Qu’est-ce qu’un prélèvement sur recettes ?
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Qu’est-ce qu’un prélèvement sur recettes ? - Actu-Juridique PARTAGER CET ARTICLE Publié le 07/10/2019 docteur en droit Pour la première fois, le Conseil constitutionnel annule la création,
par la loi ordinaire, d’un prélèvement sur recettes destiné à couvrir, pour la collectivité de Polynésie française les charges liées « aux déséquilibres d’ordre économique provoquées par
l’arrêt des activités du centre d’expérimentation du Pacifique », alors que l’article 6 de la LOLF exige que les prélèvements sur les recettes de l’État soient « dans leur destination et
leur montant, définis et évalués de façon précise ». Le périmètre des charges prises en compte dans le cadre d’un prélèvement doit donc être précisément défini. Cons. const., 27 juin 2019,
no 2019-784 DC : loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française Cons. const., 27 juin 2019, no 2019-784 DC : loi portant diverses dispositions institutionnelles
en Polynésie française Si le droit budgétaire se crée plutôt par voie de prescription, il arrive parfois que l’empirisme en soit aussi une source. Tel est le cas, rare mais significatif, du
principe de sincérité, dégagé progressivement par la jurisprudence et la pratique avant d’être inscrit dans le marbre du texte organique1. Tel est aussi celui des prélèvements sur recettes,
qui n’étaient prévus ni par le décret-loi du 19 juin 1956 sur le mode de présentation du budget de l’État, ni par l’ordonnance du 2 janvier 1959, ni par le règlement général de comptabilité
de 1962. Le chemin a été long avant que l’article 6 de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ne les reconnaisse en les réservant à la destination des collectivités
territoriales ou des Communautés européennes, mais pas des organismes de sécurité sociale, ni a fortiori des services de l’État2. Ainsi limitée, il est cependant significatif que cette
possibilité soit inscrite à l’article de la LOLF qui rappelle notamment les principes d’unité et d’universalité budgétaires, auquel elle déroge puisque la technique des prélèvements sur
recettes consiste à rétrocéder directement un montant de recettes à des organismes identifiés « en vue de couvrir des charges incombant à ces bénéficiaires ou de compenser des exonérations,
des réductions ou des plafonnements d’impôts établis au profit des collectivités territoriales. Ces prélèvements sur les recettes de l’État sont, dans leur destination et leur montant,
définis et évalués de façon précise et distincte ». Si la loi organique en a reconnu, et, du même mouvement, encadré l’existence, c’est qu’en 2001 la pratique était fermement établie, et,
qu’en dépit de critiques récurrentes contre le mécanisme, il était délicat, voire impossible de revenir sur celle-ci. Apparus de manière empirique en 1969, pour compenser la suppression
d’impôts locaux, et prévoir en particulier au profit des communes un versement représentatif du montant de l’impôt sur les spectacles3, puis en 1971, pour assurer la contribution de la
France au budget des Communautés européennes, ces prélèvements sont naturellement d’autant plus sujets à critique que leur montant est important. Or il a sensiblement augmenté au fil du
temps : en 2004, les prélèvements opérés au profit des collectivités locales atteignent 45,10 Md€ dont 36,80 Md€ pour la seule dotation globale de fonctionnement, (DGF). En 2010, ils
s’élèvent à 85,90 Md€ dont 41 Md€ pour la DGF, cette augmentation s’expliquant par les transferts de compétences liés à la décentralisation, notamment à la loi du 13 août 20044. Le
prélèvement au profit du budget de l’Union européenne atteint alors 18,23 Md€. Pour 2019, 62 Md€ sont prélevés, dont, au profit de l’Union, 21,44 M€ et au profit des collectivités
territoriales, 40,57 Md€. La DGF à elle seule représente 26,96 M€ et le FCTVA, 5,60 M€. Les critiques portent non seulement sur le montant ainsi « prélevé » mais aussi sur le mécanisme
lui-même. Ces prélèvements ont en effet pu être analysés comme permettant de contrevenir aux règles de non-contraction des dépenses et des recettes et de non-affectation des recettes. Ils
modifient donc la présentation même de l’équilibre, minorant le montant des recettes et des dépenses, et portent atteinte à l’unité et à l’universalité budgétaire5. Ainsi, la Cour des
comptes réitère régulièrement l’observation selon laquelle la ligne de partage entre dotation aux collectivités territoriales et prélèvements n’est pas explicite6. En 2016, elle recommande
de « poursuivre la redéfinition plus précise du périmètre des concours financiers de l’État, qui relèvent soit de prélèvements sur recettes soit de dotations budgétaires » avant de
constater, l’année suivante, que cette recommandation n’a pas été mise en œuvre : « la DGCL a rappelé que la répartition actuelle ne contrevient ni aux dispositions de la LOLF sur les
conditions permettant au législateur d’instituer un prélèvement sur recettes de l’État (article 6 de la LOLF) ni à la jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière »7. Le Conseil
d’État estimait dans l’avis, préalable à la LOLF, du 21 décembre 20008 que « les concours apportés par l’État aux collectivités territoriales (…) ne sont pas différents des autres dotations
». Plus ambigu apparaît le prélèvement sur recettes opéré au profit de l’Union européenne9: le versement de la France apparaît dans la première partie de la loi de finances et fait l’objet
d’un débat spécifique et d’un vote du Parlement, dont la portée apparaît paradoxale. En effet, si le débat permet, utilement, de faire le point sur la politique européenne, un éventuel vote
négatif remettrait en cause l’application du traité ou des politiques communautaires dont le prélèvement n’est qu’un constat, dont le montant n’est que la conséquence. Cet article n’est donc
que la simple photographie d’un scénario entièrement décidé par les institutions européennes. Une augmentation du prélèvement, par exemple aux fins d’amplifier une politique structurelle,
juridiquement possible, serait sans effet en l’absence d’une traduction dans le budget de l’Union. Or le montant du prélèvement est fixé ex post. Le vote est donc largement contraint, dans
son principe comme dans le montant du prélèvement, même si l’article d’autorisation est l’occasion d’un débat annuel sur la politique européenne. « De tels dispositifs nationaux sont
entachés d’une présomption d’irrégularité au regard du droit communautaire. Pis, en France, le recours au mécanisme de “prélèvement sur recettes” maintient un lien formel avec le budget
national. Le gouvernement use à cette fin de la formule équivoque du “prélèvement sur recettes” pour comptabiliser dans la présentation budgétaire de la loi de finances annuelle les
ressources propres allouées aux Communautés européennes » 10. On peut en conclure que les deux types de prélèvements sur recettes sont justifiés par la spécificité des recettes qu’ils
financent. C’est le motif pour lequel la LOLF a été restrictive, prenant acte de l’existant. Avant celle-ci, le Conseil constitutionnel, à trois reprises, avait admis cette entorse à
l’universalité. Dans la décision de principe n° 82-154 DC du 29 décembre 1982, il a jugé que « le mécanisme de ces prélèvements ne comporte pas, comme l’impliquerait un système
d’affectation, l’établissement d’une corrélation entre une recette de l’État et une dépense incombant à celui-ci ; qu’il s’analyse en une rétrocession directe d’un montant déterminé de
recettes de l’État au profit des collectivités locales ou des Communautés européennes en vue de couvrir des charges qui incombent à ces bénéficiaires et non à l’État et qu’il ne saurait,
dans ces conditions, donner lieu à une ouverture de crédits dans les comptes des dépenses du budget de l’État ». En outre, dans la même décision, il est jugé que les prélèvements sur
recettes n’introduisent aucune contraction entre recette et dépense, en s’appuyant sur le fait que ces prélèvements sont récapitulés dans l’état A annexé au projet de loi de finances de
l’année : si ces sommes ne figurent pas dans l’article d’équilibre, le mécanisme, limité à ces deux types d’attributions et excluant l’État, n’altère pas la sincérité budgétaire. Par la
décision n° 89-268 DC du 29 décembre 198911, il confirme que la DGF n’est pas une dépense. Cette position a été confirmée avec une décision n° 98-405 DC du 29 décembre 199812, qui a admis un
mécanisme de prélèvement sur recettes au profit de collectivités territoriales en compensation d’exonération d’impôts locaux « dès lors que celui-ci est, dans son montant et sa destination,
défini de façon distincte et précise dans la loi de finances, et qu’il est assorti, tout comme les chapitres budgétaires, de justifications appropriées ; tel est le cas des compensations
mentionnées par les députés requérants, qui sont intégrées dans les prélèvements retracés et évalués à l’état A annexé à la loi de finances ». À titre incident, on notera non seulement cette
exigence de transparence à travers l’information parlementaire, mais également le fait que l’initiative parlementaire en tire un indéniable avantage : les prélèvements constituent, au titre
de l’article 40 de la constitution, une opération qui concerne les recettes, donc susceptible de minorations, gagées, ou de majorations13. Les prélèvements sur recettes ne sont pas
considérés comme des charges publiques et la majoration de leur montant est une perte de recettes, qui peut être gagée. Ce mécanisme est donc favorable au droit d’amendement parlementaire :
il sert souvent de « gage » à des pertes de recettes des collectivités locales. C’est d’ailleurs ce qui justifie que le dispositif de l’article premier de la loi déférée, introduit par un
amendement sénatorial lors de la séance du 13 février 2019 soit recevable, même si l’intention des auteurs est non seulement de « sanctuariser » la dotation globale d’autonomie perçue par la
collectivité, d’un montant de 90,60 M€, mais au-delà, la « dette nucléaire », ses conséquences environnementales, le démantèlement des atolls du Hao et Mururoa, etc. Au demeurant cette
démarche ne peut être qu’encouragée par la loi organique du 5 juillet 2019 dont l’article premier affirme que « la République reconnaît la mise à contribution de la Polynésie française pour
la construction de la capacité de dissuasion nucléaire et la défense de la Nation »14. On peut considérer que la dérogation aux principes budgétaires que représentent les prélèvements est
assortie d’une triple condition : le périmètre des destinataires possibles, qui garantit que celui-ci n’inclut pas l’État, faute de quoi le mécanisme aboutirait à une débudgétisation,
l’information parlementaire spécifique, qui garantit la sincérité de l’autorisation, faute de quoi l’autorisation parlementaire serait compromise, et la précision des finalités de
l’opération elle-même, qui garantit le respect de la nature du prélèvement. Alors que jusqu’ici la jurisprudence avait conclu explicitement au respect des deux premières conditions, et
implicitement au respect de la troisième, pour la première fois, le Conseil constate que cette condition n’est pas remplie. L’article premier de la loi transformait la dotation d’autonomie
en prélèvement sur recettes. Tout en faisant part de son accord sur le principe, le gouvernement s’était opposé au dispositif, s’en remettant à la prochaine loi de finances, les travaux
préparatoires permettant de rappeler que la loi peut être à l’origine de la création d’un prélèvement15, ce que la présente décision confirme. La loi de finances joue, en toute hypothèse, le
rôle décisionnel ultime, comme en matière de loi de programmation : il faut que la disposition soit précisément « répercutée », donc que le montant soit fixé en loi de finances 16.
L’innovation que représente la décision du 27 juin 2019 réside donc dans la censure du prélèvement sur recettes, insuffisamment précisé quant à son objet. En dépit de son opposition, le
gouvernement avait défendu dans ses observations le dispositif devant le Conseil constitutionnel : « Sa destination est définie par référence à son bénéficiaire et aux charges qu’il s’agit
de compenser. La libre administration des collectivités territoriales fait obstacle à une affectation du prélèvement à des dépenses précises. Il y a lieu d’observer, à titre d’exemple, que
la destination de la dotation globale de fonctionnement, qui a le caractère d’un prélèvement sur recettes, n’est pas déterminée de façon plus précise ». L’appréciation du Conseil est
différente. L’article 6 de la LOLF exige une définition précise, et la loi se contentait d’indiquer que le prélèvement est destiné « à couvrir les charges liées, pour la Polynésie, aux
déséquilibres d’ordre économique provoqués par l’arrêt des activités du centre d’expérimentation du Pacifique », et sur ce point la formule est beaucoup plus vague que celle qui préside à la
fixation du montant de la DGF. Même si les débats parlementaires avaient strictement fait coïncider le prélèvement avec la dotation globale d’autonomie, alors que l’amendement initial avait
une portée plus large, une telle rédaction est en effet de portée assez aléatoire. Sur le fond, le gouvernement s’est engagé, après la décision comme avant celle-ci, à créer le prélèvement
sur recettes dans la prochaine loi de finances. L’apport de cette décision n’est donc pas d’établir un blocage, mais bien de rappeler la portée de la LOLF. Lorsque celle-ci exige une
précision spécifique, elle s’adresse au contenu des lois de finances, mais également au législateur ordinaire. Référence : LPA 07 Oct. 2019, n° 147g2, p.10 Référence : AJU62457 Copier dans
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