La soufflerie Eiffel, un laboratoire qui cherche à rafraîchir les villes
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Loin d’être un simple monument historique, l’Aérodynamique Eiffel poursuit la mission de son fondateur : étudier le vent, ses écoulements et ses effets sur les structures.
Un simple ronronnement… C’est le faible bruit généré par cette ancestrale soufflerie, nichée au cœur du quartier d’Auteuil à Paris. Pourtant, le ventilateur, qui tourne à 280 tours par
minute est capable de produire un vent de 100 kilomètres/heure ! « La machine, qui fête ses 111 ans cette année, n’a pas pris une ride et fonctionne parfaitement », se félicite Benoît
Blanchard, gérant de la soufflerie depuis douze ans. Sous ses dehors de décor de film fantastique, cette immense structure en bois tendue de toiles de lin est un joyau de notre patrimoine
industriel et un haut lieu de science. Ici, on étudie les effets du vent et de l’air sur des maquettes d’avion, de voiture, de bâtiment…
À l’origine du projet : Gustave Eiffel. Le célèbre bâtisseur, concepteur, entre autres, du viaduc de Garabit (Cantal), des plans de la statue de la Liberté et bien entendu de la tour qui
porte son nom, a vécu une seconde carrière, moins connue du grand public. « C’était un scientifique de premier plan, l’un des précurseurs de l’aérodynamique expérimentale », relève Benoît
Blanchard. Et son choix d’étude ne doit rien au hasard. Confronté aux dangers du vent sur ces chantiers et ses constructions (le viaduc de la Tardes, dans la Creuse, s’est ainsi effondré en
1884 suite à une violente tempête), Eiffel l'a décrit dans ses mémoires comme son « ennemi ». Retraité depuis 1893 de l'entreprise de construction qu'il a créée, Eiffel installe une première
soufflerie sur le champ de Mars, au pied de la tour. « Au lieu de déplacer des objets dans l’air, comme il le faisait quand il lâchait des objets depuis le premier étage de la tour Eiffel,
il semblait plus simple, pour les étudier, de déplacer l’air autour des objets », poursuit le gérant.
Mais la Ville de Paris, qui reprend la concession, lui demande de déménager sa disgracieuse construction. Eiffel jette alors son dévolu sur une parcelle d’un quartier maraîcher et très peu
bâti (à l’époque) : Auteuil. L'ingénieur va y bâtir la soufflerie la plus performante de son temps. Il y conçoit tout entièrement, appareils de mesure compris. « C’est incroyable de se dire
qu’on manipule des manettes installées et utilisées par Eiffel lui-même, sourit Benoît Blanchard. C’est vraiment plus qu’un laboratoire, il y a beaucoup de profondeur ici, c’est un lieu
inscrit dans le temps, dans l’histoire des sciences et de l’aérodynamique. »
Pour alimenter sa soufflerie, l’ingénieur tire un câble électrique depuis la tour Eiffel. On parle de soufflerie mais, en réalité, le dispositif est un gigantesque aspirateur, qui aspire
l’air vers l’objet d’étude plutôt que de souffler dessus. « L’idée d’Eiffel est de générer le moins de turbulences possible, d’avoir la brise la plus laminaire », explique Jean-Marie Franco,
directeur opérationnel de la soufflerie. Rapidement, l’installation attire l’attention des avionneurs. En effet, si ces derniers parviennent déjà à faire voler des engins, l’aérodynamisme
est une science naissante et les principes du vol et du fonctionnement des ailes et des hélices restent mal compris. Lors des essais, les accidents sont trop souvent mortels. Avec une
soufflerie, les concepteurs vérifient la fiabilité de leur maquette sans risquer la vie de leurs pilotes. Eiffel leur laisse alors son laboratoire gracieusement – l’argent ne semble pas être
un problème pour l’ancien bâtisseur – à disposition. « Sa seule exigence : que les résultats soient publiés et à disposition de tous. Un vrai précurseur de l’open source », souligne Benoît
Blanchard.
C’est dans cette soufflerie que les concepts de traînée et de portance sont formalisés. « On comprend que l’écoulement de l’air provoque une dépression au-dessus de l’aile, qui l’aspire vers
le haut », explique Jean-Marie Franco. Le design des avions évolue et passe du triplan au biplan, puis à l’aile unique. Et l’intérêt des constructeurs s’amplifie avec le déclenchement de la
Première Guerre mondiale. Eiffel teste alors des modèles réduits de nouveaux avions militaires.
L’après Seconde Guerre mondiale marque une rupture dans l’histoire de la soufflerie. Les avions deviennent supersoniques et les constructeurs ont besoin de vents plus rapides et de lieux
plus vastes pour tester leurs modèles. L’automobile va les remplacer : la voiture de tous les jours, mais également les modèles de course. Dès 1912, les scientifiques de la soufflerie
avaient découvert qu’un corps « en goutte d’eau » générait moins de traînées, une force contraire au mouvement. C’est donc sur ces formes profilées que les constructeurs travaillent pour
augmenter la vitesse de leur modèle. La célèbre Alpine M63, dessinée pour la course, est d’ailleurs mise à l’épreuve dans la soufflerie avant de rejoindre le circuit du Mans (Sarthe).
Aujourd’hui, les maquettes de voiture se font rares dans la chambre d’expérience de la soufflerie mais on y croise parfois des drones, dont on vérifie les capacités de vol par vents forts,
ou des cheminées, dont on évalue la capacité à évacuer correctement les fumées. Des équipes viennent également pour mesurer les bruits générés par les bardages qui décorent certaines
constructions. Mais le cœur de l’activité de la soufflerie concerne surtout le bâtiment.
Signe des temps, le vent est désormais perçu comme un allié pour lutter contre la chaleur. « Avec certaines vitesses de circulation de l’air, entre 0,5 et 1,5 mètre/seconde, on peut abaisser
la sensation de chaleur de 4 °C, car les courants d’air favorisent l’évapotranspiration, le tout en évitant que les papiers ne s’envolent », explique Jean-Marie Franco. Pour cela, des
mesures de différences de pression entre les façades, à l’origine des courants d’air, sont effectuées sur des maquettes réalisées sur place et soumises à diverses puissances de vent.
L’équipe a ainsi récemment conduit des essais sur un projet d’arena ouverte pour l’île de Mayotte. Cette ventilation naturelle peut également s’appliquer à tout un quartier. « On vérifie
alors que chaque bâtiment bénéficie de l’accès aux vents, que ces derniers ne sont pas bloqués par une autre construction et que l’air circule dans les artères pour rafraîchir la rue et les
piétons », raconte Benoît Blanchard. Ces études répondent à la fois à des impératifs économiques, pour faire face à la crise énergétique, qu’écologiques. Gustave Eiffel serait peut-être
surpris de l’évolution des champs d’étude de sa soufflerie mais certainement enthousiasmé de constater qu’elle répond encore et toujours aux besoins de son temps.
L’aérodynamisme de la fameuse Alpine M63, développée au début des années 1960 pour les courses de voitures, a été étudié dans la soufflerie. Grâce à sa forme en goutte d’eau, conçue dans ce
laboratoire, elle pouvait dépasser les 220 kilomètres/heure, malgré une puissance modeste de 95 chevaux.
⋙ Le 31 mars 1889, le jour de l'inauguration de la Tour Eiffel
⋙ Pourquoi la foudre frappe-t-elle si souvent la tour Eiffel ?
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