Rentrée du barreau de paris : « l’état de droit doit être en permanence protégé et défendu »

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Rentrée du barreau de Paris : « L’État de droit doit être en permanence protégé et défendu » - Actu-Juridique PARTAGER CET ARTICLE Publié le 28/11/2022 à 10h12 Journaliste LORS DE LA


CÉRÉMONIE SOLENNELLE DE RENTRÉE DU BARREAU DE PARIS, CHAQUE INTERVENANT A RÉAFFIRMÉ SON ATTACHEMENT À L’ÉTAT DE DROIT DONT LES AVOCATS DEMEURENT DE FIDÈLES GARANTS. ME JULIE COUTURIER,


BÂTONNIÈRE, A PLAIDÉ L’INTÉRÊT « DE JOUER COLLECTIF » AVEC LES MAGISTRATS.  L’événement est toujours chaleureux et, comme chaque année, les _standing ovations_ ont ponctué la prise de parole


des orateurs. Le 25 novembre 2022, quelque 200 avocats, en robe, avaient pris place dans les travées du théâtre du Châtelet (Ier arrondissement). Parmi eux, les délégués de barreaux du


Canada, des États-Unis, d’Asie, d’Afrique, de pays européens. Au premier rang, étaient assis de hauts magistrats en fonction à Paris, dont Christophe Soulard, premier président de la Cour de


cassation, le procureur général près la cour d’appel Rémy Heitz, la procureure de la République Laure Beccuau, le président du tribunal judiciaire Stéphane Noël, le procureur du parquet


national financier Jean-François Bohnert et son homologue à l’antiterrorisme, Jean-François Ricard, ainsi que le président du tribunal de commerce, Paul-Louis Netter. Sur la scène, comme le


veut la tradition, se tenaient la bâtonnière, Me Julie Couturier, le vice-bâtonnier, Me Vincent Nioré, les 42 membres du conseil de l’ordre et 12 secrétaires de la Conférence. Un fauteuil en


velours rouge cardinal est longtemps resté vide : à Dijon avec le Président Macron, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, est arrivé à 15 h 40, 100 minutes après l’ouverture de la


cérémonie, retard dont il a prié la salle de l’excuser. LE TEMPS OÙ PARIS FAISAIT LA CHRONIQUE JUDICIAIRE EST RÉVOLU   Le ministre n’a donc pas applaudi les premier et deuxième secrétaires


de la Conférence, Mes Charles Héran et Jennifer Cambla (voir notre encadré), ni écouté Anne Hidalgo, maire de Paris, à qui revenait l’honneur d’ouvrir la rentrée. Exprimant son « admiration 


pour les avocats, pièces centrales de notre démocratie » et leur « combat fondamental », l’édile préfère vite se concentrer sur son action contre le dérèglement climatique et « le diesel qui


tue ». D’où son soutien, redit-elle, à la proposition de loi pour un crime d’écocide (rejetée au profit d’un délit en 2021) : « Ça dépasse un peu mes compétences de maire de Paris mais j’ai


la chance d’être entendue donc j’en profite. » Revenant au 25 novembre qui marque la journée contre les violences faites aux femmes, elle salue la profession « qui accompagne la révolution


du _Me Too_ ». Elle assure de son soutien les 32 000 membres du barreau de la capitale, puis s’accorde un étonnant satisfecit : « Le temps où Paris faisait parler d’elle pour des affaires


politico-financières, pour moi, est bel et bien révolu ». La formule aurait-elle pour ambition de priver les magistrats présents de toutes velléités ? LE « J’ACCUSE » DE ME NIORÉ EN FAVEUR


DE L’ARMÉNIE  Après la remise des prix aux secrétaires de la Conférence (notre encadré), le vice-bâtonnier, Me Vincent Nioré, prononce un discours flamboyant. L’ancien délégué aux


contestations des perquisitions chez les avocats, pas épargné par l’institution judiciaire en 2020, va la piquer de banderilles. Ce qui n’empêchera pas les magistrats de l’applaudir, et le


ministre de lui décocher un « cher Vincent, décidément toujours en forme… » Apprécié tant pour ses qualités professionnelles que sa liberté, le pénaliste consacre son préambule à l’Arménie,


terre de ses ancêtres maternels où il s’est récemment rendu tandis que l’Azerbaïdjan dévaste à nouveau le petit pays. Fustigeant « une Europe désespérément muette au nom du gaz de Bakou »,


la capitale de l’agresseur, il honore la bravoure « des femmes en première ligne », notamment l’Arménienne Anush Apetyan, égorgée le 14 septembre, et Jina Masha Amini, jeune Kurde d’Iran


tuée par les mollahs de Téhéran deux jours plus tard. « Le pire peut arriver, mais il faut vivre, m’a dit un journaliste à Erevan », alors il monte au combat avec « l’arme du droit » que


partagent avocats et magistrats. À ces derniers, Me Nioré suggère de « tarir les flux financiers des bourreaux, ces élites azerbaïdjanaises qui ont versé trois milliards de pots-de-vin à des


responsables occidentaux, européens, fait de corruption révélé en 2017. Parce que je suis avocat, j’accuse ! Alors que je suis avocat, j’accuse ceux qui depuis cinq ans savent, se taisent


et ne font rien ! Alors, Mesdames et Messieurs des parquets spécialisés, si prompts à agir en vos matières, qu’attendez-vous ? » NE PAS « TRANSFORMER LE PRÉTOIRE EN CORRIDA JUDICIAIRE »


Puis « l’arme du droit » de Me Nioré s’abat sur « l’arsenal disproportionné des atteintes à la vie privée et au secret professionnel » du barreau : « Pour mener notre mission démocratique,


la défense et le conseil, nous devons garantir que ce qui nous est confié restera confidentiel. Quels que soient le lieu, le moment, le support de la confidence, quelles qu’en soient la


gravité et la teneur. » Géolocalisation, sonorisation, fadets, interception de correspondances électroniques, convocation, garde à vue, « l’arsenal de la coercition et de l’intrusion est


asphyxiant, paralysant. Nous, avocats, vous disons basta ! » Grave, également, ce « poison mortel » inoculé à la défense : « J’ai nommé la théorie de l’escroquerie au jugement qui s’épanouit


ces temps-ci dans les prétoires. Elle est une intruse qu’il faut chasser, tant elle écrabouille la présomption d’innocence et l’acte de défendre. Le procès pénal ne doit pas être un


guet-apens. » Il espère « l’apaisement et le front uni » dont « la justice a besoin », plutôt que « broyer un avocat et violer son secret. On ne juge pas jusqu’à la mise à mort de la


défense en transformant le prétoire en corrida judiciaire. » Mot choisi : le ministre de la Justice est un fervent aficionado. Estimant « impératif de faire la paix », il « tend la main »


aux parquetiers et juges en rendant hommage au regretté Me Antoine Sollacaro, bâtonnier corse assassiné le 16 octobre 2012, qui justement fut une de leurs bêtes noires. Comme lui, le


pénaliste s’avoue « résistant de la défense » : « Par-delà les réformes, les intrusions, coercitions et contraintes, le barreau reste à jamais un contre-pouvoir envers et contre tout ! Pace


è Salute ! » REFUSER « LES JUGEMENTS À L’EMPORTE-PIÈCE, LA RADICALITÉ, LA VULGARITÉ »  La bâtonnière, Me Julie Couturier, lui succède à la tribune. « Fidèle à l’un des plus beaux principes


de notre serment, l’humanité », la 4e femme élue à la tête de l’Ordre rappelle qu’il « habitait notre cher Olivier Cousi », son prédécesseur décédé le 2 mars 2022. « Je suis le bâtonnier de


Kaboul, avait-il clamé l’an passé au soutien des confrères en danger », remémore-t-elle. Elle aussi pense à ceux privés de droits, les Ukrainiens, Iraniennes, également les Polonaises et


Américaines « condamnées aux avortements clandestins ». À « l’État de droit, qui doit être en permanence protégé et défendu », elle consacre l’essentiel de son intervention, tant « il est


menacé, y compris en Europe. D’où la responsabilité des avocats de dire, traduire, d’expliquer, transmettre les principes du droit, l’importance du droit, la force du droit. La


responsabilité de rappeler inlassablement que la règle nous protège et nous permet de vivre en société ». Mission « infinie, quasi sacrificielle », reconnaît-elle. Me Couturier entend mener


la bataille. _A fortiori_ quand « le tribunal médiatique, ce terrible tribunal de l’opinion, conduit à vouloir déconstruire nos textes et nos valeurs les plus fondamentaux, jusqu’à la


présomption d’innocence ». Son sens de la dignité due à chacun la convainc d’insister sur « le droit au procès équitable. Sa remise en question à la télévision signe le paroxysme d’un


mouvement de fond qui voit l’émotion prendre le pas sur la raison, la complexité du monde s’effacer devant les jugements à l’emporte-pièce, la radicalité et la vulgarité, primer sur la


nuance ». Ainsi, le temps légitime de la justice se « fracasse contre l’obsession d’immédiateté, sans conteste l’un des maux de notre siècle ». Elle y voit « une attaque contre l’autorité


judiciaire ». « NOUS DEVONS JOUER COLLECTIF ! » Si l’on en est « arrivé là », poursuit Julie Couturier, c’est en partie à cause du « désengagement financier de l’État qui a conduit la


justice à la ruine ». Autre cause, « l’infinité de lois et décrets » qui ont tout complexifié « sans jamais réussir à valoriser l’œuvre de justice ». Également responsables, les « 


affrontements réguliers » entre acteurs judiciaires, effet collatéral d’une « justice pauvre et d’un droit de plus en plus abscons qui asphyxie ceux qui la font vivre », et « la charge de


travail des magistrats, devenue telle qu’ils n’ont plus le temps d’entendre les avocats : c’est la fin de l’oralité, de l’humanité du dossier, tragique cercle vicieux ». Regrettant des


années de « dialogue aride », voire « impossible », elle se réjouit de constater « que nous sommes en train d’inverser la tendance », précisant faire « du rapprochement avec nos partenaires


de justice l’un des fils conducteurs de [son] mandat. Nous devons jouer collectif ! » Mais « pour affronter ensemble la situation, nous devons la regarder en face ». La spécialiste du droit


de l’exécution déplore, par exemple, les attentes en matière civile : 14 mois pour la première décision, plus de trois ans en cas d’appel. Elle relève que les magistrats eux-mêmes « ne


l’acceptent plus », évoque « leur longue marche » : la tribune de la Conférence des premiers présidents de cour d’appel au printemps 2021, « l’appel des 3 000 » en novembre dernier, le


rapport du comité des États généraux s’alarmant de « la souffrance au travail manifestée par l’ensemble de la communauté judiciaire ». Reconnaissant les efforts du garde des Sceaux Éric


Dupond-Moretti, Julie Couturier admet que « la rénovation ne se fera pas en un claquement de doigts et qu’il faut, comme on dit, “laisser sa chance au produit” ». Après avoir dit sa


gratitude aux magistrats Stéphane Noël et Rémy Heitz, aux membres de l’Ordre, à Jérôme Gavaudan, président du Conseil national des barreaux, la bâtonnière annonce que la Contrôleuse générale


des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, sera marraine de promotion 2023/2024 des élèves-avocats, succédant ainsi à Me Richard Malka, deux personnalités très applaudies.  « IL


RESTE BEAUCOUP À FAIRE POUR REMETTRE LA JUSTICE À FLOT » « Le produit à qui vous laissez une chance, Madame la bâtonnière, est très heureux d’être cette année encore parmi vous, lui répond


le ministre de la Justice. C’est un honneur, un grand plaisir, car revenir parmi mes anciens confrères est un peu ma madeleine de Proust. » Éric Dupond-Moretti, qui a exercé la profession 35


ans, considère les avocats comme « les vigies de l’État de droit », lequel fait « tous les jours l’objet d’inlassables critiques ». Il vise principalement « l’extrême-droite qui, en


campagne présidentielle, en a promis la suppression » et « une chaîne d’information continue » qui « laisse accroire que l’État de droit est au mieux un élément superfétatoire, au pire un


frein à l’efficacité d’une répression que l’on veut accrue. Je le dis solennellement : ce n’est pas un bien dont on peut disposer », martèle-t-il (notre article du 25 novembre). Rappelant


qu’il se mobilise pour la justice depuis son installation en 2020, « avec mes équipes », il agrée « qu’il reste beaucoup à faire pour remettre la justice à flot ». Il dresse un premier bilan


positif : 26 % d’augmentation du budget en trois ans, 44 % sur cinq ans, déjà plus de 700 magistrats, 850 greffiers, 2 000 contractuels « qui ont réduit de plus de 25 % le stock des


affaires sur le plan national ». Il parle d’avenir, « de ce grand projet de loi de programmation » qui verra l’arrivée de plus de 10 000 personnels, dont 1 500 magistrats, autant de


greffiers, de la hausse de l’aide juridictionnelle (AJ), comme nous l’annoncions dès vendredi (ICI). AJ qui sera accordée à l’avocat dans le cadre du renforcement des procédures amiables. En


conclusion, Éric Dupond-Moretti confirme qu’il présentera en cours de semaine ses enseignements « les plus consensuels » des États généraux de la justice, dont la réforme du décret


Magendie. « Ah !, s’exclame-t-il sous l’ovation, on fait toujours attention, dans un discours de cette nature, à choisir des choses qui font plaisir aux magistrats et avocats. » Il s’engage


« à raccourcir les délais insupportables » pour les justiciables. Enfin, il achève sa prise de parole par une touche personnelle, à l’adresse de ses ex-confrères : « Vous êtes souvent là


quand il n’y a plus personne. Je me souviens d’un client qui m’a dit “c’est la première fois qu’on dit du bien de moi.” Vous êtes au cœur de l’humanité. Vous trouverez toujours, à la


Chancellerie, une oreille attentive. »   DISCOURS DES PREMIER ET DEUXIÈME SECRÉTAIRES DE LA CONFÉRENCE Me Charles Héran, premier secrétaire de la Conférence en 2022, a consacré son discours


à Monique et Roland Weyl, jeunes avocats en 1948, mariés en 1950, vaillants combattants, avec leurs confrères communistes, contre les dénis de démocratie. Me Jennifer Cambla, deuxième


secrétaire, a retracé le drame du 27 octobre 2005, la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) en fuyant la police, l’infortune de l’ami


survivant, Muhittin Altun. Elle s’est aussi concentrée sur le procès des gardiens de la paix, relaxés, et les plaidoiries de Mes Mignard et Merchat. REMISES DE PRIX En cette rentrée


solennelle du barreau de Paris, des magistrats et avocats, dont des membres de barreaux étrangers, ont remis de nombreux prix aux secrétaires de la Conférence, ici autour de Me Julie


Couturier, bâtonnière, et du vice-bâtonnier, Me Vincent Nioré. La médaille de la Conférence, qui a honoré ce dernier en 2020, distingue cette année le travail de l’ancienne juge


d’instruction Aïda Chouk, désormais conseillère près la cour d’appel de Paris, et de sa fidèle greffière Julie Charrier, de celles qui « derrière une discrétion contrainte, sont les


récipiendaires de notre confiance », a salué Me Lorraine Thouéry, huitième secrétaire de la Conférence. Le Prix Pierre-Drai, remis par son fils Me Rémi-Pierre Drai, a été attribué à notre


consœur, Pascale Robert-Diard, du quotidien _Le Monde_. Référence : AJU333798 Copier dans le presse-papier


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