Retailleau : largement élu à la tête de lr, le ministre de l'intérieur se positionne pour 2027

Bruno Retailleau a été élu ce dimanche à la tête des Républicains à l’issue du duel qui l’opposait au chef de groupe des députés de la Droite républicaine, Laurent Wauquiez. Ce dernier, qui

a axé sa campagne contre la « _dilution de la droite dans la macronie_ » a fait du scrutin une consultation pour ou contre la participation du parti au gouvernement Bayrou, et a essuyé une

défaite claire, avec 25,69 % des suffrages exprimés contre 74,31 % pour le ministre de l’Intérieur. Quasiment inconnu du grand public avant sa nomination place Beauvau en septembre dernier,

Retailleau a donc imposé sa ligne, celle d’une droite dure mais responsable, garante de la stabilité du régime, et entrée au gouvernement pour, selon lui, « _barrer la route à la gauche

insoumise_ ». ISLAMOPHOBIE, DISSOLUTION : LA « MÉTHODE » RETAILLEAU PLÉBISCITÉ PAR LES ADHÉRENTS LR En adoubant le locataire de la place Beauvau, les adhérents LR ont clairement plébiscité

la ligne raciste et islamophobe radicalisée du ministre, que partage son concurrent, mais aussi la méthode. Alors que le parti est englué dans une profonde crise depuis notamment l’échec de

Fillon, la base adhérente de LR a souhaité exprimé un satisfécit quant au retour de LR aux affaires gouvernementales, et à la stratégie qui consiste à obtenir des « petites victoires »,

qu’il s’agisse des dissolutions en cours de la Jeune Garde et d’Urgence Palestine, de sa campagne d’expulsions contre des influenceurs algériens, ou encore de son offensive virulente contre

le voile. Lors d’un meeting organisé le 26 mars par une association pro-israélienne, il avait fait de la « lutte contre l’islamisme », en réalité, de l’acharnement contre les musulmans, une

priorité, et avait martelé « _à bas le voile_ ». Une déclaration appuyée le 1er mai lorsqu’il s’était déclaré favorable à l’interdiction du voile à l’université sur le plateau de RMC. UNE

VICTOIRE QUI LE POSITIONNE COMME UN SÉRIEUX CONCURRENT POUR 2027 En validant la participation des Républicains au gouvernement (qui compte aujourd’hui 8 ministres issus du parti), le

résultat du congrès est un soulagement pour François Bayrou qui s’est empressé de présenter sur X ses « _félicitations chaleureuses_ » pour la « _victoire magnifique_ » de son ministre.

C’est également une première éclaircie pour le parti après des années difficiles, marquées par la déroute de François Fillon en 2017, les 4,78 % et le marasme financier de la candidature de

Valérie Pécresse en 2022, la 5ᵉ position aux européennes de 2024, et le ralliement d’Éric Ciotti au Rassemblement national. Si le nouveau président du parti est resté prudent sur une

potentielle candidature à la présidentielle en 2027, la présence d’un candidat républicain crédible à ce scrutin était un enjeu du congrès. Selon un sondage publié début mai, face à une

candidature d’Edouard Philippe, une candidature Retailleau s’en sortait mieux qu’une candidature Wauquiez, sans toutefois dépasser les 10 % au premier tour. Une illustration que le chemin

s’annonce long pour une présence au 2e tour et un retour à la hauteur de son histoire sous la Vᵉ République. A LA RECHERCHE D’UNE BASE SOCIALE : LA CRISE STRATÉGIQUE DES LR SE MAINTIENT Si

l’élection éclatante de Retailleau constitue une éclaircie, il reste que le retour des Républicains en position de gouverner seuls n’est pas à l’ordre du jour. Son maintien dans le paysage

politique nationale relève essentiellement de la crise politique profonde dans laquelle est enfermée le macronisme ainsi que du caractère des plus anti-démocratique des instititutions qui

permet à LR de se maintenir comme une majorité incontournable au Sénat. Néanmoins, la crise stratégique du parti se maintient comme l’illustrent ses difficultés à se forger une base sociale

plus large qui lui permette de pouvoir constituer une alternative politique crédible au macronisme. Dans ce cadre, les discussions autour de l’union des droites (allant jusqu’à Zemmour)

ouverte par Wauquiez ne lui a vraisemblablement pas permis de toucher juste. Dans un parti profondément meurtri par la multiplication des crises, risquant jusqu’à la disparition, Bruno

Retailleau a su discuter avec l’esprit de revanche qui animait une large partie des adhérents. Dans ce cadre, il n’est pas exclu que la lune de miel soit de courte durée. En effet, pour

envisager exister en 2027, ou avant en cas de nouvelles législatives anticipées, les Républicains et Retailleau devront également affirmer leurs différences avec le bloc central pour espérer

se distinguer politiquement. Dans ces coordonnées, le départ de Retailleau du gouvernement, ainsi que des autres ministres LR, pourrait revenir tôt ou tard sur la table et déstabiliser un

gouvernement ne reposant que sur une étroite base parlementaire. Alors que LR et ses prédécesseurs, RPR et UMP, ont été un pilier du régime durant des décennies dans le cadre du bipartisme

français aux côtés du PS, le parti cherche une issue. Pris en tenaille entre le bloc central – qui prépare l’après-Macron – et le Rassemblement national, la perspective de futures

recompositions dans le cadre des présidentielles constituera le principal défi du parti pour sortir de sa crise historique.