Comment les médias se sont fait une place sur les écrans de smartphones
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© Crédits photo : Didier Allard / INA. Depuis 2007 et la commercialisation du premier iPhone, les smartphones et leurs applications se sont largement généralisés, révolutionnant le monde de
la téléphonie mobile… et de la presse. Parfait support pour fidéliser les lecteurs, les notifications (ou push) se sont imposées comme un format à part entière. Vincent Bresson Publié le 25
mars 2019 « Tout le monde se bat pour l’attention et elle est limitée. » Ces propos tenus par Tristan Harris, ancien salarié de Google, résume l’état de l’économie de l’attention qui s’est
développée conjointement aux usages d’Internet et des smartphones. Plus de vingt ans après les débuts de la presse française sur Internet, le Web est devenu un canal d’information essentiel.
Depuis 2016, la consultation mobile des sites Internet dépasse celle sur ordinateur, et les mobinautes passent 40 % de temps de plus sur les sites d’information que les internautes
traditionnels. D’après une étude réalisée en 2018 par le site d’analyse marketing eMarketer, 90% du temps passé sur mobile l’est sur des applications, dont près de la moitié consacré à une
seule appli. Dans l’objectif de toucher au mieux les utilisateurs mobile (_mobile first_), la presse s’est donc emparée depuis quelques années des _push _(ou alertes). Nathalie
Pignard-Cheynel, professeure à l’académie du journalisme et des médias de l’université de Neuchâtel, a coréalisé en 2016 une étude sur le sujet, aux côtés d’Arnaud Mercier, directeur des
études à l’Institut français de presse (IFP). « Nous avons été frappés par le côté artisanal de la chose. C’était plutôt le stagiaire qui faisait les notifications, sans réel contrôle, sans
hiérarchisation ni ligne éditoriale, à part BFM TV qui a une certaine culture de l’actualité en continu », constate-t-elle. > Auparavant, il fallait un quota de notifications par jour.
Certaines > pouvaient ne renvoyer vers aucun contenu ou aucun article. Les premiers envois de notifications étaient souvent très nombreux car il s’agissait souvent de « pusher » le
maximum d’alertes mobiles. Depuis, ces pratiques ont changé. « Ce n’est plus trop le cas aujourd’hui, mais auparavant, il fallait un quota de notifications par jour. » À tel point que
certaines pouvaient ne renvoyer vers aucun contenu ou article, ce qui n’est presque plus le cas aujourd’hui. Thibaud Vuitton, rédacteur en chef du site_ _France info, admet des difficultés «
à se saisir journalistiquement de cet outil » au démarrage. Mais avec l’expérience et les retours d’utilisateurs, le regard des rédactions sur les notifications a évolué. Au sein de France
info, il n’y a plus l’inquiétude « intrusive » du départ. « Envoyer plus d’alertes ne fait pas fuir les utilisateurs. Pour les élections américaines de 2018, nous avons ainsi pushé une
quinzaine de fois en une journée, alors que la moyenne habituelle est de sept à huit fois. » Cet apprentissage du « bon _push_ » s’est fait petit à petit et les enseignements ont été
nombreux : peu d’utilisateurs se désabonnent des alertes, plus les_ pushs_ sont espacés plus ils sont susceptibles d’être ouverts, énumère Thibaud Vuitton. Cette approche empirique a permis
d’optimiser l’outil, devenu incontournable. UN PUSH, DES USAGES À mesure que l’envoi de _pushs_ s’est rationalisé et a évolué, il s’est accompagné d’une prise de conscience. « Aujourd’hui,
on le considère comme un format éditorial à part entière », souligne Thibaud Vuitton. Pour accrocher le lecteur, les médias se sont progressivement adaptés à ce canal, multipliant les
formats. La _Columbia Journalism Review_ a d’ailleurs dressé une typologie et identifié quatre grands formats de notification : le _breaking news_, le _teaser_, le résumé et le supplément de
contexte. Analysant pendant trois semaines les alertes de différents médias américains, la revue spécialisée avait noté que le supplément de contexte était privilégié (55 % des
notifications). Au sein des rédactions françaises aussi, les usages diffèrent. Francetv sport profite par exemple de la pause repas pour envoyer à ses utilisateurs un _push_ au contenu
léger, quand France info, spécialisé dans l’information en continu, propose des_ lives _pour suivre, heure par heure, une actualité chaude. La rédaction de _20 Minutes_ a, quant à elle, fait
le choix des « rendez-vous », répartis sur différentes périodes de la journée. « C’est une manière d’avoir de l’info rapidement. Cette notion de rendez-vous est importante, cela permet de
créer du lien avec le lecteur. C’est quelque chose qui fonctionne », argue Anne Kerloc'h, rédactrice en en charge de la distribution, des réseaux sociaux et des formats au sein du
quotidien gratuit. La stratégie en matière de notifications concerne aussi la rapidité d’envoi et entraîne une course à la publication. « Il y a ceux qui pushent le plus vite possible vers
des articles parfois un peu vides et ceux qui, comme _Le Monde_, se refusent à être les plus rapides et prennent le temps », décrypte Simon Dawlat, responsable de Batch, entreprise française
qui se revendique leader sur le marché de la gestion de notifications dans l’Hexagone. > « Nous nous sommes saisis des notifications, mais si elles ne sont > plus adaptées demain,
nous reverrons notre stratégie. » L’envoi de _pushs_ peut aussi différer selon le système d’exploitation mobile. Android active ainsi les notifications mobiles par défaut, là où iOS demande
l’autorisation à ses utilisateurs. L’une des dernières mises à jour du système d’exploitation mobile d’Apple tente d’ailleurs de surfer sur la vague de la déconnexion numérique en envoyant
dorénavant les notifications d’une application par paquets. Si cette tendance à la déconnexion risque de s’accentuer à l’avenir et pourrait limiter l’efficacité des _pushs_, cela n’inquiète
pas pour autant Thibaud Vuitton. « Plus les gens savent se servir de leur téléphone, mieux c’est. Le jeu, pour nous, est de coller le plus possible aux usages. Nous nous sommes saisis des
notifications, mais si elles ne sont plus adaptées demain, nous reverrons notre stratégie. » DES MÉDIAS ANGLAIS ET AMÉRICAINS INNOVANTS Malgré cette variété de possibilités, les médias
français ne font que trop peu preuve d’originalité, estime Nathalie Pignard-Cheynel. « Aux États-Unis par exemple, on utilise les codes de la messagerie avec des émoticônes, un ton léger et
incitatif. L’important, c’est de se faire une place sur cet écran, qui appartient au domaine de la vie privée. » Le_ New York Times_ est, lui aussi, très porté sur les notifications. En
2016, le quotidien a mis sur pieds une équipe de 11 personnes dédiées aux _pushs_. Leur objectif ? Les rendre plus efficaces. Le _New York Times_ peut ainsi adresser des notifications
uniquement à ses lecteurs présents dans telle ou telle région en fonction de l’actualité, plutôt qu’à l’ensemble des détenteurs de l’application. À tel point qu’Andrew Phelps, qui dirigeait
cette équipe, avait annoncé traiter « le _push_ comme une nouvelle forme de mise en récit ». Outre-Manche, le_ Guardian_ a multiplié les innovations en la matière ces dernières années. Pour
l’élection présidentielle américaine de 2016, une notification live permettait d’obtenir de façon détaillée les résultats du scrutin d’un coup d’œil sur son téléphone. _Capture d'écran
des alertes du _Guardian_. _ Cette attention particulière porté aux notifications va jusqu’à donner la possibilité de suivre l’actualité de son club favori ou à demander des retours sur les
_pushs_, dans le but de les améliorer. UN OUTIL DE FIDÉLISATION Quelques années après l’introduction des alertes sur les apps de sites d’informations, 15 % des Français en reçoivent chaque
semaine. L’institut Reuters pour l’étude du journalisme est parvenu au constat qu'il s'agit de la source d’accès aux médias en ligne ayant connu la plus forte croissance au cours
de ces trois dernières années. Pour autant, les_ pushs_ ne sont pas un pourvoyeur massif de trafic vers les articles, comme le confirment les chiffres de l’entreprise Batch. « Le taux
d’ouverture des notifications médias se situe en moyenne entre 1,5 et 4 % et il peut monter jusqu’à 10 %, voire 15 % parfois, mais aussi descendre très bas », détaille Simon Dawlat, le
fondateur du groupe. > Il est facile d'oublier ses applications, et les notifications > permettent de les rappeler au bon souvenir, même si elles ne > génèrent pas de trafic.
Cette statistique n’est cependant pas le seul objectif poursuivi par les médias dotés d’applications mobile. Thibaud Vuitton, de France info, y voit un marqueur éditorial permettant à son
titre de se différencier et un outil de management permettant de mobiliser toute la rédaction autour du _push_, notion importante dans le cadre d’un média d’information en continu. Surtout,
cela permet de viser la part la plus fidèle des lecteurs, qui a téléchargé l’application. C’est aussi sur cet aspect d’attachement que la chercheuse Nathalie Pignard-Cheynel insiste, car les
notifications sont avant tout un moyen de maintenir le lien avec un lectorat mobile cinq fois plus fidèle via application que celui venant des réseaux sociaux. « Cela permet aux médias
d’avoir une présence et de garder le contact avec les utilisateurs. On oublie souvent ses applications, et les notifications permettent de les rappeler au bon souvenir, même si elles ne
génèrent pas de trafic. » CINQUANTE NUANCES DE NOTIFICATIONS Outre les alertes, d’autres canaux se multiplient avec plus ou moins de succès, au gré des différents usages mobile. Ainsi,
l’apparition des agents conversationnels1 sur Messenger en 2016 avait fait naître des espoirs au sein de nombreux médias, qui y avaient vu un nouvel outil pour capter l’attention des
lecteurs. Deux ans plus tard, ces _chatbots_ n’ont pas confirmé les espoirs placés en eux et le magazine spécialisé _Wired_ a même annoncé leur mort courant 2018. « C’était aussi un moyen de
donner de l’info à nos lecteurs de manière plus intime: sur sa messagerie privée Facebook », souligne Damien Allemand, responsable digital de _Nice-Matin_. Le journal a lancé en avril 2017
son _chatbot_, Tibot, pour finalement l’arrêter l’année suivante. « L’usage des bots est très très limité », commente Thibaud Vuitton. Aujourd’hui, ces _chatbots_ se limitent à des demandes
pré-enregistrées, ce qui restreint l’expérience de l’utilisateur, même si cela permet aussi d’être assuré du bon déroulement de la conversation puisqu’elle devient automatique. Seuls _20
Minutes_,_ _LCI_ _ou encore France info ont conservé un agent conversationnel, réduit au strict minimum._ Le chatbot _de_ 20 Minutes _fournit l’horoscope chaque matin, l’édition du jour en
format PDF ou permet tout simplement… de discuter. Anne Kerloc’h explique en être très fière « d’une part parce qu’il a été développé en interne et d’autre part parce qu’il a été désigné par
Facebook US comme étant l’une des applications les plus téléchargée en la matière ». _ _ À LIRE ÉGALEMENT... Certains médias français se sont aussi lancés depuis plusieurs années dans
l’envoi d’articles sur Whatsapp. _Libération_ a par exemple créé des conversations pour les événements sportifs importants, comme lors de la dernière Coupe du monde de football ou des Jeux
olympiques de Rio. De son côté, _20 Minutes_ alimente quotidiennement ce canal de communication, à la façon d’une newsletter. Le problème ? « Sur WhatsApp ce sont des communautés limitées,
entre 3 000 et 10 000 personnes. Mais nous avons un très bon taux d’ouverture sur ce support », constate Anne Kerloc’h. Ces expérimentations passent par des échecs. Mais ils ne peuvent être
parfois que temporaires. Si la technologie s’améliore et que les usages changent, il est possible que les _chatbots_ soient de nouveaux utilisés par les médias. L’exemple de Quartz, média
économique américain dont l’application mobile basée sur une conversation de type _chatbots_ fait figure de référence, prouve qu’il est possible pour certains d’entre eux de perdurer, s’ils
sont originaux, adaptés aux formats et respectent les codes des messageries (gifs, émoticônes, etc.). « Le truc, ce n’est pas de capter l’attention du lecteur, c’est d’être là où le lecteur
va. Et quand il aura de l’attention à accorder, on sera là pour répondre à cette demande », résume Thibaud Vuitton. Même si, parfois, ce n’est pas l’outil technologique le plus moderne qui
s’impose sur la durée, comme le prouve la persistance des _newsletters_. * 1ces interfaces qui permettent de dialoguer avec le lecteur
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