L’entrée en vigueur du ceta: un scandale démocratique

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Le traité de libre-échange avec le Canada, ce que l’on appelle le CETA, est donc entré en application le jeudi 21 septembre. Il montre de manière éloquente que les Etats se sont laissé


dessaisir de leur souveraineté et qu’un nouveau droit, indépendant du droit de ces mêmes Etats et non soumis à un quelconque contrôle démocratique, est en train de s’imposer. LES


MULTINATIONALES CONTRE LES ETATS Le CETA constitue ce que l’on appelle un « traité de libre-échange ». Mais, en réalité, il s’attaque aux normes non-tarifaires que pouvaient prendre un


certain nombre d’Etats, en particulier pour protéger leur population en matière de pollution. Sur ce point, il est à craindre que le CETA n’organise une course au démantèlement de ces normes


protectrices. A cela s’ajoute le risque induit par le mécanisme de protection des investisseurs contenu dans le traité. Le CETA, en effet, crée un système de protection de ces investisseurs


entre l’Union européenne et le Canada qui, par l’institution d’un tribunal d’arbitrage leur permettrait de poursuivre un État (ou une décision de l’Union européenne) si une décision


publique prise par cet Etat était de nature à compromettre les « attentes légitimes en terme de retour sur investissement ». Autrement dit, c’est un mécanisme, que l’on appelle la clause


ISDS (ou RDIE) qui sert essentiellement de protection des bénéfices futurs. Et ce mécanisme est à sens unique : un État ne pourra pas, lui, poursuivre une entreprise privée dans le cadre


ainsi prévu. On constate alors que le CETA va permettre aux investisseurs d’attaquer des décisions politiques s’ils estiment qu’elles vont à l’encontre de leurs intérêts. Cette procédure,


qui pourrait s’avérer très coûteuse pour les Etats, aura un effet dissuasif dans le cas d’une simple menace de procès. A cet égard, rappelons qu’en 2011, le Québec recula sur l’interdiction


d’un composant d’herbicide, dont on suspectait les effets cancérigènes, et qui était commercialisé par _Dow Chemical_, car cette dernière société était déterminée à porter l’affaire devant


les tribunaux. Il y a ensuite un problème de réciprocité ; il est bien beau de dire que ce traité ouvre les marchés publics canadiens aux entreprises européennes, mais le marché de l’Union


européenne (UE) est déjà ouvert aux entreprises canadiennes. Il suffit de regarder la disproportion entre les populations pour savoir qui est vainqueur. Au-delà, il y a le problème plus


général du libre-échange, ou plus précisément de l’interprétation du libre-échange que l’on trouve dans ce traité. Il fait la part belle aux intérêts des firmes multinationales, intérêts qui


ne sont pas précisément ceux des consommateurs ni ceux des travailleurs. REJETÉ MAIS… APPLIQUÉ Les menaces que le CETA fait peser concernent donc la santé publique, et aussi, c’est une


évidence, la souveraineté. Mais ce traité menace aussi la démocratie. Quand il fut finalement voté par le Parlement européen, au sein des députés français, quatre groupes ont voté contre, le


Front de Gauche, les écologistes d’EELV, le Parti socialiste et le Front national. Une alliance peut-être pas si étrange que cela quand on connaît les problèmes que soulève ce traité. Il


est en fait significatif qu’il ait été rejeté par les délégations de 3 de 5 pays fondateurs de la Communauté économique européenne (CEE), et par les pays représentant les 2ème et 3ème 


économies de la zone Euro. Pourtant, ce traité a été ratifié au Parlement européen, le 15 février 2017, et il doit être ratifié par différents parlements nationaux. Or, il est considéré


comme applicable en partie dès avant sa ratification par les Parlements nationaux. Le CETA a donc été adopté de manière provisoire et partielle le 21 septembre 2017, sur les volets de


compétences exclusives à l’UE, excluant temporairement certains volets de compétences partagées nécessitant le vote des pays membres de l’UE, comme la question des tribunaux d’arbitrage ou


de la propriété intellectuelle. Mais environ 90 % des dispositions de l’accord seront appliquées. Cela pose un véritable problème de démocratie politique. De même, si un pays rejetait la


ratification du CETA, ce dernier n’en continuerait pas moins à s’appliquer pendant trois ans. On le voit, tout a été fait pour que ce traité soit élaboré et appliqué en dehors de la


vérification et de la volonté des peuples. Dans les faits, ce traité n’est pas, en réalité, ce que l’on qualifie d’habitude de traité de « libre-échange ». Il s’agit d’un traité qui vise


essentiellement à imposer des normes – normes qui ont été décidées pour et par les entreprises multinationales – aux divers parlements des pays membres de l’Union européenne. Si l’on avait


voulu une démonstration de la nature profondément anti-démocratique de l’UE on ne se s’y serait pas pris autrement. Cela pose un problème tant de démocratie que de légitimité pour ceux qui


se sont fait les chantres de ce traité. On sait qu’en France un seul candidat à l’élection présidentielle, Emmanuel Macron, avait pris ouvertement position pour le CETA. L’un de ses


principaux soutiens, Jean-Marie Cavada, avait lui aussi voté pour l’adoption du traité au Parlement européen. On voit donc se profiler dans l’élection présidentielle, et ce n’est pas nouveau


dans notre histoire, le fameux « parti de l’étranger » que dénonçait, en décembre 1978, Jacques Chirac depuis l’hôpital Cochin…[tooltips content=’Haegel F., « Mémoire, héritage, filiation :


Dire le gaullisme et se dire gaulliste au RPR », _Revue française de science politique_, vol. 40, no 6,‎ 1990, p. 875′]1[/tooltips] [embedded content] MACRON L’ÉCOLO, LE CETA ET MONSIEUR


HULOT Nicolas Hulot, avant que d’être nommé ministre dans le gouvernement d’Edouard Philippe, avait pris des positions nettes contre le CETA. Son maintien au gouvernement, dans ces


conditions, vaut reniement. Certes, le ministre de la Transition écologique (sic), n’a pas dissimulé une forme de déception, vendredi dernier, sur _Europe 1_. Il a reconnu que nombre des


risques potentiels contenus dans le traité avait été identifiés par la commission d’évaluation nommée par Edouard Philippe en juillet dernier. Mais il a ajouté : « _le processus était


tellement lancé que, à moins d’un incident diplomatique avec le Canada, ce que nous ne souhaitions pas, c’était difficile d’enrayer son entrée en vigueur _». On ne saurait mieux décrire les


mécanismes d’irréversibilité qui ont été sciemment construit avec ce traité. Rappelons aussi que, avant d’être nommé ministre de la Transition écologique, l’ancien animateur télé avait


estimé à plusieurs reprises que le CETA n’était pas « climato-compatible ». On mesure, sur ce point, la taille de la couleuvre, voire du véritable boa, qu’il a dû avaler… Or, Emmanuel Macron


s’est posé, depuis son élection, en défenseur tout à la fois de l’écologie et de la planète en reprenant, et détournant, le slogan de Donald Trump « _Make the Planet Great Again_ ». Il a


réitéré ces propos, que ce soit aux Nations-unies ou lors de son voyage aux Antilles à la suite de l’ouragan Irma. Mais il faut bien ici constater que son engagement pro-CETA et sa


soumission aux règles de l’Union européenne, qui a pourtant pris un retard dramatique sur la question des perturbateurs endocriniens, montre que, décidément, ce n’est pas l’écologie qui le


motive et que cette dernière n’est qu’un prétexte à des effets de communication du plus mauvais goût et de très mauvais aloi. Il faut donc avoir une pleine conscience de ce que signifie


l’application du CETA, mais aussi des dangers que ce dernier fait peser pour la souveraineté nationale, la démocratie et la sécurité du pays. RETROUVEZ TOUS LES ARTICLES DE JACQUES SAPIR SUR


SON BLOG _RUSSEUROPE_ Vous venez de lire un article en accès libre. Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance. Pour nous soutenir, achetez Causeur en


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