Pour une société « sans état » et sans violence : gandhi reste d’actualité
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Est-ce encore possible d’envisager un conflit politique sans violence physique ? Les cas des gilets jaunes en France, mais aussi des affrontements actuels au Venezuela ou au Proche-Orient
laissent en douter. Pourtant, la non-violence et la désobéissance civile, deux messages clefs de Mohandas Karamchand Gandhi – surnommé le Mahatma Gandhi – restent bel et bien d’actualité à
en croire l’historien Ramachandra Guha. Ce dernier avait relancé le débat sur l’héritage du Mahatma à l’automne dernier, lors de la parution de son ouvrage, _Gandhi : The Years that Changed
the World, 1914-48_ (Penguin, non traduit). Quel était le message de Gandhi ? Sa politique ? Que peut-on apprendre de lui aujourd’hui ? Sa pensée est-elle toujours pertinente ? « UN BON
SAMARITAIN SANS NUANCES » Guha présente certes de façon claire et détaillée la manière dont le Mahatma a ouvert une nouvelle voie fondée sur ses principes, en s’émancipant des factions
politiques rivales de son époque. Son travail est d’ailleurs salué par l’historien spécialiste de l’Empire britannique, Bernard Porter qui voit dans le legs de Gandhi une forme de politique
« plus douce, plus tolérante et plus consensuelle ». Une pensée qui, à l’ère de Donald Trump, du Brexit et de Jair Bolsonaro, au Brésil, semble sur le déclin. Pourtant, d’autres sont moins
élogieux. Un autre spécialiste de Gandhi, Faisal Devji, reproche à Guha d’avoir atténué le radicalisme du Mahatma. De son côté, l’écrivain Pankaj Mishra a réexaminé ses écrits à « l’ère de
la post-vérité » et du « révisionnisme forcené » et découvert une « pensée profondément contre-intuitive », inexploitée par Guha, dont le livre fait de Gandhi « un bon samaritain sans
nuances ». RÉSURRECTION Toutes ces analyses ont néanmoins une ambition commune : ressusciter Gandhi en faisant de lui un modèle pour les politiciens d’aujourd’hui. La politique moderne – et
sa formule à base de tweets et de hashtags, de slogans populistes et de dictateurs en puissance – ne semble guère propice à un regain d’intérêt pour les enseignements du Mahatma. La même
chose s’est pourtant produite pendant la guerre froide, quand le monde politique traversait une crise très similaire. On imagine souvent Gandhi en train de filer au rouet en critiquant la
science et la modernité. Un jour qu’un journaliste lui demandait ce qu’il pensait de la civilisation occidentale, il a répondu que « ce serait une bonne idée ». Pourtant, son discours
politique était bien plus complexe que cela. Il avait lu les travaux de politologues occidentaux comme John Ruskin ou Léon Tolstoï. L’Inde était en train de se faire broyer par une économie
mondialisée, fondée sur l’exploitation des ouvriers et l’automatisation du travail. Le capitalisme industriel et son allié, l’impérialisme, créaient des dynamiques de pouvoir inégalitaires
et des dissensions au sein de la population indienne. Gandhi était convaincu qu’il fallait au contraire développer une vie sociale et économique centrée sur la production locale, en fonction
des besoins, ce qui générerait aussi une plus grande richesse culturelle. LA FIN DE L’INDE-VILLAGE Mais, à l’ère de la post-vérité, peut-on encore s’inspirer de ce message si simple et
authentique ? L’histoire de l’Inde au début des années 1950 permet de se faire une idée de sa pérennité. Lorsque le pays a obtenu son indépendance, en août 1947, avec Jawaharlal Nehru pour
premier ministre, Gandhi est resté un guide spirituel et moral, à défaut d’un chef politique. Mais sa vision d’une « Inde-village » est morte avec lui en 1948, sous les balles de son
assassin. Avec la montée en puissance de la rivalité idéologique entre communisme et capitalisme pendant la guerre froide, une croissance économique rapide et centralisée est apparue
inévitable. LA PENSÉE GANDHIENNE SOUTENUE PAR LA CIA Malgré tout, dans ce contexte nouveau et hostile, certains théoriciens ont recommencé à s’intéresser aux idées du Mahatma. En 1950, la
CIA a secrètement financé la formation du Congrès international pour la liberté de la culture (CCF), qui rassemblait des intellectuels libéraux et de gauche du monde entier pour débattre de
la menace que représentait le collectivisme soviétique pour la liberté d’expression culturelle. En soutenant financièrement les conférences et les publications de ces intellectuels, la CIA
espérait que leur anti-autoritarisme serait un avantage pour le bloc de l’Ouest. Mais cette stratégie n’a pas fonctionné. Les branches du CCF ont souvent servi de tribune à des aspirations
radicales qui ne pouvaient s’exprimer nulle part ailleurs. Le Comité indien pour la liberté de la culture (ICCF), fondé en 1951, en est un exemple frappant. _Freedom First_, sa première
revue, laissait de côté la critique culturelle au profit de discussions sur la politique intérieure. À la demande instante du CCF, un nouveau journal, _Quest_, a vu le jour pour corriger
cette tendance, mais en vain : l’un des auteurs publiés a saisi cette occasion pour fustiger la « classe dirigeante » indienne occidentalisée dont l’intérêt pour un développement supervisé
par l’État allait fatalement créer « une situation ubuesque »– en d’autres termes, imposer au pays une idéologie occidentale. PROGRÈS POUR TOUS Tous ces écrivains – souvent d’anciens
combattants indépendantistes qui avaient connu la prison – voulaient un nouveau système politique égalitaire qu’ils qualifiaient parfois de « démocratie directe ». Leurs idées sur la façon
de le mettre en œuvre divergeaient et, au cours de la décennie, certains se sont mis à défendre un programme pro-capitaliste, bien que favorable à un État-providence. D’autres on vu en
Gandhi une source d’optimisme. En 1951, Vinoba Bhave et d’autres réformateurs acquis au concept de « sarvodaya » (« progrès pour tous ») développé par le Mahatma, ont fondé le Mouvement
Bhoodan, qui encourageait les propriétaires terriens à redistribuer leurs terres sans violence et à réduire ainsi rapidement les inégalités dans l’Inde rurale. Cette initiative fascinait
l’ICCF. Le syndicaliste et chroniqueur marathe Prabhakar Padhye plaçait le Bhoodan au nombre des mouvements réformateurs capables de constituer « une nouvelle force sociale dans la vie du
pays ». La conférence annuelle de l’ICCF a chaleureusement accueilli le mouvement, et les intervenants ont plaidé pour une politique gandhienne qui ferait « de la coopération, et non de la
compétition, la règle de vie de chacun ». VERS UNE SOCIÉTÉ SANS ÉTAT Un auteur éminent de l’ICCF, Minoo Masani, a relaté son périple dans l’État indien du Bihar en compagnie d’un autre
membre du comité, Jayaprakash Narayan. En s’adressant à des foules de paysans et de ruraux pauvres, Narayan associait totalitarisme et État-providence, y voyant deux systèmes intrinsèquement
coercitifs. Les deux hommes défendaient le ghandisme, une politique plus spontanée et participative qui, « comme l’anarchisme ou le communisme, a pour objectif ultime une société sans État
». Ces intellectuels utilisaient donc la pensée de Gandhi pour protester contre un climat politique oppressif mondialisé, et sa classification constante des différentes idées et visions du
monde en catégories binaires : bonnes ou mauvaises, communistes ou anticommunistes, modernistes ou traditionnelles. Avec sa rhétorique vide et ses slogans racoleurs, la guerre froide
présentait à ses débuts beaucoup de points communs avec notre époque. Durant cette période, tout comme aujourd’hui, les idées de Gandhi ont été redécouvertes. Au vu de la pénurie actuelle de
courants politiques alternatifs, il n’est sans doute guère étonnant que nous nous tournions de nouveau vers le Mahatma. ------------------------- _Traduit de l’anglais par Iris Le Guinio
pour Fast ForWord._
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