Contre vents et marées, bercy défend sa politique fiscale

Hier, l'amendement des députés UMP Jean-Luc Warsmann et Marie-Anne Montchamp, qui prévoyait de sortir la CRDS du bouclier fiscal, a été rejeté. Publicité Face à des déficits abyssaux,

peut-on imaginer une autre politique ? Non, plaide Bercy, qui souligne que le dérapage des comptes publics n'est pas dû à une mauvaise gestion : pour une fois, les dépenses sont tenues.

«On nous donne des leçons, mais nous n'avons vu passer aucun amendement de baisse des dépenses publiques ou de suppression d'une niche fiscale !» ironise l'entourage

d'Éric Woerth, le ministre du Budget. Un ministre dont la ligne n'a pas varié : c'est la maîtrise des dépenses qui permettra de réduire le déficit. «Si ces dernières ne

progressent que de 1 % par an en volume et que la croissance économique atteint 2,5 %, le déficit public baissera de 1 % par an. L'Allemagne ne fera pas mieux», relève une source

gouvernementale. L'évaporation des recettes découlant de la crise a creusé le «trou» : 53 milliards de recettes fiscales perdus en un an, soit l'équivalent de l'impôt sur les

sociétés et l'impôt sur le revenu pour la région parisienne. Pas question pour autant d'augmenter les impôts. «Le gouvernement ne soutiendra aucune mesure qui irait dans le sens

d'une augmentation générale des impôts», a redit Éric Woerth mardi. Bercy assume sa politique d'allégements fiscaux menée depuis 2007. Ces baisses «discrétionnaires»,

c'est-à-dire non liées à la conjoncture, ont profité surtout aux ménages, souligne le ministère. «Le compteur à taxes de Ségolène Royal est ridicule, s'insurge l'entourage

d'Éric Woerth. Comment comparer le supermalus annuel sur les voitures polluantes, payé par 20 000 personnes par an, et le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt immobilier,

qui bénéficie à un million de contribuables !» LE BOUCLIER PRÉSERVÉ Seul hic : les parlementaires doutent de plus en plus de cette politique. «Sans nouvelles mesures alourdissant les

prélèvements obligatoires, ramener à moyen terme le déficit public à son niveau d'avant la crise semble un exercice très difficile, pour ne pas dire impossible», écrit Philippe Marini,

le rapporteur général UMP du budget au Sénat. Et de préciser que si la crois­sance n'était que de 1 % par an, le déficit atteindrait 10 % du PIB dans une dizaine d'années. Le

gouvernement a gagné une ­première bataille. En commission des finances de l'Assemblée, l'amendement des députés UMP Jean-Luc Warsmann et Marie-Anne Montchamp, qui prévoyait de

sortir la CRDS du bouclier fiscal, a été rejeté. En revanche, Bercy est prêt à accepter une baisse du plafond global des niches fiscales, aujourd'hui fixé à 25 000 euros, plus 10 % du

revenu. Mais il veut éviter de nuire au dispositif outre-mer. C'est toute la complexité du sujet. Car dans chaque niche, il y a un chien. Ainsi la commission des finances a-t-elle

prolongé d'un an l'avantage de la demi-part pour parent isolé, qui devait disparaître progressivement. Elle a rejeté les propositions de taxer à l'IR les carried interests et

les plus-values de cessions de titres dès le premier euro. Coup de tonnerre sur la TP DES députés de la majorité ont fait adopter hier en commission un sous-amendement modifiant en

profondeur la réforme de " la taxe pro " : la cotisation sur la valeur ajoutée qui remplacera en partie la TP sera prélevée à partir de 152 000 euros de chiffres d'affaires,

au lieu des 500 000 euros. Pour Jérôme Chartier, l'un des cosignataires du texte, " il faut éviter que les collectivités abritant des petites entreprises ne perdent des recettes et

ne reportent le poids de la fiscalité sur les ménages ". Problème : ce nouveau seuil coûterait près de 1 milliard aux entreprises et réduirait donc fortement la réforme. Le Medef a

immédiatement dénoncé une " provocation ". " Nous allons travailler avec le gouver-nement pour corriger ce biais afin que la réforme soit neutre pour tout le monde ",

assure Jérôme Chartier. Mais l'issue finale reste incertaine. LIRE AUSSI » Budget 2010 : tensions sur le bouclier fiscal et la taxe professionnelle