Le génocide en palestine s'invite à l'ouverture du festival de cannes

Alors que le festival de Cannes s’ouvrait ce mardi, le génocide en Palestine s’y est invité. Le 16 avril, au lendemain de l’annonce de la sélection à Cannes de « Put your soul on your hands

and walk », un documentaire sur Gaza de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsile, Israël assassinait sa principale protagoniste en même temps qu’une partie de sa famille avec un missile

ciblant l’immeuble où elle résidait. Pour dénoncer cet assassinat et le silence d’une grande partie de la profession à propos du génocide en cours, une tribune signée par plus de 300

personnalités du cinéma, intitulée « _À Cannes, l’horreur de Gaza ne doit pas être silenciée_ » a été publiée dans Libération la veille de l’ouverture du festival. Pedro Almodovar, Xavier

Dolan, Leïla Bekhti, Virginie Efira, Adèle Exarchopoulos et plusieurs centaines d’autres acteurs de la culture dénoncent le silence complice de l’industrie du cinéma face à la situation à

Gaza : « _Une telle passivité nous fait honte. (…) Nous, artistes et acteur·ice·s de la culture, nous ne pouvons rester silencieux-se-s tandis qu’un génocide est en cours à Gaza, et que

cette actualité indicible touche nos milieux de plein fouet. À quoi servent nos métiers si ce n’est à tirer des leçons de l’histoire, des films engagés, si nous ne sommes pas présent·e·s

pour protéger les voix opprimées ?_ ». Alors que la présidente du jury de cette année, Juliette Binoche, faisait partie des signataires, elle a retiré son nom de la tribune au dernier

moment. Interrogée l’après-midi en conférence de presse sur ce recul, la présidente du jury est restée très évasive : « _Vous comprendrez peut-être pourquoi plus tard, je ne peux pas vous

répondre maintenant_ ». Le lendemain, pendant la cérémonie d’ouverture, elle a cependant rendu hommage à Fatma Hassouna en rappelant « [qu’elle] aurait dû être parmi nous, ce soir ». Une

sortie qui a esquivé la mention de la responsabilité de l’armée israélienne dans cette mort, comme l’ont dénoncé nombre de soutiens au peuple palestinien. Son discours montre cependant à

quel point l’actualité du génocide en Palestine ne saurait être esquivée cette année à Cannes. Une situation qui est loin de ravir tous les membres du festival, à l’image des déclarations de

l’écrivaine et membre du jury, Leïla Slimani, en conférence de presse. Alors qu’un journaliste demandait au jury si le festival de Cannes devait se positionner par rapport à la situation à

Gaza, elle a répondu, après qu’aucun autre juré n’a osé le faire : « _Je crois que le rôle de ce festival c’est de mettre en avant des artistes, des récits, des personnages, de capturer

quelque chose de ce que c’est, la vie humaine, dans ce qu’elle a de plus horrible mais aussi de plus beau. (…) Oui, la vie humaine est faite de monstruosité mais elle continue, malgré tout.

(…) On se lève, on s’habille, on éduque nos enfants. On rit, même quand une partie du monde est dans le noir_ ». Des propos dépolitisants qui se refusent à la moindre dénonciation du

génocide, et ce au moment même où Israël affame et tue par milliers les Palestiniens dans le cadre d’une nouvelle phase du génocide. Cela rappelle qu’une partie importante de la profession

continue à mettre sous le tapis le génocide mené par Israël et les puissances impérialistes à Gaza et la responsabilité du gouvernement français dans la poursuite des bombardements.

Cependant, alors que le génocide en Palestine s’intensifie, de plus en plus de personnalités publiques, et notamment du secteur culturel, prennent la parole pour dénoncer le génocide en

cours. La cérémonie du festival de rap et de R&B les Flammes, qui s’est tenue la même semaine, a vu se dérouler plusieurs interventions dénonçant le génocide et la responsabilité de

l’État français, par la voix de Médine ou encore de Kery James. Un prix a également été remis au collectif « Not about us » pour l’organisation d’un concert caritatif en avril 2024 au Zénith

de Paris en soutien aux Palestiniens. Trop longtemps, le secteur de la culture s’est mis à l’écart du premier génocide ouvert du XXIème siècle. Au moment où le nettoyage ethnique mené par

l’État d’Israël s’intensifie, il est urgent que les artistes et les travailleurs du secteur de la culture utilisent leur notoriété pour dénoncer le génocide en Palestine, ainsi que la

complicité de l’État français. On se rappelle du rôle joué par les artistes en mai 1968 lorsqu’en solidarité avec le mouvement de révolte étudiant et ouvrier, ceux-ci avaient obtenu

l’annulation forcée du festival de Cannes. Les artistes se revendiquant progressistes ne peuvent plus fermer les yeux. Ils doivent renouer avec une tradition de lutte et rompre avec la

dépolitisation du milieu qui joue un rôle important pour maintenir l’hégémonie culturelle des classes dominantes et leur soutien inconditionnel à l’État d’Israël et son génocide.