ». Cette perception s’explique sans doute par les caractéristiques de la vie quotidienne


dans de nombreux établissements, où les résidents sont soumis aux contraintes de la vie collective (horaires, repas, etc.) et pour qui la prise en charge par des professionnels peut


s’accompagner d’un déclin de la capacité à accomplir soi-même un certain nombre de tâches ou gestes [58] . On peut développer les services (portage de repas, télémédecine, télésurveillance…)


qui aident d’ores et déjà au maintien à domicile. Et c’est un coût moins important au niveau collectif. Mais cela suppose un état de santé, notamment de santé mentale, qui permette de


maintenir un minimum d’autonomie. Des habitats transgénérationnels peuvent aider des personnes âgées à rester chez elles si elles ont l’aide d’un gardien ou d’une gardienne d’immeuble, la


visite quotidienne du voisinage ou un étudiant par exemple à domicile dans une chambre libre (c’est ce qui existe déjà avec le « Pari solidaire », du logement intergénérationnel en cours de


développement à Paris et en région parisienne). 2.3. NOMADISME NUMÉRIQUE ET NOUVEAUX SERVICES Un habitat accueillant, modulable et évolutif mobilisera de nouvelles technologies. Il suppose


des choix techniques dès la conception des bâtiments, en ce qui concerne l’infrastructure mais aussi un usage des nouvelles technologies tourné vers des utilisations variées et souples des


lieux. L’arrivée des outils numériques dans l’espace physique va modifier notre relation aux lieux et à l’habitat, notamment à travers les objets et les bâtiments connectés. Le logement


connecté se développe à une nouvelle échelle. Il permet, grâce à des capteurs centralisant des données, d’apporter des services aux résidents et aux gestionnaires, à l’échelle du logement,


de l’immeuble, voire du quartier. On parle de la domotique ou de la GTB (Gestion technique du bâtiment) depuis les années 1980 mais l’expression désignait jusqu’à récemment des solutions


connectées cantonnées aux maisons de luxe et aux grands bâtiments tertiaires. Pendant longtemps, la domotique est apparue à une majorité de personnes comme un gadget cher et compliqué.


Depuis quelques années, on relève une adhésion beaucoup plus large. Cette évolution s’explique par la généralisation des objets connectés (plus de 50 milliards de produits connectés d’ici


2020 [59] ) et la commercialisation grand public des assistants personnels domestiques (Siri, Google Home, Echo, Alexa…). L’accès à l’Internet et l’aptitude à mettre en relation localement


des habitants entre eux mais aussi avec des services pourraient améliorer la gestion de l’énergie, l’entretien des bâtiments, la sûreté (alerte à distance, sécurisation des accès), la


qualité de vie des seniors (détecter les défaillances physiques et les accidents), la santé (télémédecine), l’accès aux informations contextuelles (transport, commerce, culture, etc.), le


partage et les échanges à l’échelle locale… Le logement connecté entre dans une phase d’évolution majeure, tant sur le plan de la technologie que des services, même si la protection, le


stockage et les modalités d’utilisation des données demeurent une préoccupation légitime. On relève aussi une appropriation de la domotique par les acteurs de l’immobilier. Les bailleurs


sociaux commencent à s’intéresser au logement connecté : d’abord dans le but de mieux gérer leur parc, de respecter la réglementation, d’accompagner les locataires dans la lutte contre la


précarité énergétique (et contre les impayés…), d’optimiser la gestion technique de la résidence, de communiquer avec les locataires et de favoriser le lien social. Les outils numériques


procurent des avantages de gestion incontestables. Les promoteurs ont d’autres motivations. Soucieux de se différencier, de proposer des logements innovants, d’améliorer leur image auprès


des collectivités et de monter en gamme, ils ont intégré la domotique dans leurs perspectives de développement, comme en témoigne l’annonce de Bouygues d’équiper de solutions connectées


(SmartHome) 70 % de ses logements (solution connectée intégrée, baptisée Flexom). Il s’agira de 100 % des logements produits par Nexity dès 2018 (avec Eugénie, une application mobile pour


logement connecté). Les services apportés par ces nouveaux outils concernent la gestion de l’éclairage et du chauffage, le suivi des consommations, la télésurveillance, l’éclairage, la


commande des volets roulants, le chauffage, les détecteurs de fumée. La e-conciergerie permet aussi de faciliter les relations avec le syndic ou avec le gardien, de diffuser les actualités


de la résidence, d’échanger des petites annonces entre voisins, voire d’ouvrir aux actualités du quartier. Et l’intelligence artificielle permet de trier beaucoup plus rapidement les


informations utiles. 2.4. L’HABITAT PARTAGÉ Ce que nous ne pouvons pas gagner directement en occupant de nouveaux espaces, nous pouvons le gagner en utilisant mieux l’espace dans le temps.


En travaillant sur des espaces partagés, on peut augmenter la taille et le nombre d’espaces de vie. On peut imaginer des usages démultipliés des habitats en repensant la répartition de


l’occupation de manière plus complémentaire qu’aujourd’hui. Cette démarche s’inscrit dans la perspective de _ l’économie de la fonctionnalité _ , qui vise à développer la facilité des usages


et non la simple possession de biens. Un bâtiment mieux utilisé, dans une logique de multifonctionnalité, s’inscrit dans cette vision de performance d’usage [60] . Cela suppose d’une part


de penser des habitats flexibles, dont on trouve déjà la trace dans de nombreuses traditions architecturales. La possibilité de moduler les espaces correspond aussi à un mode de vie plus


proche du pavillonnaire, qui est justement apprécié pour ses facultés d’adaptation : on s’approprie le garage, on aménage le grenier, on change l’affectation des pièces, on crée une chambre


pour enfant… Même les promoteurs s’y mettent, sous la forme, certes, minimale d’une pièce en plus à usage variable (annexe, bureau, chambre d’étudiant, chambre d’amis, chambre pour personne


âgée), comme dans le projet « bi-home » d’Icade, qui témoigne de la nécessité de répondre à une attente des habitants mais qui reste difficile à commercialiser malgré tout. D’autres types de


projet misent sur la modularité des espaces et leur appropriation progressive par les habitants : à Bordeaux, des projets visent à limiter les coûts d’accès au logement en proposant à de


jeunes ménages un volume architectural équipé au minimum à aménager progressivement et à finir par leurs occupants (« volumes capables [61]  »). Pour développer une architecture plus


modulable, on peut imaginer des projets à l’échelle d’un îlot, qui puissent réunir ce que le modernisme a séparé en fonctions différentes (travail, habitat, loisirs…). À l’échelle d’un îlot


d’environ 600 habitants, on peut mélanger la vie en commun de générations différentes, de styles familiaux différents (famille monoparentale, recomposée…) combinés avec des espaces de


bureaux mono-utilisateur (siège social) ou pour des travailleurs nomades ou indépendants. Des partages nouveaux peuvent se dessiner en prenant en compte la désynchronisation des temps.


Celle-ci peut représenter une richesse dans la mesure où elle rend possible des usages successifs et plus intenses des espaces et permet de mutualiser des charges (conciergerie, entretien…).


Les habitats participatifs, qui se développent en France, en Suisse (Kraftwerk) et en Allemagne (où ils représenteraient de 15 % à 20 % des logements neufs) se caractérisent par une


démarche de décision commune dans la construction et l’aménagement, mais pas forcément de partage des espaces [62] . Il existe différents modèles, l’autopromotion ou la coopérative


d’habitants. Ces différents projets s’inscrivent dans la tradition utopiste de la Cité radieuse de Le Corbusier à Marseille, qui mélangent les âges et les fonctions. Il devient concevable de


développer des espaces partagés qui se situent tout au long d’un continuum, qui va du privé (qui reste centré sur quelques pièces) au public (qui est hors du bâtiment) [63] . Dès lors, il


ne s’agit plus de réfléchir au logement en partant du nombre de mètres carrés mais en pensant à l’habiter (et aux services associés). Il s’agit de produire une forme d’habitat élastique


composé d’un noyau continuellement privé et de toute une série d’espaces partagés hiérarchisés dont la gestion des accès et la réservation sont facilitées par les outils numériques. Les


espaces partagés combinent deux types : ceux qu’on partage simultanément et ceux qu’on partage de manière successive. La mise en commun d’espaces peut permettre d’économiser 10 % des espaces


dans l’îlot. Les espaces partagés sont à louer avec des modulations de prix selon les horaires (bénéfice pour la collectivité) pour des durées variables (1 heure, 1 jour, 1 mois, 1 an…) et


des fonctions ouvertes (et en partie à inventer). L’outil de gestion est le smartphone (et tout le monde est connecté), ce qui permet à chacun de voir les taux d’occupation, de réserver, de


payer (éventuellement avec une monnaie locale)… Tout ceci suppose, comme dans le cas d’Uber ou d’Airbnb, une forme de contrôle collectif décentralisé sur les usages (propreté, respect des


horaires, respect des attributions…) et la collecte de données sur les utilisations des espaces (ce qui suppose des garanties sur le respect de la vie privée). En complément, le rôle du


gardien se revalorise, il devient une sorte de _ community manager _ . La collectivité (la copropriété ou le bailleur) peut définir des priorités dans l’affectation des usages pour arbitrer


les éventuelles rivalités d’usage (les espaces peuvent être ouverts à des personnes extérieures, pour du télétravail par exemple). Ceci permet de ne pas s’adresser uniquement aux nouveaux


habitants, mais d’offrir aussi de nouveaux services aux habitants du quartier. La mixité (sociale, générationnelle…) doit être privilégiée car elle est une condition pour accroitre le taux


d’usage des espaces partagés. Les ménages qui ont de forts revenus manquent souvent de temps, ce qui équilibre avec ceux qui ont du temps disponible (ou des temps décalés), mais moins de


revenus (comme les retraités ou les étudiants). Les actifs peuvent assumer un surcoût pour des fonctionnalités rares aux horaires qui les arrangent, tandis que ceux qui peuvent décaler leurs


usages parce qu’ils sont plus libres de leur temps jouissent des commodités communes dans les heures creuses. Des personnes à la recherche de modes de vie différents peuvent également être


intéressés par une architecture ouverte à de nouveaux usages et à de nouveaux services, qui démultiplient les superficies accessibles (grande cuisine pour recevoir, terrasse, jardin, salle


de sport…). Des familles séparées avec une garde alternée, qui ont les enfants à leur charge une semaine sur deux, peuvent aussi trouver des avantages aux espaces modulables. En outre, ce


modèle est plus écologique car il optimise l’utilisation des ressources spatiales et parce qu’il accompagne une bonne gestion des dépenses énergétiques (fournir la bonne énergie au bon


endroit au bon moment). Mais pour imaginer et développer de nouveaux programmes immobiliers, inventifs et adaptés aux défis des vingt ans qui viennent, de nombreux obstacles devraient être


levés. Un obstacle financier tout d’abord, puisqu’on est loin des produits standard conçus par les promoteurs. Les prototypes coûtent un peu plus cher à réaliser, même si ces surcoûts


peuvent être amortis par l’usage. Surtout, ils introduisent une part accrue d’incertitude. Il n y a pas encore de _ business model _ éprouvé. En supposant un bon taux d’occupation des


espaces, l’analyse montre une grande efficacité quand elle est faite à l’échelle de la durée de vie de l’immeuble, c’est-à-dire au niveau du coût global du bâtiment et sur une durée qui va


parfois au-delà de celle attendue par des investisseurs particuliers, voire des entreprises privées. Le modèle qui inclut des services ne peut pas être comparé à un modèle traditionnel. Un


obstacle juridique et réglementaire, ensuite, car les règlements et les normes actuelles ne sont souvent pas adaptés. Ils sont en effet aujourd’hui liés au schéma de l’appartement :


règlementation incendie, accessibilité, chauffage et isolation, ventilation, lumière naturelle, quantité de vitrage, etc. En outre, la définition des typologies de programmes (logement,


foyer, hébergement hôtelier, hôtel) limite la possibilité de développer des espaces comprenant une mixité des usages. Il faudrait pouvoir, sous certaines conditions, les lever pour favoriser


l’innovation et l’expérimentation. Il convient principalement de reconsidérer ce que l’on nomme logement individuel ou appartement car, dans les cas d’habitats partagés, l’habitat n’est


plus constitué uniquement d’une sphère privée permanente (un appartement), mais d’un ensemble déployé dans l’espace incluant des espaces partagés (sphères intimes temporaires). Cette


nouvelle définition du logement ou de l’habitat permettrait de concevoir des sphères intimes plus petites que ne l’autorise la réglementation, qui fixe des surfaces minimales pour un


appartement ou pour une chambre. Cela aurait également comme conséquence de produire des formes urbaines plus écologiques et plus denses que les « écoquartiers » actuels, à l’image des


centres-villes historiques, et donc plus rentables pour les métropoles, où le foncier est cher. Considérer une forme d’habitat élastique permet de « déconcentrer » des normes de confort (par


exemple, la nécessité pour tous les habitats de recevoir plusieurs heures de lumière directe par jour). Ces contraintes se résolvent différemment, chaque habitant pouvant en bénéficier


aussi grâce aux espaces partagés. De manière plus générale, cela invite à reconsidérer les manières de concevoir et de construire (épaisseur de bâti, surface de vitrage, rôle des


circulations, etc.) qui n’ont pas cessé de s’uniformiser. Enfin, de même qu’on pense à la mutualisation des espaces, on devrait aussi pouvoir introduire la mutualisation des tâches. Si le


rôle du gardien est revalorisé par la gestion de nouvelles tâches organisationnelles ( _ community manager _ , relation avec les habitants, conciergerie), des rôles plus réglementaires comme


par exemple la présence obligatoire de pompiers dans un immeuble de grande hauteur (IGH) pourraient être combinés avec des tâches annexes, au bénéfice à la fois des habitants et du


personnel dont l’activité revalorisée est plus rémunératrice. 3. NOUVEAUX BESOINS, NOUVELLES INÉGALITÉS Les tendances longues identifiées jusqu’ici concernent des changements dans les modes


de vie et les attitudes des habitants. Elles apparaissent largement indépendantes des politiques publiques, dont nous ne traitons pas ici et que nous supposons stables [64] . Nous avons


montré que l’occupation de l’espace suit une tendance à la métropolisation et à l’étalement urbain difficilement soutenables (1 re partie). Mais nous avons également identifié des


transformations de nos modes de vie qui peuvent redonner une perspective à la ville dense. Les évolutions rapides de notre rapport au travail, à la vie familiale, et l’entrée massive des


nouvelles technologies dans les logements peuvent transformer notre occupation des lieux au point de proposer de nouvelles perspectives sur les manières mêmes d’habiter (2 e partie). Dès


lors, il apparaît que nous ne sommes pas limités à un seul scénario d’évolution. Si des tendances de fond se dégagent, elles ne convergent pas vers un seul style d’habitat possible. Avant de


répertorier ces différents scénarios, il faut identifier les défis nouveaux posés à une politique progressiste du logement. Tous les scénarios d’avenir ne sont pas propices à une occupation


durable des espaces, au développement des opportunités économiques, à la participation à la vie sociale. Au contraire, le logement devient un déterminant important des inégalités. D’une


part, la densité urbaine rend l’accès au logement plus coûteux et difficile dans les centres pour nombre de ménages, surtout jeunes, même parmi les classes moyennes ; d’autre part, le


logement est une composante majeure du patrimoine des ménages. Pour les ménages qui possèdent un logement dans les zones urbaines denses, la perspective est que leur bien prendra de la


valeur. Mais, en dehors de Paris, de la région parisienne et des principales métropoles, la valeur des biens immobiliers stagne, voire baisse légèrement [65] . Certains logements qui ne sont


plus aux normes ne pourront pas faire l’objet de rénovation, au risque donc pour une partie des ménages de perdre leur capital. L’écart pourrait donc se creuser de manière importante entre


les ménages en fonction de leur localisation géographique et de leur statut d’occupation. Comment traiter ces inégalités ? Une approche uniquement spatiale ne suffira pas à répondre aux


nouvelles dynamiques, à partir d’une volonté d’équipement ou d’équilibrage territorial. Il faut aussi comprendre le changement des modes de vie, qui entraîne des usages multiples et


différenciés de l’habitat alors même que les modèles existants ne proposent que des réponses uniformes. 3.1. LE TRAITEMENT DES INÉGALITÉS Pour loger les classes modestes et moyennes dans les


métropoles, le secteur social reste un moyen privilégié. Pourtant, dans de nombreux pays européens, la construction de logement social a reculé, et le financement public a été contesté. En


France, les choix stratégiques du logement social doivent répondre à deux grandes interrogations. La première porte sur la population à qui le logement social est destiné. La seconde, sur


les évolutions du secteur, en particulier sous l’influence des règles européennes. Le logement social est un secteur important du marché du logement, mobilise des sommes publiques


importantes et contribue à loger plus de 10 millions de personnes et accueillent 500 000 nouveaux locataires chaque année. Avec 4,5 millions de logements en 2017, il représente près de la


moitié du parc locatif. Les aides publiques qui lui sont consacrées sont également importantes (17,5 milliards d’euros en 2014). Le logement social se fixe un objectif bien délimité dans les


textes : « améliorer les conditions d’habitat des personnes de ressources modestes ou défavorisées [66]  ». La mise en œuvre de cette politique, qui relève d’un long mouvement historique,


est néanmoins plus riche et plus complexe puisque le seuil d’éligibilité au logement social est particulièrement peu sélectif (près des deux tiers de la population se situent en dessous du


plafond de ressources fixé pour y accéder). De ce fait, le logement social assure une mission qui est également fixée dans les textes de « mixité sociale des villes et des quartiers ». La


faible spécialisation de la politique du logement social explique sans doute en grande partie le large consensus dont elle a longtemps fait l’objet. Elle soulève néanmoins également des


difficultés dans la mesure où l’on observe au fil des années qu’une partie importante des publics les plus modestes n’a pas accès au logement social. En effet, la moitié seulement des


ménages vivant sous le seuil de pauvreté en bénéficient. C’est pourquoi une pression croissante s’exerce sur les bailleurs sociaux pour accueillir plus largement ces populations. Mais, à


mesure que les bailleurs sociaux intègrent cette demande, ils déséquilibrent le profil de leurs locataires, parmi lesquels les ménages aux plus faibles revenus représentent désormais la


moitié des habitants (contre 21 % en 1973). SPÉCIALISATION DU PARC SOCIAL DE 1973 À 2013 (RÉPARTITION DES LOCATAIRES PAR QUARTILE DE NIVEAU DE VIE)


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