« l’europe » en notre nom : renforcer la démocratie européenne | terra nova
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2.4 MIEUX IDENTIFIER LES DÉCIDEURS DE LA ZONE EURO Compte tenu de l’intensité des débats qu’ont suscités ces décisions et l’évolution de son fonctionnement, la zone euro mérite une attention
particulière dans le cadre du débat relatif à la démocratisation de l’UE. La crise de la zone euro a conduit à renforcer le Conseil européen, reconnu comme institution à part entière par le
traité de Lisbonne. Ce « gouvernement de crise » a été justement critiqué lorsqu’il s’est mué en duopole (« Merkozy ») ou lorsque la nécessité de sauver quatre pays devenus non solvables
(Grèce, Irlande, Portugal et Chypre) a rendu inévitable l’intervention d’une « Europe FMI » dont l’existence consacrait une rupture d’égalité formelle entre les États de l’UE. La parenthèse
de la « Troika » étant refermée, il est indispensable de repartir sur de nouvelles bases politiques pour l’organisation de la zone euro. Dans ce contexte, si on laisse de côté la BCE et ses
instances, appelées à continuer à gérer la politique monétaire de la zone euro et à assumer de nouvelles fonctions en matière de supervision bancaire, le « gouvernement » de la zone euro
doit désormais être consolidé aux niveaux présidentiel et ministériel, en parallèle d’un renforcement de sa dimension parlementaire 2.4.1. ORGANISER DES SOMMETS RÉGULIERS POUR LA ZONE EURO
Comme leur nom l’indique, les « Sommets de la zone euro » constituent un lieu de pouvoir spécifiquement dédié à la zone euro et dans lequel les chefs d’État et de gouvernement de cette zone
sont appelés à trancher sur les grandes orientations à privilégier en termes de sauvetage des pays en difficulté et d’organisation de l’UEM. Le principe de tels sommets a longtemps été
écarté, notamment par les autorités allemandes, au prétexte qu’ils auraient pu constituer une tentative de mise sous tutelle ou sous pression de la BCE. C’est la crise qui a précipité leur
avènement en 2008, à la faveur de la présidence française de l’UE. Ils ont depuis lors été dotés d’un président stable (actuellement Donald Tusk) ainsi que d’un « Règlement intérieur »
détaillant leur organisation et leur fonctionnement. Ce règlement intérieur prévoit notamment que le président de la Commission est membre de droit de tels sommets, que le président de la
BCE est « invité à y participer », que le président de l’Eurogroupe peut être « invité à être présent » et que le président du Parlement européen peut être « invité à être entendu ». De par
leur composition, ces sommets ont donc vocation à se réunir régulièrement, et pas seulement en période de crise, afin d’exercer un « leadership » sur l’ensemble des enjeux clés de la zone
euro, en sollicitant l’expertise et les recommandations du Conseil, de la Commission et de la BCE. Dans cette perspective, il serait très utile que, comme l’ont proposé les autorités
françaises et allemandes, les Sommets de la zone euro puissent s’appuyer sur l’Eurogroupe, mais aussi sur le Conseil des ministres des Affaires sociales et de l’Emploi et toute autre
formation du Conseil susceptible de nourrir une vision non réduite aux seuls enjeux économiques et financiers. Proposition 31 : organiser un sommet semestriel des chefs d’Etat et de
gouvernement de la zone euro 2.4.2. DOTER L’EUROGROUPE D’UN PRESIDENT À TEMPS PLEIN Proposition 31 : organiser un sommet semestriel des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro Mis en
place dès 1997, le Conseil des ministres de l’Économie et des Finances des pays de la zone euro, ou Eurogroupe, constitue la composante ministérielle naturelle du gouvernement de la zone
euro. La crise de la zone euro a cependant mis en évidence les lacunes démocratiques d’un tel organe en termes de visibilité et de responsabilité : les conditions d’adoption du plan de
sauvetage de Chypre, dont quasiment aucun membre de l’Eurogroupe n’a semblé ouvertement revendiquer la paternité, reste de ce point de vue un contre-exemple particulièrement catastrophique.
Dans ce contexte, concrétiser rapidement la proposition de doter l’Eurogroupe d’un président à plein temps serait bienvenu en termes d’efficacité comme de légitimité. Le bien public qu’est
l’euro a de fait vocation à être pris en charge et incarné de manière continue, et non intermittente : c’est à un tel président que cette double mission doit incomber, non seulement afin
qu’il puisse assurer le suivi des décisions prises dans le cadre de l’UEM mais aussi rendre des comptes aux États membres et aux parlementaires. À terme, la fusion de ce poste de président
de l’Eurogroupe et de commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires devrait être envisagée, conformément au schéma en vigueur en matière de PESC (UEM et PESC étant
précisément deux domaines où il s’agit de combiner souverainetés nationales et approche européenne) Proposition 32 : désigner un président à plein temps pour l’euro-groupe Proposition 32 bis
: confier la présidence de l’eurogroupe au Commissaire chargé des affaires économiques et financières 2.4.3. RENFORCER LES SERVICES EUROPÉENS DÉDIÉS AU GOUVERNEMENT DE LA ZONE EURO
Proposition 32 bis : confier la présidence de l’eurogroupe au Commissaire chargé des affaires économiques et financières Le « gouvernement de la zone euro » doit enfin s’appuyer sur un
ensemble de services européens capables d’assurer plusieurs types de fonctions, en matière de sauvetage, de suivi des politiques budgétaires nationales et de coordination des politiques
économiques et sociales nationales : – il convient de continuer à s’appuyer sur la structure _ ad hoc_ gérant le « Mécanisme européen de stabilité », qui doit comme prévu être intégré au
cadre communautaire classique et dont le responsable doit faire l’objet d’auditions parlementaires fréquentes au niveau européen et national ; – à moyen terme, il conviendrait d’augmenter
substantiellement le plafond des garanties qui peuvent être accordées dans le cadre du « MESF » (mécanisme européen de stabilité financière), dont l’utilisation placera la Commission en
première ligne, sous le contrôle du Parlement européen ; – l’expertise européenne accumulée dans la mise en œuvre des récents plans de sauvetage doit enfin permettre de former une équipe
pleinement européenne à l’avenir, en lieu et place de la « Troïka » : composée du « Trio » Commission, Eurogroupe et BCE (pour la partie bancaire), cette équipe constituera l’embryon d’un
Fonds Monétaire européen et pourra ainsi agir sous le contrôle direct du « Parlement de la zone euro » _ (voir § 2.4.4.)_ , sans que la co-gestion avec le FMI ne vienne constamment obscurcir
les responsabilités exercées par les uns et les autres, comme cela a été le cas entre 2008 et 2014 . Proposition 33 : intégrer le Mécanisme européen de stabilité au cadre communautaire, y
inclus en termes de contrôle du Parlement européen 2.4.4 RENFORCER LA DIMENSION PARLEMENTAIRE DE LA ZONE EURO La crise de la zone euro aura confirmé la nécessité d’un débat approfondi entre
les représentants directs des citoyens, et qui ne peut se limiter aux « grands messes » épisodiques que constituent les Conseils européens et Sommets de la zone euro. La « gouvernance de la
zone euro » laisse en effet apparaître un déficit démocratique substantiel : déficit de contrôle parlementaire de la Commission, qui agit sur instruction du seul Euro-groupe, lui même non
soumis à un tel contrôle parlementaire ; absence de débat entre Conseil et Parlement européen pour l’adoption des orientations du « semestre européen » proposées par la Commission ;
parlements nationaux ayant l’impression d’être corsetés dans leurs décisions budgétaires par les « injonctions » de Bruxelles, qu’ont en réalité contribué à définir des gouvernements dont le
contrôle parlementaire est très variable… La crise de la zone euro a stimulé la réflexion sur la manière de mieux associer parlementaires européens mais aussi nationaux à un tel débat, au
point de générer d’importantes tensions entre ces deux catégories de représentants des citoyens. Il est donc primordial de souligner que l’enjeu central est d’organiser un accompagnement
plus démocratique de la gouvernance de l’UEM, tant au niveau national qu’au niveau européen, et qui mobilise tous les parlements. Indépendamment du nécessaire renforcement des activités de
contrôle des gouvernements nationaux par leurs propres parlements (voir § 3–2), il est ainsi essentiel d’organiser une meilleure implication des parlementaires nationaux dans la gouvernance
de l’UEM. L’article 13 du « Pacte budgétaire » européen a prévu à cette fin l’instauration d’une « conférence réunissant les représentants des commissions concernées » des parlements
nationaux et du Parlement européen afin de débattre des questions économiques et budgétaires. Cette conférence interparlementaire est active depuis 2013, et il serait bienvenu d’en augmenter
les ressources et l’audience. Par souci de cohérence et de clarté, renforcer la dimension parlementaire de la zone euro aux yeux des citoyens de l’UE doit cependant conduire à conforter le
rôle du Parlement européen, au sein duquel une « sous-commission zone euro » doit être instaurée. De telles sous-commissions existent déjà dans des domaines où l’UE n’a pas forcément plus de
pouvoirs que pour la gouvernance de la zone euro, comme les droits de l’homme ou la défense : il est donc logique qu’une sous- commission du même type puisse être établie afin d’exercer des
pouvoirs de suivi et de contrôle (l’euro est un bien public suffisamment précieux pour mériter une formation parlementaire spécifique). Outre sa contribution à l’exercice des pouvoirs
législatifs du Parlement européen, cette sous-commission zone euro pourra opérer un suivi global et permanent des orientations et décisions de l’UEM, et adopter des résolutions sur les
décisions prises par les autorités exécutives. Elle devra également procéder à des auditions régulières de responsables de la zone euro, en particulier les Président de la BCE, des Sommets
de la zone euro et de l’Eurogroupe. Elle doit également assurer un suivi de l’utilisation des fonds de sauvetage européens (MESF, MES), ainsi que le contrôle des fonds alloués dans le cadre
d’un budget de la zone euro, qu’ils soient dédiés à la mise en œuvre de réformes structurelles nationales ou à un « Fonds de stabilisation cyclique » . Cette sous commission zone euro pourra
enfin être un lieu de débat utile pour envisager la mise en place de mécanismes de mutualisation de l’émission des dettes nationales (fonds d’amortissement, euro-bills, euro-obligations,
etc.) et être impliquée si des euro-obligations étaient émises pour financer les dépenses de l’UE, en matière d’investissement dans les réseaux transeuropéens par exemple . La
sous-commission zone euro du Parlement européen a vocation à être principalement composée de députés issus des commissions « Affaires économiques et monétaires », « Emploi et affaires
sociales » et « Budget » du Parlement européen. Elle doit être ouverte à l’ensemble des parlementaires qui souhaitent la rejoindre (dans la limite de 30 membres titulaires et autant de
suppléants) et non pas réservée aux seuls parlementaires élus dans les pays de la zone euro. Alors qu’elle pourrait apparaître paradoxale, une telle ouverture doit être privilégiée pour
plusieurs raisons : raisons juridiques, dès lors qu’il faudrait modifier les traités (articles 10.2 et 14.2 du TUE) pour en exclure les parlementaires élus dans les pays hors zone euro, ce
qui renverrait cette réforme aux calendes grecques. ; raisons politiques, puisqu’il serait contreproductif de rétablir des frontières au sein du Parlement européen ; raisons philosophiques,
car l’ensemble des pays de l’UE sont concernés par l’UEM et la plupart ont vocation à rejoindre la zone euro. Il est par ailleurs très improbable qu’un grand nombre d’élus issus de pays hors
zone euro souhaitent participer aux travaux d’une telle sous-commission, et encore plus improbable qu’ils puissent y former un ensemble uni et susceptible d’en perturber les travaux. C’est
donc sur ces bases qu’une simple modification du règlement intérieur du Parlement européen à l’été 2019 permettra de porter sur les fonds baptismaux une sous-commission du Parlement euopéen
qui fera _ de facto_ office de « Parlement de la zone euro ». Proposition 34 : créer une sous-commission zone euro au sein du Parlement européen, ouverte à tous les députés européens
volontaires 3 – RENFORCER LES RELATIONS ENTRE REPRÉSENTANTS ET CITOYENS : LES ÉLECTIONS, ET APRÈS ? Renforcer l’ancrage démocratique de ceux qui nous représentent au niveau européen ne doit
pas seulement conduire à affermir leurs liens avec les électeurs que nous sommes ou à leur permettre de mieux incarner les pouvoirs de l’UE. En ces temps de défiance diffuse envers les
institutions représentatives, l’UE doit d’autant plus développer d’autres mécanismes de légitimation de ses décisions qu’elle souffre d’un déficit d’ancrage électoral structurel (voir partie
1). Il s’agit donc d’intensifier les interactions entre les citoyens de l’UE et ceux qui nous représentent dans la conduite des « Affaires européennes », notamment en assurant une
transparence maximale des travaux et des votes des institutions communautaires, en renforçant le pouvoir de contrôle des parlementaires nationaux, en développant les mécanismes de la
démocratie participative et en mettant davantage en valeur les procédures consultatives existantes. 3.1. IMPOSER UNE TRANSPARENCE MAXIMALE DES TRAVAUX ET VOTES DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES
Aux yeux de ses citoyens, l’UE est synonyme de complexité, d’éloignement et donc d’opacité. Son irréductible complexité institutionnelle résulte de la nécessité d’unir une grande diversité
d’intérêts nationaux, partisans et civiques, tout en organisant un partage des pouvoirs adapté à la sensibilité de ces intérêts, sur un mode mi fédéral, mi inter-gouvernemental. Son
inévitable éloignement politique découle notamment du caractère limité des compétences qu’elle exerce. Mais c’est justement parce que ces dimensions incontournables du système politique
européen obscurcissent la perception de l’UE par ses citoyens qu’elle doit être d’autant plus irréprochable du point de vue de la transparence de ses processus de décision et de ses votes !
A cet égard, le moins qu’on puisse dire est que, si des progrès ont été faits depuis les origines de la construction européenne, les institutions de l’UE sont encore très loin du compte – de
sorte que de substantielles améliorations et même révolutions doivent être engagées au Parlement européen, au Conseil et à la Commission, avec un mot d’ordre : « Si vous voulez nos votes,
donnez nous les vôtres ! » Ces révolutions sont vitales à l’heure des « fake news » et des théories du complot, dont la diffusion ne peut que bénéficier de la trop grande opacité dans
laquelle sont prises de nombreuses décisions de l’UE. 3.1.1 PUBLICISER PLUS LARGEMENT LES RELEVÉS DE VOTE DES PARLEMENTAIRES EUROPÉENS Le Parlement européen est assurément l’institution de
l’UE la plus transparente à ce jour. Il le doit à son statut d’assemblée parlementaire, dont les élus n’ont souvent de cesse de rechercher l’attention du grand public et de faire connaître
leurs positions. Il est donc possible de suivre l’intégralité des débats de ses sessions plénières et de ses commissions parlementaires, soit en prenant place dans le public, soit en liaison
vidéo , ce qui est salutaire d’un point de vue démocratique – sans oublier la diffusion d’éléments clés de ces débats via les réseaux sociaux ou l’accès libre aux documents leur servant de
base. Plus essentiel encore, le Parlement européen produit aussi systématiquement le résultat des votes exprimés par ses membres, y compris lorsqu’ils résultent de « votes par appel nominal
», afin que chaque Européen ait la possibilité de savoir quelle position a pris le ou les députés qui le représentent . Ces relevés de vote n’ont que deux défauts : ils sont présentés dans
une forme très administrative, via des alignements de noms de famille empilés en dessous des catégories « oui », « non », « abstention » ou « absent » ; il ne sont pas si faciles à trouver
sur le site du Parlement européen et mériteraient d’avoir leur place en page d’accueil et de faire l’objet d’une diffusion plus proactive, par mailing ciblés et via les réseaux sociaux. Le
Parlement européen a heureusement contribué financièrement aux efforts de vulgarisation déployés par l’organisation « Vote Watch Europe », qui se livre à de très utiles mises en contexte et
explication des enjeux de chaque vote, tout en indiquant précisément quel(le) député(e) a voté quoi lors des votes par appel nominal . Ces précieuses données permettent à des acteurs de la
société civile de mettre « des visages sur les clivages » structurant les choix politiques des parlementaires européens sur des enjeux clés, via des analyses et fiches d’information plus
lisibles et attractifs pour les citoyens de l’UE. Il faut donc souhaiter que le Parlement européen puisse présenter des relevés de vote encore plus accessibles pour la législature 2019–2024
(en page d’accueil de son site et dans un format simplifié) et qu’il renforce son soutien matériel et financier aux organisations de la société civile diffusant ces données politiques clés
au plus près des citoyens. Il serait même plus logique d’un point de vue démocratique qu’un site officiel dédié à l’ensemble des votes des institutions européennes soit mis en place afin
d’offrir un accès direct aux Européens qui se demandent légitimement quelles positions défendent l’un ou l’autre de leurs représentants parlementaires ou diplomatiques – ce qui supposerait
que Conseil et Commission consentent à d’énormes efforts complémentaires en termes de transparence. Proposition 35 : rendre plus accessibles les relevés de vote des députés européens via un
site offociel dédié et un format adapté au grand public 3.1.2 IMPOSER UNE TRANSPARENCE EFFECTIVE DES DÉBATS ET DES VOTES DU CONSEIL DES MINISTRES Le traité de Lisbonne a introduit une forme
de parallélisme bienvenu entre le fonctionnement du Parlement européen et celui du Conseil des ministres, lorsque ce dernier se réunit en formation législative. L’article 16.8 du traité sur
l’UE dispose en effet désormais que « le Conseil siège en public lorsqu’il délibère et vote sur un projet d’acte législatif », et ce afin de garantir une transparence comparable à celle en
vigueur au Parlement européen pour l’exercice de pouvoirs de nature similaire (en l’espèce législatifs). Il est fondamental, d’un point de vue juridique comme d’un point de vue politique,
que de telles dispositions soient pleinement appliquées, afin que les parties prenantes, médias et citoyens, puissent avoir accès à la confrontation des positions en présence et mieux
percevoir la manière dont les négociations communautaires peuvent conduire à des compromis ancrés dans la diversité des intérêts nationaux (et non « imposés par l’Europe de Bruxelles »). Les
bonnes intentions affichées par les rédacteurs du « Traité constitutionnel européen », dont les impulsions démocratiques ont été reprises par le Traité de Lisbonne, ont cependant été
confrontées à l’épreuve des faits. Il n’est pas aisé de rompre avec la culture diplomatique des membres du Conseil des Ministres, qui ont toujours préféré forger des compromis subtils
derrière des portes closes plutôt que d’étaler leurs divergences en public, mais aussi prendre des décisions par consensus plutôt que les formaliser par des votes. Plusieurs limites et
imperfections substantielles entravent donc encore l’application effective d’une transparence qui soit en phase avec les aspirations des citoyens et observateurs de la chose publique
européenne : – il est tout d’abord souhaitable que les travaux et votes du Conseil des ministres soient aisément accessibles sur la page d’accueil du site de l’institution, ce qui n’est
absolument pas le cas : la quête y conduisant est sans doute à la portée de lobbyistes professionnels ou de professeurs aguerris, mais certainement pas à celle de citoyens souhaitant en
savoir plus sur la position de leur Etat – il en va de même de la consultation de la base de données abritée par le site du Conseil ; – il est également essentiel que l’accès vidéo aux
discussions du Conseil des ministres soit offert dès la page d’accueil, mais surtout que les citoyens désireux de les suivre puissent avoir accès à la traduction simultanée des prises de
parole de l’ensemble des ministres concernés ; il y a certes des drapeaux des pays de l’UE dans la rubrique stockant les vidéos du Conseil, mais elles ne font que renvoyer à la prise de
parole du représentant de son pays : cela ne permet en rien de comprendre les positions exprimées par ses homologues des autres pays et donc les bases sur lesquels sont forgés les compromis
européens … ; – il est aussi souhaitable que l’ensemble des travaux législatifs du Conseil des ministres fassent l’objet de la même publicité : à défaut, c’est toujours lorsque les
discussions deviennent contradictoires, et donc intéressantes d’un point de vue politique et civique, que les exceptions à cette règle peuvent être invoquées ; à terme, il faut également que
les travaux et votes du Conseil soient ouverts au public lorsqu’ils ne portent pas sur des décisions législatives, tant il est vrai que des décisions financières ou internationales méritent
elles-aussi d’être adoptées dans des conditions de transparence en phase avec les attentes des citoyens de l’UE . – il serait enfin salutaire que soient rendues publiques les positions
prises par les délégations nationales dans les groupes de travail du Conseil, lors des réunions du Comité des représentants permanents ou dans les « trilogues » avec la Commission et le
Parlement européen (« bible » de la présidence synthétisant les positions nationales, position commune du Conseil, texte en discussion au trilogue…) : cette transparence apparaît d’autant
plus souhaitable que c’est très souvent en amont des réunions formelles du Conseil des ministres que sont forgées et validées les décisions des Etats-membres. Proposition 36 : organiser un
accès effectif à l’ensemble des travaux législatifs du Conseil (y inclus avec la mise en ligne de vidéos assorties de traductions simultanées) Le parallélisme des formes entre Parlement
européen et Conseil des ministres doit aussi conduire à assurer une pleine publicité aux votes exprimés au sein de ce dernier. Même si le Conseil fonctionne largement sur la base du
consensus, même si nombre de ces décisions sont prises en amont, il est essentiel que ses décisions soient formalisées via des relevés de votes indiquant clairement la position des États
membres et rendus publics sur la page d’accueil du Conseil ou, mieux encore, sur un site interinstitutionnel dédié. A défaut, c’est en effet à nouveau le site de « Vote Watch Europe » qu’il
faut aujourd’hui consulter pour obtenir une présentation graphique accessible des positions exprimées par les Etats-membres de l’UE et savoir lesquels ont approuvé les décisions prises
lorsque la majorité qualifiée est appliquée (les décisions à l’unanimité excluant la moindre opposition nationale). Le surcroît de transparence démocratique récemment appliqué au
fonctionnement du Conseil des ministres comporte cependant une autre limite de taille : il ne porte à ce stade que sur les projets de normes ou de décisions adoptés par les États membres.
Aucune publicité n’est donc donnée aux conclusions des négociations n’ayant pas débouché sur un accord, alors que le Parlement européen rend publics tous ses votes, y compris ceux ayant
conduit au rejet des projets présentés par la Commission. Cette lacune est d’autant plus fâcheuse que c’est précisément lorsque les Etats s’affrontent au Conseil sur des sujets clés que
leurs dissensions défraient la chronique médiatique, et que les citoyens qu’ils représentent ont besoin de mieux connaître les positions et arguments de l’ensemble des acteurs en présence.
Même si un passage systématique au vote formel n’est sans doute pas compatible avec la culture du Conseil, il serait salutaire que ce dernier puisse aussi rendre publiques les raisons pour
lesquelles un projet d’acte n’a pu être adopté après plusieurs réunions successives, en produisant un relevé exposant la liste des États membres ayant voté pour ou contre. Cette transparence
accrue serait de nature à mieux faire percevoir les logiques de confrontation et de compromis à l’œuvre au sein de cette institution, et qui font d’ailleurs le plus souvent écho à des
clivages qui traversent les opinions publiques nationales. Elle éviterait par ailleurs le double langage souvent pratiqué par les Ministres nationaux, prompts à renvoyer à « Bruxelles » la
responsabilité de décisions qu’ils ont contribué à adopter et à appuyer… La subtilité et l’opacité diplomatiques ne sont plus de saison alors que les controverses démocratiques s’accumulent
en Europe : il est donc grand temps que le Conseil des ministres accomplisse la révolution culturelle dont le Traité de Lisbonne a posé les bases, et qu’il privilégie des pratiques
politiques davantage en ligne avec les fonctions de deuxième chambre législative qu’il exerce au niveau européen. Proposition 37 : publier des relevés couvrant l’ensemble des votes (positifs
et négatifs) au Conseil des ministres sur un site dédié 3.1.3 BRISER L’OPACITÉ DES COMITÉS ENCADRANT LA COMMISSION La Commission européenne a proposé en 2017 plusieurs propositions de
réforme visant à renforcer la transparence, et donc la légitimité politique, des décisions normatives qu’elle prend dans le cadre des « comités » encadrant son action. Il faut saluer cette
volonté de mettre en lumière les processus décisionnels « comitologiques », techniques en apparence, mais qui touchent à des sujets particulièrement sensibles (tels que les OGM, les
pesticides, les néo-corticoïdes, les normes relatives aux moteurs etc.) et conduisent en outre à l’adoption de plus de la moitié des normes européennes (voir Tableau 3) . L’opacité qui
entoure l’action de ces comités constitue dès lors une anomalie choquante d’un point de vue démocratique : leurs activités font certes l’objet d’un rapport annuel synthétique , mais le «
registre » en forme de base de données proposé par la Commission pour accéder à leurs travaux est si complexe qu’il ne peut être utilisé que par des initiés . Nul ne peut savoir qui a
représenté son pays lors des réunions des dits comités, ni quelles positions ont exprimé les représentants des pays de l’UE au moment où ces comités ont émis leur avis. Il y a là deux
béances démocratiques qu’il faut absolument combler pour garantir une transparence minimale sur ce pan important de la machine normative communautaire. Au-delà des réformes favorisant
l’expression de majorités claires de la part des représentants des Etats-membres (voir §-2.1.3), la Commission Juncker a formulé deux propositions bienvenues visant elles aussi à placer ces
représentants devant leurs responsabilités politiques. – La 1 ère proposition prévoit de rendre publiques les positions favorables et défavorables exprimées par les Etats-membres lorsque des
comités d’appel sont réunis, après un premier vote négatif. Son adoption permettra d’imposer enfin la transparence à ces représentants étatiques, qui seront davantage conduits à assumer le
contenu et les conséquences des décisions qu’ils concourent à prendre au niveau européen. Il serait d’ailleurs souhaitable que cet impératif de transparence soit appliqué à l’ensemble des
procédures comitologiques, qu’il s’agisse de comités réunis en « 1 ere instance » ou en appel, qu’il s’agisse de « comités consultatifs » ou de « comités d’examen ». Proposition 38 : rendre
publics sous forme accessible l’ensemble des votes exprimés par les Etats-membres dans les comités encadrant les activités normatives de la Commission – La 2 ème proposition formulée par la
Commission Juncker consiste à organiser des réunions des « comités d’appel » au niveau politique, et non plus administratif : ces réunions se dérouleraient ainsi en présence des ministres
des Etats membres et sous la présidence du Commissaire concerné. Il s’agirait de prendre les décisions les plus délicates sur la base d’une négociation entre acteurs politiques beaucoup plus
clairement identifiés que les experts et/ou diplomates réunis jusqu’alors, et qui seraient bien davantage susceptibles d’en mesurer la portée et d’en assumer les conséquences. Cette
possibilité de réunion au niveau ministériel est d’ailleurs déjà mentionnée par les règlements intérieurs des comités d’appel : il convient « simplement » d’y recourir en pratique, pour
imposer l’appropriation et la visibilité que requièrent des processus normatifs particulièrement sensibles, et qui ne peuvent plus se dérouler dans l’opacité qui prévaut aujourd’hui.
Proposition 39 : réunir au niveau ministériel les comités d’appel encadrant l’activité normative de la Commission et rendre leurs votes publics Voilà deux raisons de militer pour que la
proposition de réforme de la comitologie formulée par la Commission Juncker en 2017 soit rapidement approuvée par le Conseil et le Parlement européen et qu’elle soit en vigueur pour les
normes adoptées lors de la législature 2019–2024. 3.2. ACCROÎTRE LES POUVOIRS DE CONTRÔLE DES PARLEMENTAIRES NATIONAUX C’est aussi au sein des États membres que le « déficit démocratique »
de l’UE prend sa source, dès lors que de nombreux gouvernements peuvent valider des décisions importantes au niveau européen sans que leur action ne soit soumise à un contrôle et à un débat
public approfondis. Et donc au niveau national, tout particulièrement en France et à l’occasion de la révision constitutionnelle en cours, que de vigoureux efforts de démocratisation
parlementaire doivent être engagées – en complément des avancées complémentaires à promouvoir au niveau européen. 3.2.1 CORRIGER L’ANOMALIE DÉMOCRATIQUE FRANÇAISE : UN PRÉSIDENT À LA FOIS
TOUT PUISSANT ET IRRESPONSABLE EN MATIÈRE EUROPÉENNE La France est une anomalie parmi les démocraties de l’UE : son Président de la République définit et conduit la politique européenne de
la nation sans rendre aucun compte à son Parlement. Angela Merkel doit rendre régulièrement des comptes au Bundestag, dont les décisions ont souvent été attendues avec anxiété ; le Président
français n’a quant à lui même pas la possibilité juridique de se rendre devant le Parlement, où il doit déléguer le Premier ministre ou, plus souvent encore, le ou la ministre des Affaires
européennes. Il faut changer la donne afin de mieux éclairer les choix et orientations privilégiés par le Président de la Républisue en matière européenne et de lui faire bénéficier des
contributions de députés nationaux en contact direct avec leurs électeurs. Cette exception française est contreproductive à l’heure où le Conseil européen ne se cantonne plus à la définition
d’orientations générales mais forge bel et bien des compromis opérationnels et alors que la politique européenne de la France suscite de nombreuses controverses politiques et partisanes. Il
n’y a guère que lorsqu’il s’exprime devant le Parlement… Européen que le Président de la République peut être confronté à des questions et remarques de la part d’élus français – ce qui
renforce la caractère insolite de l’indépendance absolue dont il dispose au regard de son parlement national. Réduire ce déficit démocratique français impose donc notamment de contrôler la
participation du Président de la République au Conseil européen, dès lors qu’il n’est « redevable d’aucune des positions qu’il y défend, ni des décisions qui en résultent », comme l’ont
souligné Claude Bartolone, Michel Winock et les membres de leur groupe de travail sur la réforme des institutions . C’est dans cette perspective qu’ils ont proposé d’introduire une «
exception européenne » dans la Constitution française : elle conduirait le Président de la République à dialoguer avec nos parlementaires nationaux avant et après les réunions du Conseil
européen, comme le font ses autres homologues – le Premier Ministre demeurant par ailleurs le seul responsable de tout ce qui relève de la politique nationale. Proposition 40 : permettre au
Président de la Républque de rendre compte au Parlement de son action au niveau de l’UE via une « exception constitutionnelle européenne » Seule une telle modification de notre Constitution
permettrait à la France d’être soumise au droit commun du débat démocratique en matière d’Affaires européennes et de donner à nos élus nationaux le pouvoir de contrôle qu’ils ont
légitimement titre à exercer. Si cette réforme n’était pas retenue, deux autres options plus pragmatiques devraient être privilégiées afin de renforcer l’ancrage démocratique de la politique
européenne de la France : – la 1 ère amélioration consisterait à prévoir la participation systématique du Premier Ministre aux réunions du Conseil européen, comme c’est le cas en période de
cohabitation : cela lui permettrait de préparer et de rendre compte efficacement de ces réunions auprès des parlementaires nationaux et serait cohérent avec l’autorité qu’il exerce sur le
Secrétariat général des Affaires européennes, chargé de préparer les positions françaises en vue de ces réunions ; Proposition 40bis : assurer une présence du Premier Ministre aux réunions
du Conseil européen afin qu’il puisse en rendre compte au Parlement – la 2 nde option conduirait le Président de la République à prononcer chaque année devant le Congrès un « discours sur
l’état de l’UE et la politique européenne de la France », afin de clarifier les principaux enjeux et grands axes de cette politique, y compris en répondant aux questions formulées par les
députés et sénateurs ; cette innovation pourrait être inscrite dans la Constitution ou, a minima, faire l’objet d’un engagement pratique d’autant plus utile qu’il ne ferait pas double
emploi avec les discours de politique générale et autres discours programme du Premier Ministre sur les enjeux domestiques . Proposition 41 : organiser chaque année devant le Congrès un
discours présidentiel sur l’état de l’UE et la politique européenne de la France Renforcer le contrôle parlementaire de la politique européenne de la France via l’une ou l’autre de ces
innovations permettrait à la fois d’améliorer l’information des Français et de renforcer l’ancrage politique des grandes décisions européennes prises en notre nom. Ce ne serait pas seulement
un progrès en termes de démocratie et de légitimité, mais aussi d’efficacité. Car un chef d’Etat et de gouvernement qui peut s’appuyer sur son Parlement n’est pas plus faible dans les
débats bruxellois, bien au contraire, comme le montre l’exemple allemand : il est même parfois tactiquement utile de faire état des positions de ses élus nationaux pour améliorer sa position
de négociation au niveau européen. En outre, une décision européenne ayant fait l’objet d’un débat parlementaire et public approfondi est souvent plus facilement comprise et appliquée que
lorsqu’elle donne l’impression de tomber du ciel bruxellois ou de sortir de la « cuisse de Jupiter ». A l’inverse, on soulignera enfin que si notre chef d’Etat continue à pouvoir décider
seul de l’envoi de troupes françaises en Afrique ou ailleurs, il aura d’autant plus de mal à obtenir une participation active des autres pays de l’UE, dans lesquels un débat parlementaire
préalable est nécessaire. Il n’est peut-être pas trop tard pour relever ce 1 er défi démocratique franco-européen dans le cadre de la révision constitutionnelle programmée dans notre pays,
afin que puissent être mieux conciliés prise de décision française, débat citoyen et avancées de la construction européenne. 3.2.2 PLACER LES MINISTRES SOUS CONTRÔLE PARLEMENTAIRE NATIONAL
L’implication très hétérogène des parlements nationaux dans le contrôle des orientations défendues par leurs gouvernements contribue elle aussi à nourrir le déficit démocratique au sein même
des pays de l’UE. Cette hétérogénéité traduit des choix constitutionnels et des cultures politiques eux-mêmes très variables selon les États membres (par exemple le « parlementarisme
rationnalisé » de notre 5 ème République), dont la gestion plus ou moins démocratique des « Affaires européennes » n’est qu’une conséquence collatérale. Un tel contrôle parlementaire est en
effet extrêmement précis dans des pays comme le Danemark et l’Allemagne (voir Tableau 5), mais beaucoup plus distendu dans des pays comme le Luxembourg ou la Roumanie – la France étant
clairement en dessous de la moyenne européenne . La révision constitutionnelle de 1992 a certes conduit à inscrire l’Europe dans la Constitution française, notamment en créant une «
Commission des Affaires européennes » à l’Assemblée nationale et au Sénat ; celle de 2009 a permis au Parlement national de donner son avis sur l’ensemble des projets d’actes de l’UE, et pas
seulement les actes à dimension législative qui lui étaient seuls transmis jusqu’à lors ; la révision constitutionnelle programmée en 2019 ou 2020 doit amplifier ce mouvement ce
renforcement du contrôle parlementaire des Affaires européennes dans notre pays. Ce renforcement est une affaire de légitimité : les décisions prises au niveau européen ont vocation à faire
l’objet d’un contrôle de la part des élus du peuple, qui sont davantage au contact de leurs électeurs que des ministres n’ayant pas besoin d’être élus pour exercer leur mission. Un contrôle
parlementaire accru est aussi positif en termes d’efficacité : il peut conforter la position de négociation d’un Etat au niveau européen, en lui donnant la possibilité d’arguer des
réticences ou des ambitions de son assemblée ; il facilite l’application ultérieure des décisions prises au niveau de l’UE, et singulièrement la transposition des directives par les
parlements concernés, dès lors qu’ils ne découvrent pas des textes dont ils n’ont pas eu connaissance en amont de leur adoption (comme c’est souvent la cas en France). La qualité du contrôle
parlementaire en matière d’Affaires européennes est subordonnée à la diffusion de documents d’information précisant clairement les enjeux pour le pays et les positions des autorités
nationales : le rapport annuel détaillant les « relations financières de la France avec l’UE » doit constituer une source d’inspiration pour les autorités gouvernementales, qui devraient
diffuser chaque année un document de synthèse présentant l’ensemble des enjeux qu’elles traitent au niveau communautaire. L’intensité de ce contrôle dépend aussi du recours à l’élaboration
de mandats parlementaires en amont des négociation du Conseil, mais aussi de l’usage de « réserves parlementaires » au moment de ces négociations si leur issue finale s’éloigne trop du
mandat initial (le Parlement national est alors consulté à nouveau avant que le gouvernement ne donne son accord formel à ses homologues). Ces bonnes pratiques existent dans des pays comme
le Danemark ou l’Allemagne et doivent être importées en France. Proposition 42 : transmettre chaque année au Parlement un rapport public sur les relations France-UE et la politique
européenne de la France Proposition 43 : systématiser l’usage des mandats et des réserves parlementaires pour les négociations conduites par le gouvernement français au niveau européen C’est
aussi en procédant à une modification plus « organique » qu’on pourra améliorer le contrôle parlementaire en matière européenne dans notre pays : il s’agit de conférer aux « Commissions des
Affaires européennes » de nos deux chambres un statut comparable à celles des huit autres Commissions permanentes, alors qu’elles ne sont aujourd’hui que de simples délégations. Cette
modification organique donnera à leurs membres tout le temps et les ressources nécessaires (disponibilité des parlementaires, nombre d’administrateurs en support, capacité à auditionner les
autorités politiques nationales et communautaires…) pour exercer leur mission de contrôle du gouvernement et leur rôle d’éclaireur du débat national sur l’Europe. Tout juste faut-il leur
permettre de pouvoir adhérer à cette Commission et à une autre Commission plus sectorielle, afin qu’ils puissent conserver un ancrage dans les travaux législatifs domestiques et bénéficier
de cette double appartenance pour améliorer l’articulation entre normes européennes et droit national. Ce serait là une réforme à la fois symbolique et concrète, qui éviterait un étrange
statu quo constitutionnel en matière européenne à l’heure où la France a élu un Président soucieux de renforcer le débat public sur l’UE et de consulter les citoyens sur son fonctionnement
et son avenir. Proposition 44 : créer des Commissions des Affaires européennes de plein exercice à l’Assemblée nationale et au Sénat TABLEAU 5 Le contrôle parlementaire des autorités
nationales sur les enjeux européens dans les Etats membres de l’UE ETAT MEMBRE DE L’UE CONTRÔLE DU CHEF D’ETAT ET DE GOUVERNEMENT (2) LIMITÉ FORT CONTRÔLE DU GOUVERNEMENT (1) LIMITÉ HUN
(Hongrie) LUX (Luxembourg) ROU (Roumanie) FR (France) GR (Grèce) CY (Chypre) POL (Pologne) CZE (République Tchèque) (8 États membres) BE (Belgique) FIN (Finlande) LTU (Lituanie) IRL
(Irlande) ES (Espagne) BG (Bulgarie) PT (Portugal) (7 États membres) FORT EST (Estonie) IT (Italie) LET (Lettonie) SK (Slovaquie) HR (Croatie) (5 EM) DK (Danemark) DE (Allemagne) NL
(Pays-Bas) AT (Autriche) SE (Suède) SI (Slovénie) MLT (Malte) RU (Royaume-Uni) (8 EM) SOURCE : données Wolfgang Wessels & Olivier Rozenberg, Observatory of parliaments after the Lisbon
treaty ( http://www.opal-europe.org ) JL Sauron & Virginie Lanceron (L’administration nationale et l’Europe, La documentation française 2008 – Typologie Yves Bertoncini PSIA / Collège
d’Europe Le degré de contrôle du gouvernement varie notamment en fonction du degré d’information du Parlement, du nombre de débats et qu’il organise et de la nature de son pouvoir
(consultatif ou mandat parlementaire) Le degré de contrôle du chef d’Etat et de gouvernement varie notamment en fonction de sa participation à des débats parlementaires organisés en amont et
en aval des réunions du Conseil européen 3.2.3 AMPLIFIER LES INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES NATIONAUX AU NIVEAU EUROPÉEN Les parlementaires nationaux ont développé des activités
européennes au fur et à mesure de la montée en puissance de l’UE. Ils ont initié des échanges de vues sur des défis affrontés par leurs pays, mais aussi cherché à compenser la perte de
pouvoirs qu’a suscité le transfert de compétences de l’UE : puisqu’il ne leur était plus possible d’adopter certaines normes et décisions directement (c’est à leurs gouvernements de le faire
à Bruxelles, en liaison avec le Parlement européen), il leur faut au moins pouvoir en contrôler la teneur. Il est très bienvenu que ces parlementaires, qui bénéficient d’un ancrage
électoral solide et de contacts réguliers avec leurs concitoyens, puissent faire entendre leur voix sur des enjeux européens et contribuer au débat public que les décisions de l’UE
nécessitent. C’est dans ce contexte qu’a été créée en 1989 la « Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires » (ou « COSAC »), qui a depuis lors permis aux
parlementaires nationaux suivant les affaires européennes de se retrouver régulièrement, y compris pour prendre position sur les grandes orientations et décisions de l’UE. Il est également
très positif que le « Pacte budgétaire » adopté en 2012 ait permis la mise en place d’une « Conférence interparlementaire » réunissant parlementaires nationaux et européens, appelés à
dialoguer sur les politiques économiques, sociales et budgétaires conduites dans la zone euro (voir § 2.5). Il convient de multiplier ces occasions d’échanges entre parlementaires nationaux,
spécialisés ou non dans les « Affaires européennes », afin de renforcer l’appropriation et la publicité des débats sur l’UE entre nos élus – la récente création d’une « Assemblée
franco-allemande » va dans le même sens. C’est cependant parce que les parlementaires nationaux se verront attribuer des pouvoirs effectifs qu’ils s’impliqueront pleinement dans leurs
missions européennes et que le grand public pourra davantage s’intéresser à leurs travaux. Il est à cet égard très utile de leur avoir confié des prérogatives pour le contrôle de
l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, qui doivent leur permettre de vérifier que l’UE n’outrepasse pas les compétences qui lui sont conférées, sujet politique ô
combien sensible du point de vue des opinions publiques. Dans les domaines de « compétences partagées » entre l’UE et ses Etats-membres, les parlements nationaux peuvent ainsi adresser
leurs interrogations ou objections à la Commission européenne, qui leur répond de manière directe et publique . Les parlements nationaux peuvent également exercer ces pouvoirs de contrôle de
manière collective, via des « avis motivés » ayant un impact proportionnel au nombre d’assemblées mobilisées LES AVIS MOTIVÉS DES PARLEMENTS NATIONAUX EN MATIÈRE DE CONTRÔLE DE LA
SUBSIDIARITÉ Chaque parlement national de l’UE a deux voix, qui sont partagées entre les deux chambres dans le cas de système bicaméral. – Si les « avis motivés » exprimés par les parlements
nationaux de l’UE rassemblent un tiers des voix qui leur sont attribuées, la Commission peut décider de maintenir, de modifier ou de retirer sa proposition en motivant sa décision (c’est la
procédure dite du « carton jaune »). Ce seuil est moins élevé (un quart des voix) lorsqu’il s’agit de projets d’actes législatifs dans le domaine de la justice, de la liberté et de la
sécurité. – Lorsque les avis motivés représentent la majorité des voix et que le projet est présenté dans le cadre de la procédure de co-décision , la Commission peut décider de maintenir,
de modifier ou de retirer sa proposition – dans le 1er cas, elle doit se justifier devant le Parlement européen et le Conseil (c’est la procédure dite du « carton orange ») : si une majorité
simple des membres du Parlement européen ou 55 % des membres du Conseil estiment alors que la proposition enfreint le principe de subsidiarité, l’examen de la proposition législative n’est
pas poursuivi. Ces mécanismes parlementaires collectifs de contrôle de l’exercice des compétences de l’UE complètent utilement les possibles recours en annulation que les Etats-membres
peuvent intenter auprès de la Cour de justice s’ils estiment que l’UE a outrepassé ses pouvoirs. Ils permettent en effet une intervention en amont de représentants élus des citoyens, qui
méritent à ce titre d’avoir d’avantage d’impact. Depuis 2012, ils ont été utilisés au moment où la Commission lançait des initiatives législatives en matière de « droit à mener des actions
collectives » (y compris le droit de grève), pour la création d’un « Parquet européen » ou pour la révision de la directive sur le « détachement des travailleurs ». Ils ont conduit la
Commission à retirer son initiative législative dans le premier cas et à la maintenir dans les deux autres. Ce premier bilan d’étape doit conduire à encourager l’intervention des parlements
nationaux en matière de contrôle de la subsidiarité, dès lors qu’il est apparu qu’ils utilisent ces mécanismes de manière raisonnable et sélective . C’est dans cette perspective qu’il serait
salutaire de mettre en place deux autres procédures pour organiser l’intervention de ces parlements nationaux au niveau communautaire : – la procédure dite du « carton rouge » aurait pour
effet de bloquer les initiatives législatives de la Commission dès lors que 2/3 des voix des parlements nationaux auraient été réunis à leur encontre. Cet outil parlementaire conférerait un
pouvoir à la fois politique et symbolique aux élus nationaux des Etats-membres de l’UE – sans grand risque de mettre en péril les capacités d’initiative de la Commission. Il adresserait un
signal de réassurance bienvenu aux opinions publiques, qui pourraient ainsi constater que l’UE agit en réalité dans le respect des compétences qui lui sont conférées par les Traités
européens, à de rares exceptions près, qu’un contrôle démocratique direct pourrait au besoin debusquer. – la procédure dite du « carton vert » permettrait quant à elle aux parlements
nationaux de proposer des actions à mener par l’UE ou visant à amender la législation communautaire en vigueur. Cette forme de droit d’initiative serait plus positive et pro-active et
éviterait de limiter les parlements nationaux à un rôle de surveillant voire d’opposant en matière européenne . Il pourrait être ouvert à un avis des parlements nationaux réunissant la
moitié des voix qui leur sont attribués dans le cadre des mécanismes de contrôle de la subsidiarité. Proposition 45 : créer un mécanisme permettant aux parlements nationaux de l’UE de
bloquer une initiative législative européenne ne respectant pas le principe de subsidiarité (« carton rouge ») Proposition 46 : Accorder aux Parlements nationaux le droit de demander à la
Commission européenne de formuler une initiative législative (« carton vert ») 3.3. MULTIPLIER LES PROCÉDURES CONSULTATIVES ET PARTICIPATIVES AU NIVEAU EUROPÉEN Commission et Parlement
européen ont compris de longue date que disposer d’une légitimité représentative ne constituait pas un « chèque en blanc » pour la législature : elles ont tôt recouru aux mécanismes de la
démocratie consultative et participative. La Commission est composée d’un national par Etat-membre et investie par la majorité des membres du Parlement européen ; les membres du Parlement
européen sont élus directement par les citoyens de l’UE et représentent une large gamme des courants d’opinion qui s’expriment dans les urnes ; pour autant, ces deux institutions s’efforcent
de densifier leurs relations avec les citoyens et les « parties prenantes », ne serait-ce que pour compenser leur déficit de proximité avec eux (voir Partie 1). C’est aussi en développant
le recours à ces mécanismes consultatifs et participatifs européens qu’il sera possible de renforcer l’ancrage démocratique de l’UE au cours des prochaines années. 3.3.1. AMPLIFIER
L’AUDIENCE DES CONSULTATIONS LANCÉES PAR LA COMMISSION La Commission a pour mandat d’incarner « l’intérêt général européen » : en dépit de sa double légitimité représentative, c’est là un
défi pour le moins vertigineux dans une Union de centaines de millions de citoyens issus de 28 Etats-membres unis « dans la diversité »… Plutôt que de s’en remettre à une forme de « science
infuse » ou à une version éthérée de la volonté générale rousseauiste, le Collège bruxellois a préféré dès ses origines nourrir ses réflexions et propositions au contact direct des groupes
d’intérêt et citoyens de l’UE. Il recourt en particulier à des procédures de consultation quasi-systématiques avant de formuler ses projets normatifs d’importance, en invitant l’ensemble des
personnes et organisations intéressées à lui faire part de leurs remarques, dont il dresse une synthèse rendue publique et en utilisant les résultats pour conduire une étude d’impact de la
future proposition. Le Conseil, la Commission et le Parlement européen ont conclu dès 2003 un accord interinstitutionnel appelé « Mieux légiférer », prévoyant la multiplication des
consultations publiques pour nourrir la conception des politiques de l’UE. Cette pratique consultative utile et bienvenue est encore insuffisamment connue : elle mérite une beaucoup plus
ample publicité de la part des autorités européennes, nationales et locales, afin qu’un nombre maximal d’Européens puissent s’en saisir . La Commission s’efforce aussi de structurer le débat
préalable au lancement de ses initiatives en soumettant régulièrement à la consultation des « Livres Verts » et des « Livres Blancs ». Les Livres verts ont pour but de stimuler une
réflexion sur un sujet particulier et d’inviter les parties concernées (organismes et individus) à émettre leurs avis et propositions. Les « Livres blancs », qui font parfois suite aux «
Livres verts », formulent des propositions d’action de l’UE dans un domaine donné et en s’efforçant de tracer les contours d’une forme de consensus politique européen. Il est d’usage que les
acteurs économiques et sociaux, les autorités publiques (nationales ou locales) et même des personnes physiques envoient leurs contributions écrites au moment où ces Livres verts et blancs
sous soumis à consultation – de telles contributions étant mises en ligne par la Commission, sauf objection de leurs auteurs. Là encore, la principale voie d’amélioration à privilégier sur
ce registre dans un futur proche passe par l’amplification des moyens mis en œuvre pour renforcer la publicité et donc l’accès à ces procédures consultatives européennes au plus grand
nombre, y compris via la création de sites nationaux dédiés. Proposition 47 : renforcer l’audience des consultations publiques lancées par la Commission européenne via des sites dédiés au
niveau national 3.3.2 POURSUIVRE LA MONTÉE EN PUISSANCE DU DROIT DE PÉTITION Le Traité de Maastricht a permis aux citoyens de l’UE d’exercer un « droit de pétition » sous forme de plainte ou
de requête adressée au Parlement européen et portant sur des affaires d’intérêt public ou privé. Ce droit de pétition peut être exercé de manière individuelle ou collective par ces citoyens
et il est également accessible aux entreprises, associations, ou organisations ayant leur siège dans l’UE. L’objet de la pétition doit naturellement porter sur des questions relevant des
compétences de l’UE et concernant directement les intéressé(e)s : il porte notamment sur les droits des citoyens, la lutte contre les discriminations, la protection des consommateurs, la
santé publique, la libre circulation des personnes, des marchandises et des services, les questions environnementales, le bien-être des animaux, ou encore la reconnaissance des
qualifications professionnelles … Plus de 1000 pétitions citoyennes parviennent en moyenne au Parlement européen chaque année, ce qui témoigne de l’intérêt suscité par cette procédure
participative. Sur cette base, sa « Commission des pétitions » peut notamment inviter la Commission à procéder à une enquête préliminaire, à lui fournir des informations concernant le
respect de la législation communautaire, effectuer elle-même une visite d’information, une mission d’enquête parlementaire ou une audition des initiateurs des pétitions, interpeller les
autorités européennes, nationales ou locales concernées… De nombreuses pétitions ont abouti à une action législative ou politique, à des procédures d’infraction lancées par la Commission ou
à des décisions préjudicielles de la Cour de Justice. La création d’un « Réseau des pétitions » en 2016 a permis de renforcer le dialogue avec les autorités et les parlements nationaux et la
coopération avec la Commission européenne et le Médiateur européen et donc la probabilité que les questions soulevées par les citoyens dans leurs pétitions soient traitées et résolues. La
création bienvenue, bien que récente, d’un « portail des pétitions » par le Parlement européen en 2014 et une promotion publique accrue de ce portail contribueront sans doute à inciter plus
d’Européens à lancer de telles pétitions ou à les soutenir au cours des prochaines années, ce qui favorisera aussi le développement de la démocratie participative au niveau de l’UE .
Proposition 48 : renforcer l’audience du « portail des pétitions » crée auprès du Parlement européenne via des campagnes d’information et de communication 3.3.3 FACILITER LE RECOURS À
L’INITIATIVE CITOYENNE EUROPÉENNE L’exercice du monopole de l’initiative législative confié à la Commission est fortement encadré au niveau européen : le collège bruxellois doit en effet
s’inspirer des conclusions du Conseil européen et des orientations du Parlement européen pour la formulation de son programme de travail annuel. Ce monopole de l’initiative législative
traduit la nécessité, dans une construction multinationale, de confier la rédaction du contenu des propositions législatives européennes (directives, règlements et décisions) à l’institution
dont la mission est de promouvoir l’intérêt général européen. Au fil du temps, les processus préparatoires ont gagné en sophistication (voir §-3.3.1.), avec la consultation de l’ensemble
des parties prenantes concernées : cela permet à la Commission d’identifier les contours d’un consensus final en bénéficiant d’une légitimité politique et d’une expertise technique propres à
garantir la qualité de ses propositions, de lancer les négociations sur de bons rails et de veiller à ce qu’elles ne s’écartent pas de leurs objectifs initiaux . Mettre en cause ce monopole
de l’initiative législative, en le confiant par exemple au Parlement européen, pourrait fragiliser la position de la Commission dans un « triangle institutionnel », au sein duquel son rôle
d’intercesseur a d’ores et déjà été relativisé au regard de la forte hausse du nombre d’accords en première lecture entre le Conseil et les parlementaires européens. Dans l’immédiat, mieux
vaut donc élargir et faciliter l’usage du droit d’initiative confié aux citoyens de l’UE depuis le Traité de Lisbonne, c’est-à-dire la possibilité donnée à un million de citoyens de l’UE
originaires d’au moins sept Etats-membres de demander à la Commission de proposer une initiative législative. Ce droit d’initiative citoyenne offre en effet un potentiel d’évolution plus
prometteur tout en donnant lui aussi corps à la notion de démocratie participative au niveau européen. Au printemps 2019, quatre des initiatives éligibles lancées depuis 2011 ont en effet
réussi à franchir le seuil d’un million de signatures (elles ont respectivement porté sur l’accès à l’eau, le statut de l’embryon, la vivisection et l’interdiction du glyphosate) ; vingt-six
n’y sont pas parvenues ; une quinzaine d’autres ont été retirées ; plus d’une dizaine d’autres sont en cours . Ces dizaines d’initiatives citoyennes ont contribué à générer un authentique
débat pan-européen, auquel la Commission a été ou est en position de donner suite ou non – ce qu’elle doit à chaque fois justifier publiquement. Le premier bilan chiffré disponible indique
cependant que de nombreuses mobilisations citoyennes ont été confrontées à des difficultés à la fois techniques, juridiques et politiques qui ont entravé leur développement. Il fait
apparaître la nécessité de simplifier les conditions d’exercice de ce droit d’initiative citoyenne, notamment s’agissant : – des conditions de recueil des signatures (avec la mise à
disposition d’un système de collecte en ligne) ; – du délai de 12 mois imposé pour cette collecte, qui apparaît trop court pour des acteurs associatifs dépourvus de moyens d’action
suffisants au niveau pan-européen (un délai de 24 mois serait par exemple préférable) ; – du renforcement des moyens financiers et techniques mis à disposition des promoteurs d’initiatives
citoyennes afin qu’ils assurent une communication plus efficace auprès des citoyens potentiellement intéressés . Il appartient aux autorités européennes et nationales de procéder à ces
améliorations, qui contribueront elles aussi au renforcement de la démocratie participative au niveau de l’UE . Proposition 49 : porter à 24 mois le délai de collecte des signatures
nécessaires au lancement d’une initiative citoyenne européenne 3.3.4 MIEUX MÉDIATISER ET MIEUX CIBLER LES SONDAGES D’OPINION EUROPÉENS La Commission a commancé dès les années 1970 à
commander des enquêtes d’opinion lui permettant de recueillir l’avis des citoyens de la « Communauté économique européenne », puis de l’UE, selon des techniques et un champ d’application qui
se sont sans cesse sophistiqués depuis lors. Si elle a été rejointe plus récemment par le Parlement européen , les « Eurobaromètres » demeurent une source d’information de référence , qui
permettent de sonder des « échantillons représentatifs » des peuples de l’UE, et donc d’évaluer au mieux leurs perceptions et leurs attentes LES PRINCIPALES ENQUÊTES D’OPINION COMMANDÉES PAR
LA COMMISSION EUROPÉENNE – « L’Eurobaromètre standard » est constitué d’environ 1000 interviews en face-à-face par pays et donne lieu à des rapports publiés deux fois par an : ces rapports
incluent par exemple des questions récurrentes sur le sentiment d’appartenance des peuples de l’UE, sur leur degré de confiance ou d’approbation vis-à-vis de ses institutions ou de ses
politiques, sur leur vision de l’avenir de leur pays et de l’Europe…; – Les « Eurobaromètre spéciaux » sont basés sur des études thématiques approfondies intégrées dans les vagues de
sondages Eurobaromètre Standard et réalisées pour les services de la Commission ou d’autres institutions de l’UE : les thèmes sont choisis au gré de l’actualité politique et des initiatives
sur lesquelles travaille l’UE ; – Les « Eurobaromètres Flash » sont des entretiens téléphoniques portant sur un thème donné et permettant à la Commission d’obtenir des résultats plus
rapidement, en se concentrant si besoin sur des groupes cibles spécifiques (exemple des agriculteurs) ; – Les « études qualitatives » étudient les motivations, les sentiments, les réactions
de groupes sociaux choisis à l’égard d’un sujet européen donné, en écoutant et analysant leur façon de s’exprimer dans des groupes de discussion ou lors d’entretiens non-directifs. Il est
d’usage que l’ensemble des résultats des « Eurobaromètres » soit mis à la disposition du grand public et des analystes et observateurs les plus avisés, en parallèle de leur transmission aux
décideurs publics européens et nationaux. Ces derniers ont donc en leur possession des données leur permettant de mieux cerner les attentes et aspirations des opinions publiques, dont ils
tiennent beaucoup plus compte qu’on ne le dit : à cet égard, ces « sondages représentatifs » constituent bel et bien l’un des plus courts chemins vers les citoyens dans une UE de plusieurs
centaines de millions d’habitants, fut-ce sur le registre de la « démocratie d’opinion ». Encore faudrait-il cependant que les peuples de l’UE et ses principaux relais d’opinion soient
conscients de l’existence de ces sondages et des données qu’ils font apparaître : cela leur permettrait en effet de « se représenter » la coexistence de points de vue différents, tout aussi
légitimes, et qui ne font qu’illustrer « l’unité dans la diversité » que professe l’UE. Deux actions complémentaires favoriseraient cette salutaire prise de conscience : – d’une part le
renforcement des moyens financiers, humains et techniques dédiés à la diffusion des résultats des « Eurobaromètres », afin qu’ils puissent être connus du public le plus large, partout dans
l’UE ; – d’autre part et surtout la création d’« Euro-thermomètres », qui porteront non sur de grandes thématiques mais sur l’adoption programmée de règlements, directives ou décisions
précises, au sujet desquels la position des citoyens européens serait recueillie et rendue publique (comme c’est le cas en France vis-à-vis d’un nombre incalculable de réformes ou de
propositions gouvernementales…). Proposition 50 : créer des « eurothermomètres » permettant de sonder les opinions publiques en amont des grandes décisions prises par les institutions
européennes C’est aussi à cette double condition que les citoyens de l’UE pourront mieux évaluer la manière dont leur voix est prise en compte par ceux qui les représentent au niveau
européen entre deux échéances électorales. 3.3.5 ORGANISER DAVANTAGE DE PANELS CITOYENS DÉLIBÉRATIFS AU NIVEAU DE L’UE Des mécanismes de démocratie participative sont utilisés de manière
croissante au niveau de l’UE afin de consolider les liens entre représentants et représentés, sur une base beaucoup plus qualitative et interactive que celle offerte par les enquêtes
d’opinion : il s’agit d’inviter des « panels » de citoyens à débattre d’enjeux européens et de formuler des avis et propositions ayant un impact sur les politiques, le fonctionnement et
l’avenir de l’UE. Plusieurs conditions doivent être réunies pour garantir la qualité de ces initiatives délibératives : il faut notamment réunir un échantillon représentatif de la population
de l’UE, mettre à disposition des citoyens concernés tous les éléments d’information et d’expertise sur les sujets évoqués, leur permettre de délibérer entre eux de manière contradictoire
et sur un agenda qu’ils contribuent à définir, enfin recueillir leur opinion à l’occasion d’un vote collectif. L’Institut Jacques Delors s’est efforcé de remplir ces conditions et de jouer
un rôle pionnier sur ce registre, en organisant deux expériences de « sondages délibératifs », « Tomorrow’s Europe » et « Horizon UE » , avec l’appui matériel de la Commission et du
Parlement européen. Ces projets ont permis à un échantillon représentatif de citoyens non initiés, venus de toute l’UE, de confronter leurs points de vue dans l’hémicycle du Parlement
européen, puis de prendre position sur des enjeux européens clés. A défaut de pouvoir mobiliser plusieurs centaines de citoyens, les institutions européennes peuvent aussi recourir à
l’organisation de rencontres d’une dizaine de personnes invitées à discuter pendant quelques heures sur une question européenne particulière sous la conduite d’un animateur spécialisé. La
proposition d’Emmanuel Macron de réunir un « panel citoyen » quelques mois après les élections européennes de mai 2019 s’inscrit dans le même esprit visant à mieux articuler démocratie
représentative et démocratie participative au niveau de l’UE. Même si leur représentativité n’est pas garantie, d’autres initiatives participatives ont utilement contribué à une telle
articulation civique au cours des derniers mois, en combinant rencontres directes et questionnaires électroniques. Ainsi des « consultations citoyennes sur l’Europe » organisées à
l’initiative de la France au printemps 2018 : elles ont en effet mobilisés en France plusieurs dizaines de milliers de citoyens lors d’un millier de réunions publiques, et de manière plus
limitée dans les autres pays de l’UE. Ces consultations se sont également nourries d’un questionnaire en ligne élaboré par un panel représentatif de citoyens de l’UE, qui a lui aussi peiné à
trouver son public. Les synthèses qui en ont résulté ont été transmises au Conseil européen et ont permis de dresser un état des lieux utile, sinon révolutionnaire, des attentes des
citoyens de l’UE . La consultation populaire pan-européenne « We Europeans » , co-organisée par Civico Europa et Make.org, a plus récemment permis de recueillir l’avis de plus d’un million
de participants issus de toute l’UE et de faire apparaître leurs principales priorités pour la construction européenne. Le développement de ces consultations directes, physiques ou en ligne,
doit naturellement être encouragé, quand bien même elles font apparaître des résultats plus illustratifs que parfaitement représentatifs – dès lors que les participants impliqués n’ont
quasiment jamais le même profil sociologique que la population globale. Il va de soi qu’il convient également de garantir une synthèse rigoureuse des opinions émises et un suivi méticuleux
des suites données aux recommandations formulées par les citoyens ainsi réunis – qu’elles soient positives ou négatives, et plus encore dans le 2 ème cas. Proposition 51 : réunir
systématiquement des panels citoyens en amont des grandes décisions prises par les institutions européennes 3.4. VALORISER LA CONSULTATION D’AUTRES REPRÉSENTANTS NATIONAUX AU NIVEAU EUROPÉEN
Mieux légitimer les décisions de l’UE doit enfin conduire à valoriser davantage les interactions établies entre des représentants des citoyens traditionnellement consultés par les
institutions européennes, sans que leurs interventions soient suffisamment bien perçues à ce stade par les Européens. 3.4.1 MIEUX IDENTIFIER NOS REPRÉSENTANTS AU « COMITÉ DES RÉGIONS » Le «
Comité des Régions » a été institué par le traité de Maastricht pour rapprocher l’UE de ses citoyens en organisant la participation des autorités régionales et locales au processus
législatif européen . Il est aujourd’hui composé de 350 membres répartis entre les pays de l’UE en fonction de leur population (voir Tableau 6) et nommés pour cinq ans par le Conseil sur
proposition des Etats membres. Les traités de Maastricht et d’Amsterdam ont identifié les domaines dans lesquels la Commission, le Conseil et le Parlement européen doivent obligatoirement
consulter le Comité des Régions lorsqu’ils légifèrent (santé, éducation et culture, cohésion économique et sociale, réseaux d’infrastructures transeuropéens, environnement, emploi, politique
sociale, formation professionnelle et transports). En dehors de ces domaines, la Commission, le Conseil et le Parlement européen peuvent aussi consulter le Comité des régions sur des
propositions qui ont un impact important sur le plan local et régional. Le Comité peut enfin émettre des avis de sa propre initiative, mais également saisir la Cour de Justice s’il estime
que les principes de subsidiarité ou de proportionnalité ont été violés dans les domaines pour lesquels sa consultation est obligatoire. Par leur présence et leur action, les 24 membres
français du comité des régions et leurs homologues contribuent à densifier les liens entre l’UE et ses citoyens, en exerçant une mission bénévole mais salutaire . Il est donc d’autant plus
dommageable que leur rôle et leur activité soient si faiblement perçus par le grand public, y compris lorsqu’ils organisent des consultations auprès des organisations et citoyens concernés
par leurs travaux . Ce déficit de notoriété appelle bien sûr un renforcement des actions d’information et de communication déployées par le Comité des régions et ses membres. Peut-être
doit-il aussi inciter à conforter la lisibilité et la légitimité du Comité des régions en y nommant précisément des représentants des… régions, comme le font nombre d’Etats-membres de l’UE.
Il se trouve que la France a choisi d’y nommer seulement 12 représentants des conseils régionaux, ainsi que 6 représentants des départements et 6 des communes – tous étant désignés par le
Premier ministre sur proposition des associations d’autorités locales. Nommer exclusivement des représentants des « régions à dimension européenne » créées en France en 2016 serait plus
logique et contribuerait sans doute à favoriser une meilleure appréhension de leurs missions par les citoyens dont ils ont vocation à promouvoir les intérêts et préoccupations au niveau
européen. Proposition 52 : réserver la présence française au Comité des régions à des représentants des conseils régionaux TABLEAU 6 Répartition des délégations nationales au Comité des
régions et au Comité économique et social européen en 2018 DÉLÉGATION NATIONALE DÉLÉGUÉS Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni 24 Espagne, Pologne 21 Roumanie 15 Autriche, Belgique,
Bulgarie, Grèce, Hongrie, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Suède 12 Croatie, Danemark, Finlande, Irlande, Lituanie, Slovaquie 9 Lettonie, Slovénie 7 Estonie 6 Chypre, Luxembourg,
Malte 5 TOTAL 350 SOURCE : Données CDR et CESE (2018) – Yves Bertoncini PSIA / Collège d’Europe 3.4.2 DIVERSIFIER NOS REPRÉSENTANTS AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN Les membres du
Comité économique et social européen (CESE) sont consultés depuis 1957 par les institutions européennes sur la plupart des projets de l’UE en matière législative et politique afin d’indiquer
s’ils leur semblent adaptés à la situation économique et sociale de leur pays et s’ils servent les intérêts de leurs mandants. Les 350 membres du CESE sont répartis à part égale entre trois
groupes: celui des employeurs (organisations patronales type MEDEF), le groupe des travailleurs (syndicats type CFDT, CGT, etc.) et le groupe des « activités diverses » (organisations
d’agriculteurs, de professions libérales, de consommateurs, etc.). Les membres du CESE sont désignés par les gouvernements nationaux et nommés par le Conseil pour un mandat de 5 ans
renouvelable ; le nombre de membres par État est proportionnel à la population de chaque pays, ce qui conduit la France a désigner 24 membres . Là encore, l’activité de ces représentants
contribue utilement à mieux associer les acteurs économiques et sociaux et les organisations de la société civile à la formulation des décisions prises par l’UE en notre nom. Pour la
conforter, la récente réforme du Comité économique et social français pourrait utilement inspirer des ajustements visant à rendre plus représentative la composition de son homologue
européen. Il serait par exemple bienvenu de créer un 4 ème groupe dédié aux acteurs de la société civile et aux représentants des organisations non gouvernementales et non syndicales : ils
sont en effet porteurs d’une vision spécifique des enjeux économiques et sociaux et bénéficient en outre d’un ancrage citoyen substantiel, qui contribuerait à renforcer celui des activités
du CESE au sens large. De la même manière qu’il serait bienvenu de créer un groupe dévolu aux acteurs s’efforçant de relever les défis environnementaux, climatiques et énergétiques, qui font
aujourd’hui partie des priorités des Européens et de l’UE, alors qu’ils n’étaient qu’à peine évoqués au moment de la création du CESE. Sans doute cette réforme de la composition du CESE
pourra-t-elle contribuer à convaincre davantage de citoyens de l’UE de l’intérêt de prêter attention à ses travaux et à leur valeur ajoutée des avis qu’il formule auprès de la Commission, du
Conseil et du Parlement européen. Proposition 53 : élargir la composition du Comité économique et social européen en créant un groupe « Société civile » 3.4.3 LÉGITIMER L’ACTION DES
REPRÉSENTANTS D’INTÉRÊT AU NIVEAU EUROPÉEN La forte présence des représentants de groupes d’intérêts au niveau communautaire . tient à la fois à la dimension fortement économique, sociale et
budgétaire de la construction européenne et à la politique d’ouverture de la Commission et du Parlement européen (voir § 3.3.1.). S’ils ne représentent pas les citoyens au sens strict, mais
des intérêts matériels et/ou philosophiques, ces acteurs ont la possibilité d’intervenir dans le processus décisionnel de l’UE de manière à la fois informelle et formelle, aussi bien pour
contribuer à la mise sur agenda de tel ou tel enjeu que pour orienter le contenu des décisions des institutions européennes. Ces interventions ont vocation à renforcer la légitimité des
décisions de l’UE aussi bien en amont (en se manifestant au stade des consultations) qu’en aval (la qualité et l’application des décisions doivent s’en trouver améliorées). Elles jouissent
cependant d’une très mauvaise image dans notre pays, où le terme de « lobbying » est connoté de manière péjorative, et de surcroît associé à l’image de l’UE – alors même qu’il est
naturellement tout aussi répandu à Paris qu’à Bruxelles et Strasbourg. Dans ce contexte plutôt adverse, valoriser l’intervention des représentants des groupes d’intérêt doit à la fois
inciter à rappeler l’utilité de leurs interventions et à organiser une stricte régulation de leurs activités.. Il s’agit en particulier d’assurer une représentation équilibrée et pluraliste
des groupes d’intérêt et d’éviter les pressions excessives ou l’accès privilégié de certains d’entre eux aux informations et aux décideurs politiques ; mais aussi de garantir que ces
interventions s’effectuent de manière transparente . Ces conditions sont souvent réunies lorsque les représentants des groupes d’intérêt sont sollicités de manière formelle par les
institutions communautaires à divers stades du processus décisionnel européen. Ainsi de la désignation de centaines de spécialistes au sein des innombrables « groupes d’experts » ou «
comités consultatifs » constitués par la Commission ; ainsi aussi des relations privilégiées établies avec des forums ou groupes de contact auxquels participent la plupart des groupes
d’intérêts actifs dans tel ou tel secteur, par exemple l’aide au développement (la confédération « Concord » ), le commerce ou les questions sociales (la « plateforme sociale » ). Au-delà de
leur présence au sein du Comité économique et social européen, patronats et syndicats ont même le privilège d’être consultés par la Commission dans le cadre des « Comités du dialogue social
», mais aussi celui de pouvoir s’emparer d’un thème de négociation en vue de déboucher sur la conclusion d’accords interprofessionnels ou sectoriels : ces accords doivent ensuite être mis
en œuvre soit par voie de directives adoptées par les institutions européennes, soit par voie d’accords autonomes repris au niveau national ou régional par des conventions collectives. C’est
lorsque les représentants de groupes d’intérêt se livrent à des interventions informelles auprès des décideurs de l’UE, en leur transmettant leurs prises de position via des courriers
postaux ou électroniques, des conversations téléphoniques ou des contacts personnels, que la nécessité de respecter des obligations de pluralisme et de transparence est d’autant plus forte.
Les modalités de ces interventions ont constitué l’un des principaux enjeux du « Livre blanc sur la gouvernance » publié en 2001 par la Commission, puis de l’« initiative européenne en
matière de transparence » qu’elle a lancée en 2005. Cette initiative a conduit à l’adoption de mesures visant essentiellement à organiser l’identification des représentants de groupes
d’intérêt et à mieux encadrer leurs relations avec les décideurs communautaires, parmi lesquelles : – la création de registres visant à inventorier les représentants d’intérêts entrant au
contact avec les institutions européennes, aussi bien auprès du Parlement européen que de la Commission , qui ont même établi un registre conjoint : il s’agit de répertorier les
organisations qui cherchent à influencer le processus législatif et la mise en œuvre des politiques des institutions européennes tout en mettant en évidence les intérêts défendus, par qui et
avec quelles ressources ; – l’adoption de « codes de conduite » destinés aux représentants d’intérêt, aussi bien au Parlement européen qu’à la Commission : ils incluent la nécessité
d’indiquer clairement les intérêts représentés, de fournir des informations complètes et non trompeuses et l’obligation de ne pas inciter le personnel de l’UE à enfreindre les règles et
normes de comportement qui lui sont applicables ; – enfin la déclaration de l’existence de contacts et réunions avec les représentants de groupes d’intérêts, qui ne peuvent théoriquement
être reçus que s’ils sont inscrits sur les registres de transparence. La floraison de ces « registres », « codes » et autres « déclarations » traduit la salutaire volonté de transparence
affichée par les institutions communautaires et contribue sans nul doute à mieux éclairer l’activité des groupes d’intérêts aux yeux du grand public. Il reste à garantir qu’elle s’applique
pleinement à l’ensemble des groupes d’intérêt actifs au niveau de l’UE, y compris auprès du Conseil et des gouvernements nationaux, tout en permettant une identification effective des
intérêts défendus par tel ou tel représentant et acteur. Tant qu’elles demeureront, les lacunes ponctuellement constatées contribueront au maintien d’une forme d’opacité qui stimule en
retour la réalisation d’études plus ou moins étayées sur l’activité des représentants des groupes d’intérêts actifs au niveau communautaire, mais aussi d’inévitables dénonciations de
l’influence occulte réelle ou supposée qu’ils exercent . Proposition 54 : rendre obligatoire l’inscription de l’ensemble des groupes d’intérêt aux registres de transparence établis auprès de
la Commission, du Parlement européen mais aussi du Conseil CONCLUSION MODIFIER LES PRATIQUES POLITIQUES, EN FRANCE ET EN EUROPE, PUIS RÉVISER LA CONSTITUTION ET LES TRAITÉS Les analyses et
recommandations formulées dans ce rapport traduisent toutes la double volonté de consolider la démocratie représentative au niveau de l’UE et de renforcer le sentiment que ses institutions
prennent bien leurs décisions en notre nom, au nom des Européens « unis dans la diversité ». Elles dessinent des perspectives d’évolution et de réforme complémentaires visant respectivement
à affermir les liens entre les électeurs et leurs représentants européens, à mieux incarner le pouvoir européen et ceux qui décident au sein de l’UE et à développer les interactions entre
représentants et citoyens entre deux élections. Toutes les propositions de réformes présentées ici contribueraient à des degrés divers à améliorer l’ancrage démocratique de l’UE, aussi bien
au niveau communautaire qu’au niveau national, et à court comme à moyen termes . Ces recommandations sont formulées alors que la France sort d’un « grand débat » national ayant mis en
lumière une demande populaire de démocratisation qui ne saurait s’arrêter aux frontières du pays. Il s’agit donc bel et bien d’y prendre des décisions améliorant l’ancrage démocratique de
nos institutions pour tout ce qui relève de la gestion des « Affaires européennes », y compris dans le cadre de la révision constitutionnelle programmée. Ces recommandations sont également
mises en débat en amont d’élections européennes décisives pour l’avenir de l’UE et son fonctionnement, et au moment où les chefs d’Etat et de gouvernement se réunissent à Sibiu afin de
dégager des propositions ambitieuses sur ces deux registres. Dans cette perspective, il va de soi qu’il convient de distinguer entre les propositions pouvant être mises en œuvre de manière
rapide, via la modification des pratiques politiques des autorités nationales et des institutions européennes, de celles qui nécessiteraient une révision des traités européens et de la
Constitution française, par nature plus complexe et plus longue (voir Tableau 7). C’est aussi parce que le renforcement de la démocratie représentative européenne aura été engagé au niveau
national, puis de manière pragmatique au niveau communautaire, que cette modification ultérieure des traités européens apparaîtra comme une suite logique et désirable, plutôt que comme une
perspective mythique oscillant entre « totem et tabou ». L’essentiel est de se persuader que la poursuite du mouvement de démocratisation de l’UE est indispensable pour favoriser
l’implication de ses citoyens dans la formation des décisions cruciales qu’elle est appelée à prendre, dans un contexte politique et géopolitique qui appelle plus que jamais à faire vivre et
prospérer la coexistence entre les peuples de notre continent. ANNEXE RENFORCER L’ANCRAGE DÉMOCRATIQUE DE NOS REPRÉSENTANTS EUROPÉENS : PRINCIPALES PROPOSITIONS AUX NIVEAUX FRANÇAIS ET
COMMUNAUTAIRE Renforcer l’ancrage démocratique de nos représentants au niveau européen suppose la mise en œuvre des propositions complémentaires formulées ci-avant, qui présentent les
caractéristiques suivantes d’un point de vue politique et juridique : – les trois quarts des propositions de ce Rapport ont vocation à être appliquées au niveau communautaire, ce qui
implique de convaincre de leur bien-fondé un nombre significatif d’Etats-membres et de forces politiques européennes (voir colonne 1) ; – un quart des propositions formulées dans ce Rapport
concernent la gestion des Affaires européennes en France et requiert donc des réformes qui dépendent de la seule volonté des autorités et forces politiques nationales (voir colonne 2) ; –
Près de 90% des propositions de ce Rapport supposent la modification de règles de nature législative ou la transformation des pratiques politiques, aussi bien au niveau communautaire qu’au
niveau national : elles peuvent donc être mises en œuvre au cours des prochains mois, notamment à la faveur de l’entrée en fonction des nouveaux titulaires des principales institutions
européennes à l’été-automne 2019 ; – Environ 10% des propositions de ce Rapport requièrent la révision des traités européens ou de la Constitution française _ (elles sont signalées en
italique ci-dessous)_ : ces propositions peuvent donc s’inscrire dans un horizon de court terme pour notre pays (puisqu’une révision constitutionnelle y est programmée) et davantage sur le
moyen terme au niveau communautaire. 1 – AFFERMIR LES LIENS ENTRE LES ÉLECTEURS ET LEURS REPRÉSENTANTS EUROPÉENS PROPOSITIONS AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE AU NIVEAU FRANÇAIS AMÉLIORER LE MODE
D’ÉLECTION DES PARLEMENTAIRES EUROPÉENS Proposition 4 : créer des listes transnationales réunissant 27 candidats issus d’une moitié des Etats-membres Proposition 5 : promouvoir la présence
de 10% de non-nationaux sur les listes de candidats aux élections européennes, par voie juridique ou des incitations financières Proposition 1 : instituer en France des euro-circonscriptions
électorales formées sur la base des régions créées en 2015 Proposition 1bis : rattacher les députés européens élus en France à des circonscriptions administratives calquées sur les régions
créées en 2015 Proposition 2 : mettre en place un vote préférentiel pour les élections européennes en France Proposition 3 : maintenir une interdiction stricte du cumul du mandat de député
européen avec la présidence d’un exécutif local CONSOLIDER LE SYSTÈME DES « SPITZENKANDIDATEN » POUR ÉLIRE LE PRÉSIDENT DE LA COMMISSION Proposition 6 : confier au « Spitzenkandidat » arrivé
en tête le droit de concourir pour la présidence de la Commission européenne Proposition 7 : organiser des primaires « ouvertes » pour la désignation des candidat(e)s à la présidence de la
Commission européenne Proposition 8 : diffuser massivement des versions traduites des programmes et manifestes des partis politiques européens Proposition 9 : insérer les logos des partis
politiques européens sur les bulletins de vote aux élections européennes CONFORTER LA LÉGITIMITÉ REPRÉSENTATIVE HYBRIDE DES MEMBRES DE LA COMMISSION EUROPÉENNE _ Proposition 10 : choisir les
membres de la Commission parmi les candidats aux élections européennes (article 17 TUE) _ Proposition 11 : maintenir le principe d’un national par Etat-membre au sein de la Commission
européenne Proposition 12 : promouvoir un (re)découpage des portefeuilles de Commissaires conformes aux priorités politiques de l’UE _ Proposition 13 : donner au Président de la Commission
la capacité juridique de nommer les membres de son équipe (Article 17 TUE)_ Proposition 14 : promouvoir l’adoption d’un « contrat de mandature » entre Parlement européen, Commission
européenne et Conseil européen 2 – DONNER DES VISAGES AUX EUROPÉENS QUI DÉCIDENT EN NOTRE NOM PROPOSITIONS AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE FAVORISER L’EXPRESSION DE MAJORITÉS EUROPÉENNES MIEUX
IDENTIFIABLES Proposition 15 : fixer entre 3% et 5% le seuil d’éligibilité au Parlement européen dans tous les pays de l’UE Proposition 16 : accorder une « prime majoritaire » au parti
arrivé en tête aux élections européennes (10% des sièges) Proposition 17 : accorder une prime majoritaire aux groupes politiques principaux pour l’attribution des responsabilités au sein du
Parlement européen (bonus de 10%) Proposition 18 : étendre le vote à la majorité des suffrages exprimés au Parlement européen Proposition 19 : utiliser le vote à la majorité qualifiée comme
aiguillon politique plutôt que comme outil d’un passage en force Proposition 20 : étendre le champ des votes à la majorité qualifiée au Conseil en matière fiscale et en matière de politique
étrangère Proposition 21 : ne plus décompter les abstentions dans les votes à la majorité exprimés par les Etats-membres au sein des comités présidés par la Commission TENDRE VERS UN
BICAMÉRISME ÉGALITAIRE ENTRE PARLEMENT EUROPÉEN ET CONSEIL DES MINISTRES Proposition 22 : généraliser le vote en codécision sur tous les enjeux aujourd’hui soumis à une simple consultation
ou approbation du Parlement européen Proposition 23 : donner au Parlement européen un pouvoir de codécision pour l’adoption du cadre financier pluriannuel de l’UE Proposition 24 : ramener le
cadre financier pluriannuel de l’UE à 5 ans afin de le synchroniser avec les élections européennes Proposition 25 : donner au Parlement européen un pouvoir de codécision sur le lancement de
négociations commerciales internationales Proposition 26 : accorder un pouvoir de codécision au Parlement européen pour la définition des orientations principales de la politique étrangère
INCARNER LE POUVOIR EUROPÉEN VIA DES PRÉSIDENCES STABLES Proposition 27 : élire le Président du Parlement européen pour toute la durée de la législature (5 ans) plutôt qu’une moitié _
Proposition 28 : élire le Président du Conseil européen pour un mandat de 5 ans non renouvelable (article 15 TUE)_ Proposition 29 : confier le poste de Président du Conseil européen au
Président de la Commission européenne _ Proposition 30 : désigner des présidents stables pour toutes les formations sectorielles du Conseil des ministres, en s’inspirant des pratiques en
vigueur pour le Conseil relations extérieures ou le Conseil européen (article 16 TUE & article 236 TFUE)_ MIEUX IDENTIFIER LES DÉCIDEURS DE LA ZONE EURO Proposition 31 : organiser un
sommet semestriel des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro Proposition 32 : désigner un président à plein temps pour l’euro-groupe Proposition 32 bis : confier la présidence de
l’eurogroupe au Commissaire chargé des affaires économiques et financières _ Proposition 33 : intégrer le Mécanisme européen de stabilité au cadre communautaire, y inclus en termes de
contrôle du Parlement européen (article 136 TFUE)_ Proposition 34 : créer une sous-commission zone euro au sein du Parlement européen, ouverte à tous les députés européens volontaires 3 –
RENFORCER LES RELATIONS ENTRE REPRÉSENTANTS ET CITOYENS : LES ÉLECTIONS, ET APRÈS ? PROPOSITIONS AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE AU NIVEAU FRANÇAIS POUR UNE TRANSPARENCE MAXIMALE DES TRAVAUX ET
VOTES DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES Proposition 35 : rendre plus accessibles les relevés de vote des députés européens (via un site dédié et un format adapté au grand public) Proposition 36 :
organiser un accès effectif à l’ensemble des travaux législatifs du Conseil (y inclus avec la mise en ligne de vidéos assorties de traductions simultanées) Proposition 37 : publier des
relevés couvrant l’ensemble des votes (positifs et négatifs) au Conseil des ministres sur un site dédié Proposition 38 : rendre publics sous forme accessible l’ensemble des votes exprimés
par les Etats-membres dans les comités encadrant les activités normatives de la Commission Proposition 39 : réunir au niveau ministériel les comités d’appel encadrant l’activité normative de
la Commission et rendre leurs votes publics ACCROÎTRE LES POUVOIRS DE CONTRÔLE DES PARLEMENTAIRES NATIONAUX _ Proposition 45 : créer un mécanisme permettant aux parlements nationaux de l’UE
de bloquer une initiative législative européenne ne respectant pas le principe de subsidiarité ou « carton rouge » (protocoles n°1 et 2 aux traités européens)_ _ Proposition 46 : accorder
aux Parlements nationaux le droit de demander à la Commission européenne de formuler une initiative législative ou « carton vert » (protocoles n°1 et 2 aux traités européens)_ _ Proposition
40 : permettre au Président de la République de rendre compte au Parlement de son action au niveau de l’UE via une « exception constitutionnelle européenne » (article 18 de la Constitution)_
Proposition 40bis : assurer une présence du Premier Ministre aux réunions du Conseil européen afin qu’il puisse en rendre compte au Parlement Proposition 41 : organiser chaque année devant
le Congrès un discours présidentiel sur l’état de l’UE et la politique européenne de la France Proposition 42 : transmettre chaque année au Parlement un rapport public sur les relations
France-UE et la politique européenne de la France Proposition 43 : systématiser l’usage des mandats et des réserves parlementaires pour les négociations conduites par le gouvernement
français au niveau européen _ Proposition 44 : créer des commissions des Affaires européennes de plein exercice à l’Assemblée nationale et au Sénat (article 43 de la Constitution)_
MULTIPLIER LES PROCÉDURES CONSULTATIVES ET PARTICIPATIVES SUR LES SUJETS EUROPÉENS Proposition 48 : renforcer l’audience du « portail des pétitions » crée auprès du Parlement européen via
des campagnes d’information et de communication Proposition 49 : porter à 24 mois le délai de collecte des signatures nécessaires au lancement d’une initiative citoyenne européenne
Proposition 50 : créer des « euro-thermomètres » permettant de sonder les opinions publiques en amont des grandes décisions prises par les institutions européennes Proposition 51 : réunir
systématiquement des panels citoyens en amont des grandes décisions prises par les institutions européennes Proposition 47 : renforcer l’audience des consultations publiques lancées par la
Commission européenne via des sites dédiés au niveau national Proposition 48 : renforcer l’audience du « portail des pétitions » crée auprès du Parlement européen via des campagnes
d’information et de communication Proposition 51 : réunir systématiquement des panels citoyens en amont des grandes décisions prises par les institutions européennes VALORISER LA
CONSULTATION D’AUTRES REPRÉSENTANTS NATIONAUX AU NIVEAU EUROPÉEN _ Proposition 53 : élargir la composition du Comité économique et social européen en créant des groupes « Société civile » et
« Energie-environnement » (article 300 TFUE)_ Proposition 54 : rendre obligatoire l’inscription de l’ensemble des groupes d’intérêt aux registres de transparence établis auprès de la
Commission, du Parlement européen et du Conseil Proposition 52 : réserver la présence française au Comité des régions à des représentants des conseils régionaux SOURCE : L’UE en notre nom –
Renforcer l’ancrage démocratique de nos représentants européens, Terranova, Yves Bertoncini (dir.) Mai 20
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