Covoiturage : Mobicoop, l’alternative solidaire à Blablacar
Covoiturage : Mobicoop, l’alternative solidaire à Blablacar"
- Select a language for the TTS:
- French Female
- French Male
- French Canadian Female
- French Canadian Male
- Language selected: (auto detect) - FR
Play all audios:
Soutenez Reporterre, même pour un euro, en moins de deux minutes. Merci.
Face à Blablacar, le covoiturage libre est à réinventer. C’est le pari que tente Mobicoop, une plateforme coopérative basée à Nancy qui met en relation les covoitureurs sans toucher de
commissions.
770 kilomètres séparent Nancy de Sanary-sur-Mer. Cette station balnéaire du Var est la destination qu’a choisie Marion pour y passer ses vacances. Pour s’y rendre, le trajet proposé à Marion
par Mobicoop revient à 46,20 euros en prenant en compte le prix fixé par défaut. Sur Blablacar il faut compter 65 euros. « Et encore, c’est le moins cher. En moyenne, les conducteurs
proposaient 72 euros pour le même trajet, et ça pouvait monter à 81,50 euros ! », ajoute Marion, en rougissant légèrement.
Et si Marion rougit, c’est parce qu’elle est chargée de communication à Mobicoop. Elle est bien obligée de nous avouer que les probabilités de trouver les deux personnes qui pourraient
remplir sa banquette arrière sont faibles si elle compte sur le site de covoiturage libre. Donc, elle le concède : elle va sur Blablacar... Le leader mondial du covoiturage revendique 70
millions d’utilisateurs répartis dans 22 pays – 16 millions rien qu’en France – contre 350.000 actuellement chez Mobicoop.
« C’est pour ça que notre objectif est d’avoir 1,5 millions d’utilisateurs d’ici à 2021. Ainsi, on aurait une offre de trajets assez bien répartis sur toute la France pour permettre aux
covoitureurs qui le souhaitent de se passer totalement de Blablacar », dit Matthieu Jacquot. Le directeur général de Mobicoop nous reçoit près de la vieille ville et de la fac de droit de
Nancy, en Meurthe-et-Moselle, dans la cuisine de l’appartement qui sert de local à la plateforme coopérative.
À l’entrée de l’immeuble, la sonnette indique encore le nom de son ancienne société : Covivo. En novembre 2018, cette entreprise spécialisée dans le service de covoiturage à destination des
entreprises et collectivités territoriales a fusionné avec l’association à but non lucratif qui gérait le site covoiturage-libre.fr, créé en 2011 en réaction au passage au mode payant de
Blablacar. Le mélange des deux entités a donc formé Mobicoop et rassemble une quinzaine de salariés. La moitié d’entre eux travaillent à Nancy, le reste en télétravail depuis la France
entière.
« On ne peut pas créer une vraie alternative au modèle dominant en nous reposant sur des dons, des bénévoles et des subventions, assure Matthieu Jacquot. On sent que les gens l’ont compris.
Depuis qu’on est passé du modèle associatif à la coopérative, il y a une réelle dynamique qui nous pousse à revenir aux valeurs sociales et écologiques du covoiturage. »
Aucune plus-value sur les actions, au moins 57,5 % des résultats obligatoirement réinvestis dans la coopérative, un sociétariat composé aussi bien de salariés que d’utilisateurs.... La forme
juridique employée par Mobicoop – la société coopérative d’intérêt collectif – repose sur ses coopérateurs. Actuellement, ils sont 850 à avoir pris au moins une part sociale à 100 euros. «
C’est le prix à payer pour se réapproprier la mobilité partagée comme un bien commun », justifie Patricia, une des coopératrices, qui coanime, avec Marion, un apéro de présentation de
Mobicoop qui se tient à quelques centaines de mètres du siège de la société en ce début du mois de juillet.
Devant une trentaine de curieux réunis à la Cantoche, le premier restaurant participatif, associatif et autogéré de Nancy, Patricia explique le principe de gouvernance sur lequel repose
Mobicoop : « Une personne égale une voix. La personne qui a pris une part sociale a autant de pouvoir en assemblée générale que la personne qui en a pris 100. »
En France, sept salariés sur dix vont travailler en voiture, d’après l’Insee. Or, le taux d’occupation moyen d’un véhicule en milieu urbain n’est que de 1,06 passager. En passant à deux
passagers, il y aurait un tiers des automobiles en moins en circulation en Île-de-France, par exemple. Bref, en réduisant le nombre d’autosolistes – automobilistes seuls au volant – on
réduit les embouteillages et les émissions de CO2 d’une pierre deux coups. Mais encore faut-il que le covoiturage soit accessible au plus grand nombre.
À Mobicoop, la mise en relation entre conducteurs et passagers est entièrement gratuite – quand les frais de service peuvent représenter jusqu’à 25 % du coût du trajet chez Blabacar. Pour le
Nancy – Sanary-sur-Mer de Marion par exemple, ces frais s’élèvent à 10 euros (sur 65 euros). Quant au prix fixé par défaut par la start-up au plus d’un milliard d’euros de valorisation, il
est de 0,071 euro le kilomètre sur ce même trajet, quand Mobicoop est à 0,060 euro le kilomètre. « À la grande différence de Blablacar, Mobicoop garantit qu’elle ne prendra jamais de
commission sur les trajets. L’argent des utilisateurs ne finit pas dans la poche des actionnaires ou de fonds d’investissements », annonce Patricia, qui porte fièrement le slogan de la
coopérative sur son tee-shirt : « Moins de bagnoles, plus de rossignols ».
Difficile, toutefois, de rivaliser avec les 400 millions d’euros de fonds levés par Blablacar depuis sa création sans se donner les moyens en face. Mobicoop espère que son capital –
actuellement 350.000 euros – atteindra deux millions d’euros d’ici 2021. Elle compte, pour cela, rassembler 20.000 coopérateurs au cours de sa campagne de sociétariat, débutée en décembre
2018 et toujours en cours. Gilbert, retraité depuis cinq ans, « bénévole à temps plein dans les associations », a pris deux parts chez Mobicoop. Une pour son épouse, une pour lui. « Quand je
tombe sur un passager étudiant, explique-t-il au cours de l’apéro à la Cantoche, je voudrais le faire voyager gratuitement mais sur Blablacar je ne peux pas, puisque le paiement s’effectue
en avance sur Internet. Pas sur Mobicoop. »
« La plupart des gens utilisent Blablacar parce qu’ils sont sûrs d’être payés », remarque un autre participant à la soirée, qui se demande ce que propose la coopérative pour éviter les
annulations de dernière minute. La plupart des paiements s’effectuant le plus souvent de main à main, entre le passager et le conducteur, Mobicoop ne peut donc pas garantir que le conducteur
soit rémunéré systématiquement.
« Mobicoop est vraiment basé sur la confiance, rappelle Patricia. Le but n’est pas de prendre les gens pour des escrocs permanents. » Un porte-monnaie électronique permet toutefois
d’effectuer les transactions le jour du trajet. Et une fonctionnalité de paiement en avance devrait bientôt voir le jour pour les passagers et conducteurs qui se seraient préalablement mis
d’accord par téléphone ou par messagerie.
Le système de notation et de profilage des utilisateurs devrait être défini par les membres eux-mêmes, invités à rejoindre un cercle de gouvernance. « Il ne faut pas que ça devienne une
dictature. Si vous n’avez pas 4,5 / 5, personne ne monte dans la voiture, précise Matthieu Jacquot, en référence au fonctionnement de Blablacar. Le conducteur est presque obligé de harceler
ses passagers pour qu’ils lui donnent une note. Sous-entendu : une bonne note. Au final, le passager met-il la note pour faire plaisir au conducteur ? Ou est-il vraiment objectif ? Le but de
Mobicoop doit être de trouver un moyen de prendre les avis des utilisateurs sans non plus faire du conducteur une marchandise dont l’unique but est de rentabiliser sa voiture. »
Coopérateurs, utilisateurs, bénévoles... Tous ont la possibilité de s’impliquer dans le projet. Maxime, l’un des cinq développeurs web, encadre quelques-unes des petites mains qui veulent
apporter de nouvelles fonctionnalités sur Mobicoop.fr. Ou écrire le code source de la prochaine version du site, qui devrait être opérationnelle d’ici janvier 2020. « On a toujours travaillé
à partir de logiciels libres, explique Maxime, arrivé il y a un an. Mais pour tout ce qui est calcul de distance, potentialité de croisement, etc., on était encore dépendant des services de
Google qui collectent énormément de données personnelles et les partagent aux autres Gafam [grandes firmes du Web, Google Apple Facebook Amazon Microsoft]. Notre but, d’ici janvier, est de
sortir complètement de Google avec des outils comme OpenStreetMap, un service de cartographie libre. Enfin... On ne va pas aller jusqu’à nous déréférencer du moteur de recherche. Il faut
quand même qu’on soit visible du plus grand nombre ! »
À terme, Mobicoop devrait diversifier ses services et proposer, en partenariat avec le réseau coopératif Citiz, des locations de voitures en libre service et de particulier à particulier. La
coopérative entend développer le « transport solidaire » pour les personnes non véhiculées, touchées par la fracture numérique ou la désertification des transports en commun. S’il n’y a ni
transport en commun, ni covoiturage déjà programmés qui permettent de répondre aux besoins de la personne, des bénévoles d’associations partenaires de Mobicoop seront invités à effectuer le
trajet contre remboursement des frais d’essence.
Enfin, la création de sites de covoiturage et autres services à destination des entreprises et des collectivités territoriales, enclenchée sous Covivo, se poursuit avec Mobicoop – et
représente environ 95 % du chiffre d’affaires actuel. Et si l’une de ces collectivités clientes de la plateforme coopérative venait à supprimer une petite ligne de bus ou de TER dans un
territoire enclavé tout en faisant appel aux services Mobicoop, comment réagirait-elle ? Ce cas de figure ne devrait pas se présenter, si l’on en croit Matthieu Jacquot, transports en commun
et covoiturage étant complémentaires, selon lui, et non concurrents.
Certes, « en courte distance, le covoiturage concurrence peu les transports en commun car il coûte sensiblement plus cher au kilomètre et il offre un confort moindre », note l’Agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) dans une étude de septembre 2015. Mais en longue distance, « il concurrence fortement le train surtout pour les déplacements des
étudiants se déplaçant vers le domicile familial et pour les déplacements pour les loisirs. (…) Ainsi, alors que 40 % des usagers se déplaçaient au moins une fois par mois en train avant le
covoiturage, ils ne sont plus que 26 % en covoiturant. »
« Si le covoiturage se substituait au train, ce serait une défaite, accorde volontiers le directeur de Mobicoop. Notre objectif est d’être là où l’offre de mobilité est inexistante ! » Oui,
mais admettons. Si ça arrivait ? Il réfléchit un temps, puis se lance : « Peut-on condamner politiquement une décision et y participer sur le plan économique ? Si vraiment il fallait se
poser cette question, je ne saurais y répondre seul. D’où l’intérêt, pour ce genre de décision, de décider collectivement. »
Personne ne modifie ce que nous publions. Nous n’avons ni actionnaire, ni propriétaire milliardaire — seulement une équipe d’irréductibles journalistes, pleine de détermination.
Trending News
ici Maure (64460) : actualités et infos de votre ville en continu - iciEn 2018, Maure dénombrait 99 habitants, et son territoire couvre 3,61 km². Sa densité de population s'élevait alors à 27...
Patrick Vieira fait le point avant le match OGC Nice-Fréjus/Saint-Raphaël dimanche: "Je n'ai pas de raison de faire tourner"Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités per...
Départements rouges, retour à l'école, masques obligatoires : toutes les annonces du gouvernement du 27 août - NumeramaC’est une conférence de rentrée particulière. Quelques jours avant la reprise des cours et alors que le nombre de cas de...
Saint-Jean-d'Alcapiès (12250)Saint-Jean-d'Alcapiès couvre un territoire de 8,49 kilomètres carrés. En 2018, on évaluait à 258 le nombre d'habitants d...
Résultats élections législatives 2024 : Agde (34300)Les résultats ci-dessous sont ceux de la ville de Agde (7e circonscription).Dans la 7e circonscription du département Hé...
Latests News
Covoiturage : Mobicoop, l’alternative solidaire à BlablacarSoutenez Reporterre, même pour un euro, en moins de deux minutes. Merci.Face à Blablacar, le covoiturage libre est à réi...
Départements rouges, retour à l'école, masques obligatoires : toutes les annonces du gouvernement du 27 août - NumeramaC’est une conférence de rentrée particulière. Quelques jours avant la reprise des cours et alors que le nombre de cas de...
Saint-Jean-d'Alcapiès (12250)Saint-Jean-d'Alcapiès couvre un territoire de 8,49 kilomètres carrés. En 2018, on évaluait à 258 le nombre d'habitants d...
Résultats élections législatives 2024 : Agde (34300)Les résultats ci-dessous sont ceux de la ville de Agde (7e circonscription).Dans la 7e circonscription du département Hé...
« Too Good To Go », l’application qui lutte contre le gaspillage alimentaireChaque Français gaspille en moyenne 29kg d'aliments par an, soit 10 millions de tonnes de produits gaspillés chaque anné...